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«Les usagers ont raison d’être exigeants», croit Philippe Schnobb

Photo: Yves Provencher/Métro

Quatre mois après son arrivée, le président de la Société de transport de Montréal (STM), Philippe Schnobb, a-t-il confondu les sceptiques? Pour l’heure, l’ex-journaliste, qui revient sur son entrée en poste mouvementée, s’atelle à trouver de nouvelles sources de revenus, dans une année où «les défis financiers sont importants».

On entend et lit beaucoup de plaintes sur le service. Pourtant, quand on observe les statistiques sur la fiabilité, on se rend compte que la STM est première de classe. Les usagers ont-ils raison de se plaindre?
Les usagers ont raison d’être exigeants. Mais on aura beau répéter que le métro roule 99% du temps et que, quand on se compare aux autres métros du monde, on a un bilan remarquable, les gens restent sceptiques et ont l’impression que le métro est toujours en panne… Maintenant, il faut voir qui pense ça: ceux qui prennent le métro ou ceux qui ne le prennent jamais? C’est sûr que si je ne prends jamais le métro et que les seules fois où j’en entends parler, c’est quand mes collègues arrivent en retard à cause d’une panne, je vais garder cette impression. Il faut travailler sur cette perception parce que ce sont les gens qui ne prennent pas le métro qu’on veut attirer.

Québec souhaite une augmentation du service de 30% dans le transport en commun d’ici 2020. Avec les ressources dont vous disposez actuellement, n’est-ce pas utopiste?
Nous sommes bien d’accord avec cet objectif. Maintenant, il faut voir comment on y arrive. Si on veut augmenter l’offre de 30%, ça prend évidemment des sous supplémentaires. C’est encore en chantier et on devrait faire un bon pas en 2014, après les élections. Si on veut augmenter l’achalandage d’ici 2020, ça prend des investissements qui vont nous permettre d’agir rapidement. Le prolongement du métro, c’est bien, mais ça ne sera pas prêt pour 2020.

Les Québécois ont récemment indiqué être en faveur d’investissements supplémentaires dans le transport en commun. Sur quoi allez-vous mener vos batailles pour obtenir plus d’argent?
Nous avons commencé à démontrer que la STM, avec ses investissements et ses achats, fait profiter toute la province. Notre impact économique dépasse la région métropolitaine. La STM, comme le transport collectif en général, permet à des régions de vivre, à des gens d’avoir du travail. C’est ainsi que le gouvernement pourra convaincre les régions que c’est profitable d’investir dans le transport en commun.

Vous devez vous battre contre l’opinion publique qui voit peut-être d’un meilleur œil d’investir dans les routes plutôt que dans les tunnels de métro…
J’ai du mal avec l’équation que certains font et qui dit: «Vous enlevez de l’argent à NOS routes pour en mettre dans le transport collectif.» Comme si ce n’était pas LEURS transports collectifs. Les besoins sont là, d’un côté comme de l’autre. Pour le moment, nos besoins nous commandent de maintenir la fiabilité et non de créer de nouveaux services. Nous voulons créer de nouveaux services et nous allons le faire, mais avec des moyens restreints.

En début d’année, vous avez dû procéder à une faible baisse de service pour des raisons budgétaires. Y a-t-il moyen d’être créatif pour maintenir l’offre de service et freiner l’augmentation des tarifs?
Dans un monde idéal, nous aurions amélioré le service, mais à cause du contexte budgétaire, nous avons dû procéder à cette optimisation. Nous souhaitons arriver à trouver de nouvelles sources de revenus pour ne plus que ça arrive. Il y a certainement moyen d’être plus créatif. Une chose qui va nous aider avec nos clients, c’est iBUS. Grâce à la géolocalisation, nous pourrons voir la flotte d’autobus en temps réel. Nous pourrons mieux planifier les déplacements. Ça va s’implanter d’ici la fin de l’année pour être pleinement fonctionnel en 2015. Une autre façon de travailler avec des moyens restreints, c’est l’ajout de voies réservées. Nous nous sommes engagés à atteindre 375km de mesures préférentielles (voies réservées, feux chandelles et feux synchronisés) d’ici 2017.

Vous dépendez de l’électricité à cause du métro et ça deviendra encore davantage le cas avec l’électrification de la flotte d’autobus. Cette consommation d’électricité a un coût. Avons-nous les moyens de nos ambitions?
D’abord, tous les partis en campagne se sont engagés à nous laisser le tarif L pour le métro [NDLR: un tarif préférentiel attribué aux clients industriels énergivores d’Hydro-Québec]. Ça nous permettra d’économiser quelque 400 000$ en 2014 et 1M$ pour les années à venir. Le choix de l’électrification des transports est d’abord environnemental. Et nous souhaitons favoriser une énergie québécoise. Le diesel ne compte que pour 10% de la facture d’un autobus. L’électrifier ne nous permet donc pas de jouer sur une partie importante des coûts. Ce n’est pas une décision que nous prenons pour économiser, mais pour soutenir le développement de cette technologie. Avons-nous les moyens de nos ambitions? Nous avons choisi de les prendre.

Votre entrée en poste n’a pas été de tout repos. On a remis vos compétences en question et on vous a décrit comme l’homme de Coderre plutôt que l’homme de la STM. Avez-vous été blessé?
Les gens croyaient que j’allais prendre toutes les décisions. Je m’amuse à dire que je ne suis que le président de la STM! C’est un poste important, mais il y a toute une équipe derrière. Les gens ont décrié le fait que c’était une nomination politique. Je suis bien triste de les décevoir, mais oui, c’est un poste politique. C’est normal que le président de la STM puisse communiquer avec l’administration en poste. Est-ce que ça m’a blessé? Oui. Il s’est dit tellement de choses et ce n’était pas toujours gentil. Mais je savais que j’étais capable de le faire et de bien le faire.

À surveiller en 2014

«Nous avons des défis financiers importants, mais plein de projets intéressants vont arriver d’ici la fin de l’année», indique Philippe Schnobb. Petit tour d’horizon.

  • Voie réservée vélo-bus. Sur Viau, dès l’arrivée du beau temps, un projet-pilote permettra aux cyclistes de rouler sur les voies réservées. «Nous verrons par la suite comment les cyclistes et les chauffeurs se sont sentis pour tenter d’implanter l’idée ailleurs.»
  • Réseau cellulaire. Les quatre fournisseurs font encore des tests avant de rendre disponible, d’ici la fin de l’année, le réseau sans fil entre les stations Mont-Royal ainsi que Bonaventure, Beaudry et Atwater.
  • Azur. Le premier train Azur devrait arriver sur les rails d’ici décembre.
  • Recharge à distance. Après le projet-pilote en cours, les prises USB pour la recharge à distance des cartes OPUS devraient être en vente d’ici la fin de l’année.
  • BIXI. Est-ce que la STM pourrait prendre BIXI sous son aile? Le nouvel OBNL étudiera les différentes voies à adopter pour 2015. «Ça reste à voir. Il y a probablement plus d’arguments favorables que défavorables de notre côté.»

Tarif social
La STM n’a pas les moyens d’offrir le tarif social aux usagers. La gratuité pour les aînés coûterait par exemple 35M$ par année. Toutefois, l’Association du transport urbain du Québec (ATUQ), présidée par M. Schnobb, est à définir une orientation pour toute la province à ce sujet et fera ses recommandations à Québec. Cela pourrait devenir une mesure sociale provinciale sous la responsabilité du gouvernement.

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