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Manon Massé: «L’Assemblée nationale, c’est un show guerrier»

Photo: Archives | Denis Beaumont/Métro

Depuis un an, la députée solidaire Manon Massé partage son temps entre l’Assemblée nationale et ses citoyens de Sainte-Marie–Saint-Jacques. Si elle ne regrette pas de s’être entêtée et d’avoir tenté sa chance à cinq reprises avant d’être finalement élue, elle déplore la politique spectacle qui caractérise désormais son quotidien.

«Quand les gens disent qu’ils sont désabusés de la politique et qu’ils n’y croient plus, honnêtement, je peux les comprendre, a-t-elle avoué. J’ai travaillé en éducation populaire à politiser les gens et à faire en sorte que les nouveaux arrivants et les analphabètes reprennent du pouvoir sur leur vie, mais aussi sur la vie collective, et je me retrouve aujourd’hui dans une assemblée où la politique spectacle règne. Je trouve cela fort désolant. En même temps, je ne baisse pas les bras.»

Manon Massé a accueilli Métro dans son bureau de circonscription tout juste avant le long congé pascal, au cours duquel elle comptait «se retirer dans le bois» pour réfléchir à la dernière année. Celle-ci a été riche en apprentissages pour la députée féministe et ouvertement lesbienne qui était auparavant une organisatrice communautaire.

Pendant les premiers mois de sa nouvelle vie de parlementaire, elle a eu du mal à croire qu’elle était bel et bien devenue la députée de Sainte-Marie–Saint-Jacques. La militante de toujours à la longue chevelure blanche et aux yeux bleus perçants a depuis gagné en assurance. Si elle adore discuter des enjeux politiques avec ses collègues et ses concitoyens, elle aime moins assister à la période de questions à l’Assemblée nationale, qui s’apparente trop souvent à un combat plus qu’à un débat.

«C’est un show guerrier, a-t-elle dit. Plus tu cries, plus tu pointes du doigt, plus tu fronces les sourcils, et plus les collègues applaudissent. C’est une lutte à finir entre l’opposition et le gouvernement. Le but, ce n’est pas de travailler ensemble.»

Loin des caméras, les députés parviennent à collaborer, a-t-elle remarqué. Au Cercle des femmes, notamment, les députées de tous les partis peuvent discuter ouvertement de la dérive des débats ou même de la politique sur le harcèlement sur laquelle plusieurs d’entre elles travaillent. C’est sur cette politique que Manon Massé fonde de l’espoir pour améliorer les débats entre les parlementaires.

Le mode de scrutin aurait aussi avantage à être changé, d’après la cofondatrice de Québec solidaire. Elle croit que l’actuel mode uninominal majoritaire entraîne des injustices qui teintent le système politique québécois. Un mode proportionnel serait plus à propos, selon elle.

«Ce gouvernement fait ce qu’il veut, en se crissant du monde qui est dans la rue et même en s’assurant qu’il va se taire en laissant la police se lancer sur lui alors qu’il n’a eu que 43% des votes aux dernières élections» – Manon Massé, députée de Québec Solidaire

Le rythme de vie sur la colline parlementaire est très rapide. Les travaux parlementaires, les réunions et les conférences de presse se succèdent à un rythme effréné. «Je prends une respiration en rentrant [à l’Assemblée nationale] et j’expire en sortant le soir tellement ça va vite», a lancé la députée solidaire.

Lorsqu’elle est de retour à Montréal, elle retrouve ses pantoufles auprès des concitoyens de sa circonscription. Loin d’être inactive, elle participe aux événements de sa circonscription et ne manque pas une occasion de discuter avec ses citoyens.

«Le travail, dans mon comté, c’est la continuité du travail que je fais depuis toujours, a-t-elle expliqué. C’est d’être à la défense des citoyens. C’est de porter avec des citoyens, qu’ils soient corporatifs ou particuliers, des projets.»

Elle entend d’ailleurs organiser des rencontres citoyennes à partir du mois de mai, à son bureau de circonscription, pour expliquer tout ce qui entoure les travaux à l’Assemblée nationale, les décisions du gouvernement et les interventions de Québec solidaire.

Même si la vie de parlementaire a ses avantages mais aussi ses inconvénients, Manon Massé entend être candidate aux prochaines élections provinciales. Parce qu’elle croit aux chances de Québec Solidaire de s’emparer du pouvoir et de faire les changements nécessaires.

Questions en rafale

Le bon coup du gouvernement? Le registre des armes à feu. J’ai envie de croire qu’il va aller jusqu’au bout.

La pire gaffe du gouvernement? [Elle hésite longuement.] Son mépris pour la population, que ce soit les employés de l’État ou les étudiants. Il dit que les coupes n’auront pas d’impact sur eux, mais dans les faits, ce n’est pas le cas.

Une ministre qui vous a étonnée? Hélène David, la ministre de la Culture. Elle m’impressionne. En pleine période d’austérité, elle a fait trois projets d’investissement majeurs (la maison-théâtre Le Cube, les Sept doigts de la main et l’esplanade de la Place des Arts) dans ma circonscription.

Un ministre qui vous a déçue? François Blais, le ministre de l’Éducation. Quand il était dans la vie civile, il défendait le revenu minimum garanti. Il se retrouve dans un gouvernement et il n’a aucune honte de faire une attaque de front contre les personnes assistées sociales. Et en éducation, il attaque de front les étudiants. Je suis choquée.

Décrivez le premier ministre, Philippe Couillard? Il est au-dessus de ses affaires, il louvoie les gens et il parle des deux côtés de la bouche.

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