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Denis Gallant: «On veut vraiment nettoyer Montréal»

Photo: Yves Provencher/Métro

L’inspecteur général de la Ville de Montréal, Denis Gallant espère voir reculer prochainement l’influence du crime organisé dans la métropole. Auteur lundi d’un rapport marquant sur des pratiques illégales et empreintes de violence découvertes au sein de l’industrie du remorquage, l’avocat montréalais, en poste depuis février 2014, compte aller encore plus loin et veut s’attaquer à de nouveaux secteurs troubles.

Avez-vous été surpris de voir l’influence, «en quasi totalité» comme vous le mentionnez, du crime organisé dans l’industrie du remorquage?
Non, j’avais eu des indices depuis un bout de temps. Avec mon passé de procureur à la Couronne sur le crime organisé, je connaissais déjà certaines personnes dans cette industrie. Mais voir autant de déclarations précises et concordantes, voir des pratiques aussi généralisées, ça, ça m’a surpris.

La situation de cette industrie est-elle alarmante?
Le constat est alarmant, mais on donne des pistes de solution. Durant notre enquête, on a consulté la Ville et c’est rassurant de la voir à pied d’œuvre pour régler cette situation. Bien sûr, il y a des impératifs légaux, mais je pense que ça va se faire d’une façon assez urgente. Tout ce que l’on propose est faisable et adaptable. On est confiant.

Vous recommandez notamment l’implication du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) pour enquêter sur le personnel de chaque compagnie qui obtient un contrat. Pourquoi?
La clef passe par le SPVM. Il est capable d’enquêter sur le passé criminel d’un actionnaire ou de certains chauffeurs. Souvent, dans le remorquage d’autos liées à un délit, les patrouilleurs sont les premiers sur les lieux. Le SPVM est vraiment le plus apte pour nous aider.

Mais ne craignez-vous pas la multiplication de prête-noms pour contourner vos règles?
On est présent sur le terrain, on a un réseau d’informateurs qui sont capables d’analyser la situation. Si rien ne change, on va être avisé, ne vous inquiétez pas. Et ceux qui vont prêter leur nom vont également être punis. Le crime organisé s’est installé dans le remorquage car ce secteur était payant et non règlementé. On n’éliminera pas le crime organisé, mais on va lui mettre des bâtons dans les roues. Le jeu ne vaudra plus la chandelle et il ira voir ailleurs.

«On est sur le terrain, on pose les gestes nécessaires. Ça se parle dans le milieu et on va continuer d’être le plus tannant possible.» – Denis Gallant, inspecteur général de Montréal

Le problème ne sera-t-il pas transféré à un autre secteur?
On n’éradiquera jamais le crime organisé, mais on veut vraiment nettoyer Montréal. On veut que ces activités deviennent si peu attrayantes qu’il sera forcé de partir. Je suis optimiste car le crime organisé n’aime pas avoir les spotlights sur lui.

Enquêtez-vous sur d’autres secteurs justement?
Certains sont à risque, mais je ne peux pas en parler dans les détails. Il y a notamment une enquête en cours sur les piscines municipales. On a reçu de nombreuses plaintes en raison de plusieurs dépassements de couts. On va continuer de travailler.

La collusion et la corruption sont-elles encore bien implantées dans les mœurs à Montréal?
Surtout la collusion, oui. Des gens nous disent, parfois avec bonne foi: «c’est mon secteur, c’est mon contrat» ou «on se parle entre nous». Mais ce n’est pas légal. Il y a beaucoup d’éducation à faire. Après la commission Charbonneau, beaucoup de gens ne se sont pas sentis interpelés car ça concernait le domaine de la construction. Ils ont continué de reproduire les mêmes stratagèmes, mais dans le déneigement et le remorquage.

Le rôle du Bureau de l’inspecteur général (BIG) est-il donc plus que jamais essentiel à Montréal?
Son rôle sera toujours essentiel. Depuis 2014, on a réussi à modifier quelques façons de faire, on a appris des choses, on s’est amélioré. Maintenant, on nous appelle dès qu’il y a un problème. On est seulement 30 personnes au BIG et on ne peut pas être partout, mais on compte de plus en plus d’alliés et un excellent réseau de dénonciateurs. Dans un passé pas si lointain, les gens qui avaient vu des choses avaient peur de dénoncer, peur des représailles. Ce n’est plus le cas. On a aussi le pouvoir de contraindre les compagnies de nous répondre. On ne mène pas d’enquêtes criminelles, il n’existe pas de présomption d’innocence ou de droit de silence. Toutes les personnes en relation contractuelle avec la Ville doivent répondre à nos questions.

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