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Sentence: fin des collants sur les autopatrouilles

Photo: Josie Desmarais
Stéphanie Marin, La Presse canadienne - La Presse Canadienne

MONTRÉAL — Finis les autocollants «On a rien volé, nous» et «Contre la loi 3» sur les voitures de police de Montréal et les postes du SPVM: un tribunal d’arbitrage vient d’ordonner à la Fraternité des policiers de cesser d’en poser et de rembourser les frais engendrés pour tous les enlever.

La sentence ne vise toutefois pas les autocollants sur les vestes pare-balles.

Ces collants avaient été posés par les policiers montréalais pour protester contre le projet de loi 3 du gouvernement provincial — devenu depuis la loi 15 — qui proposait de revoir les régimes de retraite du secteur municipal, une mesure législative qu’ils jugeaient désavantageuse pour eux.

Depuis le 15 juillet 2014, les autocollants se sont retrouvés sur des voitures de police identifiées, des postes de commande et des bureaux du Service de police de la ville de Montréal (SPVM). Il y en a même qui ont été apposés sur les voitures tons sur tons, c’est-à-dire les autos blanches avec lettrage blanc et sans gyrophares. Selon la Ville, la pose d’autocollants sur de tels véhicules nuit aux interventions des policiers, puisqu’ils sont censés être plus discrets.

Dans la sentence arbitrale rendue fin décembre, il est écrit que les collants sont apposés «de façon désordonnée». Dans certains cas, les véhicules pouvaient être presque entièrement tapissés d’autocollants. Dans d’autres cas, ils formaient des dessins: des flammes, le sigle de Superman ou encore une étoile de shérif. D’autres ont été apposés de façon à former des mots, par exemple, «vol», ou encore «Coderre voleur», faisant référence au maire de Montréal, Denis Coderre.

La Ville a fait enlever à un certain moment en 2014 tous les collants, mais de nouveaux ont aussitôt été apposés.

Elle a soutenu que ces gestes des policiers constituent du vandalisme sur ses biens, lui causant ainsi des dommages et engendrant de nombreux coûts pour les faire enlever et ensuite nettoyer le tout.

La Ville a alors déposé un grief patronal pour régler la situation.

En janvier 2017, il y a toujours des autocollants, a confirmé la Fraternité des policiers de Montréal, contactée lundi.

Aucun n’a toutefois été apposé depuis la sentence arbitrale datée du 29 décembre, a précisé Martin Desrochers, directeur de la recherche et des communications à la Fraternité.

Les policiers font valoir depuis le début que le principe de la liberté d’expression leur permet d’exprimer ainsi leur opposition au projet de loi, que la présence des autocollants ne nuit pas à leur travail et qu’ils ont été conçus pour être enlevés facilement, sans endommager les biens de la Ville.

Dans sa sentence, l’arbitre Nathalie Faucher a rappelé que la liberté d’expression a des limites.

Dans ce cas précis, elle souligne que les autocollants apposés par la Fraternité comportent divers messages laissant sous-entendre que les corps publics — dont le gouvernement québécois, qui a adopté la loi — n’ont pas respecté le principe de la libre négociation ou encore qu’ils sont des voleurs. «Il est donc compréhensible que le SPVM, en tant que corps policier, ne souhaite pas être associé à de tels messages», écrit-elle.

Elle dit pencher en faveur de la restriction de la liberté d’expression dans ce cas.

«L’employeur s’objecte à ce que ses biens soient utilisés à titre de support du message de la Fraternité. Celle-ci peut toujours afficher ses messages sur ses biens personnels et sur les biens personnels de ses membres, tout comme elle peut s’exprimer par sa tenue vestimentaire. Rien ne l’empêche non plus de faire connaître sa position par le biais des médias», écrit-elle.

Quant aux coûts, l’arbitre n’a pas statué sur l’étendue de la facture que la Fraternité devra payer pour les dommages causés aux véhicules et aux édifices, ainsi que pour leur nettoyage. Elle laisse les parties s’entendre à ce sujet. L’arbitre relève toutefois que selon des documents de la Ville, enlever un autocollant prend moins d’une minute.

Et Mme Faucher n’a toutefois pas ordonné à la Fraternité de payer des dommages exemplaires, comme le réclamait la Ville, car «le but poursuivi par la Fraternité n’était pas d’atteindre illicitement au droit de propriété de la Ville mais d’exercer une activité expressive faisant partie de son droit à la liberté d’expression», tranche-t-elle.

Lundi, la Fraternité a déclaré prendre acte de la sentence et souligné qu’elle est étudiée par ses avocats.

Aucune décision n’a donc encore été prise quant à une possible contestation de cette décision.

Le projet de loi 3 est devenu la loi 15, soit la «Loi favorisant la santé financière et la pérennité des régimes de retraite à prestations déterminées du secteur municipal», lorsqu’elle a été adoptée à l’Assemblée nationale le 4 décembre 2014. Elle est entrée en vigueur le lendemain.

Cette mesure législative a imposé le partage à parts égales du coût des régimes de retraite dans le milieu municipal. De nombreux syndicats ont déposé des requêtes devant les tribunaux pour contester la constitutionnalité de cette loi.

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