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Montréal a le gène de la magouille

Photo: Centre d’histoire de Montréal.

La toute nouvelle exposition du Centre d’histoire de Montréal, qui débute vendredi nous plonge dans l’univers immoral des années 1940. Une époque pas si lointaine, au vu des scandales actuels.

En marchant 15 minutes dans le centre-ville des années 1940, on croisait une centaine de bordels et environ 250 salons de jeu et de paris clandestins. Ces chiffres étonnants, la muséologue Catherine Charlebois les a obtenus en parcourant des milliers de pages d’archives pendant les deux années nécessaires au montage de cette exposition intitulée «Scandale! – Vice, crime et moralité à Montréal, 1940-1960».

La carte des bordels montréalais a été faite par l’armée canadienne, soucieuse de déceler les foyers de maladies vénériennes qui auraient affecté près de 4000 soldats en partance ou de retour du front, en Europe.

Celle des tripots clandestins a été instituée dans le cadre de l’enquête Caron qui, de 1950 à 1953, a mené à l’audition de 373 témoins, a éclaboussé deux chefs de police et a mené à la fin de la carrière politique du chef du comité exécutif, J.-Omer Asselin, le Frank Zampino de l’époque. Quand on dit que l’Histoire se répète, Scandale! en est la parfaite démonstration.

«Des policiers et des politiciens de haut niveau fermaient les yeux, mais il y avait beaucoup de raisons pour ne pas changer, notamment à cause de la manne touristique et le fait que les bordels offraient des endroits pour que les hommes puissent se libérer», explique la muséologue Catherine Charlebois.

Montréal profitait à l’époque de la prohibition de l’alcool aux États-Unis et des restrictions liées aux paris, qui lui amenaient beaucoup de touristes du Sud. Les Cotroni et autres mafiosos notoires vivaient leurs heures de gloire… jusqu’à ce que des citoyens exaspérés, menés par les avocats Pax Plante et un certain Jean Drapeau, décident que la récréation avait assez duré et finissent par obtenir du gouvernement la mise en place de l’enquête Caron.

Pour donner l’impression de vivre au temps de «la ville des plaisirs», l’exposition Scandale! mène le visiteur à travers différentes salles où se mêlent accessoires d’époque, témoignages inédits (Gilles Latulippe, Francine Grimaldi,  Jean-Pierre Charbonneau) et éléments historiques aux vertus immersives. Mentions pour la salle de cabaret, le tripot clandestin et la chambre de bordel, où les visiteurs devraient être désarçonnés.

En ces temps de commission Charbonneau, la visite de l’exposition est une occasion de réfléchir au manque de mémoire collective qui fait que l’Histoire a tendance à bégayer. «Il y a deux ans, quand on a décidé de monter cette exposition, la commission Charbonneau n’avait pas encore été instituée. Mais on sentait que c’était dans l’air du temps», explique Jean-François Leclerc, directeur du Centre d’histoire de Montréal. On a presque hâte de voir ce qu’on dira de notre époque dans l’exposition de 2073!

Où et quand?
L’exposition débute vendredi au Centre d’histoire de Montréal.
Elle se tiendra pendant deux ans.

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