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Les toilettes autonettoyantes de la Ville de Montréal sont source de discrimination

Photo: Josie Desmarais/Métro

Les nouvelles toilettes autonettoyantes montréalaises ne sont pas totalement accessibles aux personnes en fauteuil roulant électrique en raison de la calibration du poids maximal acceptable.

Récemment, la Montréalaise Jessica Cacciatore a eu une mésaventure en voulant tester l’une des nouvelles toilettes autonettoyantes installée ce printemps par la Ville de Montréal, celle située près de la station de métro Papineau. La porte ne fermait pas. «Afin de sécuriser les lieux contre le sexe, la drogue et le rock ‘n’ roll, le plancher a un détecteur et lorsqu’il détecte [la présence de] deux personnes, la porte ne ferme pas. Alors moi, qui suis en fauteuil motorisé, et mon amie en quadriporteur, nous ne pouvons pas l’utiliser. La porte ne ferme pas, car nous sommes trop lourdes! Bravo!» s’est-elle exclamée sur la page Facebook intitulée Transport mésadapaté.

Lors de l’inauguration, en mai, l’ingénieur de l’arrondissement chargé du projet, Robert Bédard, avait pourtant précisé que la limite maximale avait finalement été programmée de telle sorte que les personnes en fauteuil roulant puissent avoir accès à ces toilettes. D’ailleurs, parmi les commentaires sous le message de Mme Cacciatore, une personne en fauteuil mentionne avoir utilisé sans problème l’autre toilette autonettoyante située au parc Émilie-Gamelin.

«En fait, les toilettes sont accessibles si l’on possède un fauteuil roulant manuel plus léger. Mais ça se complique beaucoup si l’on possède un fauteuil électrique, qui pèse souvent autour de 350 lb. Et si l’on est en surpoids, on dépasse alors avec son fauteuil les 500 livres ou 600 livres» a noté Linda Gauthier, la directrice générale du Regroupement des activistes pour l’inclusion au Québec (RAPLIQ), un organisme qui milite pour l’accessibilité universelle.

«C’est dommage, car ces toilettes ont coûté cher. Et, au centre-ville, il est très difficile d’en trouver qui soient accessibles», ajoute Mme Gauthier. Elle souligne que, «même si les toilettes autonettoyantes respectaient le Code du bâtiment, les normes sont inadaptées». Des membres du RAPLIQ en fauteuil électrique ont ainsi eu récemment des problèmes avec des plateformes élévatrices, installées pourtant selon les normes.

Afin de vérifier s’il ne s’agissait pas plutôt d’un problème technique ponctuel des toilettes, Métro a répété l’expérience avec le président du conseil d’administration du RAPLIQ, Laurent Morissette, qui utilise lui aussi un fauteuil électrique pour se déplacer. Il précise que, si on ajoute son poids à celui de son fauteuil, cela dépasse les 600 lb.

Le résultat a été le même qu’avec Mme Cacciatore: la porte a refusé de se fermer. Comble de l’ironie, un couple de parents et son poupon en poussette ont pu utiliser sans problème la toilette par la suite. «Si la porte ne ferme pas, c’est un peu plate», a réagi M. Morissette, qui note que l’administration municipale ne consulte que rarement le RAPLIQ et les autres organismes en amont de ses projets. «Espérons qu’ils pourront corriger cela rapidement», a-t-il ajouté.

Dans un échange de courriels, la Ville a indiqué qu’un «problème technique au niveau des capteurs a été identifié dans l’unité de la station de Papineau» et que la porte ne ferme pas quand le poids n’est pas uniformément réparti. «La Ville travaille activement à résoudre le problème», a précisé la relationniste de la Ville de Montréal, Gabrielle Fontaine-Giroux. Elle indique en outre que les trois toilettes municipales sont calibrées pour une charge maximale de 660 livres (300kg).

Informé de ce calibrage, Laurent Morissette le trouve trop bas, tandis que Linda Gauthier juge qu’il est «discriminatoire» et qu’il «porte atteinte à la dignité». Jessica Cacciatore s’interroge pour sa part sur l’utilité même d’une telle limite, elle qui est à quelques livres de la dépasser. Chez les adultes souffrant d’un handicap, la prévalence de l’obésité est plus élevée que chez ceux n’ayant aucun handicap (21,9% contre 16,7%), selon l’Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes. La plus grande difficulté à faire de l’exercice est notamment en cause.

Les toilettes autonettoyantes de la Ville ne sont pas les seules à poser problème. Martin Dion, un autre activiste du RAPLIQ qui a testé les toilettes soit-disant accessibles installées pendant les Francofolies et le Festival de jazz est formel. «Les toilettes portatives sont inaccessibles avec un fauteuil électrique, car la cabine n’est pas assez grande pour pivoter à l’intérieur, la cuvette est souvent trop basse et les portes sont trop lourdes à ouvrir», a-t-il rapporté.

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