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L’an 1 de Projet Montréal

Photo: Josie Desmarais

Lundi, cela fera un an que la chef de Projet Montréal, Valérie Plante, obtenait la faveur des Montréalais et délogeait du même coup le politicien de carrière Denis Coderre à la mairie de Montréal. Quel bilan dresser de la première année au pouvoir de son administration?
Métro a demandé l’avis des personnes et des organismes qui suivent de près les actions posées par son équipe.

Gouvernance

En campagne, Valérie Plante avait promis d’axer son mandat sur la transparence et l’ouverture. «Il n’y a pas eu d’apparence de contournement des règles en matière de lobbyisme et de prérogatives de l’administratif. Avec Denis Coderre, il en émergeait de temps à autre», analyse la professeure en gestion municipale à l’UQAM Danielle Pilette.

Une des réalisations de l’administration au chapitre de la transparence a été d’obliger des organismes sans but lucratif recevant des subventions à ouvrir leurs livres. Toutefois, seulement six organismes seront visés.

Si l’opposition a pu faire adopter 15 motions cette année, l’équipe de Valérie Plante a voté selon la ligne de parti à pratiquement chaque séance du conseil, une pratique que la mairesse déplorait pourtant auparavant. Par contre, celle-ci a recruté trois élus de l’opposition, soit Jean-François Parenteau, Marie-Josée Parent et Hadrien Parizeau.

«La mairesse avait dit que quitter Ensemble Montréal n’était pas une condition pour faire partie du comité exécutif. Des élus de notre parti ont été contactés et c’était une condition», relate le chef de l’opposition, Lionel Perez.

Si Projet Montréal est le parti le plus idéologiquement uniforme depuis l’époque de Jean Doré, la signature du groupe a tardé à s’installer dans l’appareil municipal.

«S’il y a une chose qui a été faite, c’est de laisser la place aux arrondissements. Sous M. Coderre­, il y avait toujours l’idée qu’il y aurait une réforme ou des fusions d’arrondissements.» – Danielle Pilette, professeure en gestion municipale à l’UQAM

«Les prises de position des élus ne se sont pas encore traduites par des actions de l’administration, notamment parce qu’on avait encore l’ancien directeur général, explique Mme Pilette. Avec la restructuration annoncée, le changement des priorités «commence à s’annoncer».
Dominique Cambron-Goulet

Mobilité

Valérie Plante s’était présentée comme la «mairesse de la mobilité» pendant la campagne. Au cours de la dernière année, elle a montré beaucoup de volonté à améliorer les déplacements dans la métropole, malgré les nombreux obstacles, souligne le professeur d’urbanisme de l’Université de Montréal Gérard Beaudet.

«Il y a une cohérence entre ce qui est dit et ce qui peut être fait, mais dans une conjoncture où le cœur de la région métropolitaine est dysfonctionnel à cause de cette multiplication de chantiers qui n’en finissent pas d’apparaître», dit-il.

Au cours de la dernière année, la mairesse a entre autres créé une escouade de la mobilité, commandé près de 300 bus pour la Société de transport de Montréal et mis sur pied un «bureau de la ligne rose» au coût de 1 M$. Elle doit désormais convaincre le nouveau gouvernement­ à Québec.

«Au mieux, [François Legault] a fait un compromis en disant “peut-être en surface”. La ligne rose est en oblique par rapport à la trame du réseau montréalais; c’est une contre-proposition complètement farfelue!» – Gérard Beaudet, professeur d’urbanisme de l’Université de Montréal, avertissant que le dossier «risque d’être difficile»

Gérard Beaudet fait valoir que, contrairement au maire Jean Drapeau, qui a lancé les travaux de construction du métro sans l’aide financière de Québec, l’administration de Valérie Plante, elle, ne peut s’en passer. Marie-Eve Shaffer

Environnement

L’administration Plante a déclaré vouloir rendre la ville carboneutre d’ici 2050 et être zéro déchet d’ici 2030. La mairesse a aussi renforcé la lutte contre l’agrile du frêne et a approuvé une motion de l’opposition pour bannir l’achat de bouteilles de plastique à la Ville.

Mais c’est l’acquisition de 18 hectares dans le secteur du bois Angell, l’agrandissement du parc de l’Anse-à-l’Orme et les plans pour protéger le golf d’Anjou qui retiennent l’attention de la Fondation David Suzuki. Celle-ci note toutefois, à l’échelle des 82 municipalités­ métropolitaines, «un affaiblissement du leadership de Montréal qui est pourtant nécessaire pour mener des transformations en transport, en aménagement et pour la protection des milieux naturels à l’échelle du Grand Montréal».

De son côté, Équiterre souligne l’interdiction de la circulation de transit sur le mont Royal durant l’été. «Cette décision a amené une réflexion plus large et nécessaire : comment on pense les accès et les déplacements pour les parcs, et les infrastructures souhaitées», mentionne, le directeur général, Sidney Ribaux.

Equiterre souhaite que l’administration se dote d’une feuille de route concrète pour l’électrification des transports, qu’ils soient collectifs ou privés. «Il reste beaucoup à faire dans le dossier des matières résiduelles», note Emmanuel Rondia, du CRE-Montréal, qui plaide pour l’installation rapide de stations doubles (poubelle et recyclage) sur le domaine public.

Le Conseil régional de l’environnement de Montréal trouve pour sa part positive la création d’un parc-nature qui remplacera la cour ferroviaire Turcot, tout en se connectant à la falaise Saint-Jacques. L’organisme salue aussi le retour de la dalle-parc. Mathias Marchal

«Ils étaient dans l’opposition pendant tellement d’années et ne s’attendaient pas à gagner. Maintenant qu’ils sont au pouvoir, ils pensent
pouvoir tout faire en un mandat.» – Lionel Perez, chef d’Ensemble Montréal

Économie

En un an, l’administration Plante aura produit huit plans d’action dans le cadre de la Stratégie de développement économique 2018-2022. Pas moins de 360 M$ ont été alloués au développement économique, soit 40 M$ de plus que sous l’administration précédente.

Pour le président de la Chambre de commerce du Montréal métropolitain, Michel Leblanc, cette première année de mandat aura été celle des «consultations». Il s’est dit très satisfait de ces démarches et de l’écoute de la Ville, mais il attend maintenant «l’an 2» et la mise en place concrète des mesures.

«Le défi sera l’accélération du passage à l’action. L’enjeu de l’an 2 sera que la Ville mette en œuvre des initiatives concrètes qui ressortent de ce qui avait été recommandé», avertit-il.

Valérie Plante avait aussi promis d’aider les entreprises d’économie sociale, notamment en créant un programme de subventions et en favorisant l’approvisionnement en biens et en services des institutions municipales auprès de ces entreprises.
«On sent beaucoup d’ouverture et une réelle volonté de collaborer avec le milieu de l’économie sociale», se réjouit la présidente du Conseil d’économie sociale de l’île de Montréal, Anyle Côté. Simon Mauvieux

Relations

«Cette administration a eu beaucoup de difficultés dans toutes les matières où on n’est pas dans les compétences municipales traditionnelles. On ne s’est pas enfargé dans le dossier des calèches comme Coderre, mais c’est le seul dossier où ça s’est bien passé», juge la professeure en gestion municipale, Danielle Pilette, nommant au passage le dossier des chiens dangereux et la présence du fleurdelisé à l’hôtel de ville.

«Peut-être que la première année, Valérie Plante a manqué de prudence. Récemment, à propos des signes religieux, elle a eu la prudence d’enterrer le débat», poursuit Mme Pilette.

La mairesse met d’ailleurs la pression sur les autres ordres de gouvernement afin de remplir ses promesses, souvent liées à des compétences provinciales ou fédérales.

«Elle peut bien s’entendre avec un gouvernement qui partage ses orientations. C’est facile de gouverner avec quelqu’un avec qui on est d’accord. Une vraie leader doit pouvoir travailler, peu importe le gouvernement à Québec. Des fois, il faut être plus ferme; d’autres fois, plus diplomate.» – Lionel Perez, chef d’Ensemble Montréal, qui voit la ligne rose comme une «confrontation» avec le gouvernement Legault

«Elle crée un bureau de la ligne rose pour forcer un peu la main et du gouvernement et de l’Autorité régionale de transports de Mont­réal. Faire des annonces, c’est un moyen de pression. La mairesse l’avait fait avant les élections et elle continue à le faire», souligne la professeure Pilette.

Elle juge que l’élection de la Coalition avenir Québec «diminue les attentes» envers Projet Montréal. «N’ayant pas de ministre autre que Chantal Rouleau, l’île de Montréal ne peut pas s’attendre à des miracles. On pourra, en fin de mandat, dire que le contexte politique a changé. Des prétextes pourront être invoqués», analyse Mme Pilette. Dominique Cambron-Goulet

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