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Mes 450 nuits de sans-abri

Guy Thibault, camelot et bénévole à L’Itinéraire. Photo: Mario Alberto Reyes Zamora/photographe à L’Itinéraire

Afin de souligner la Nuit des sans-abri, Métro fait don de cet espace à L’Itinéraire, un magazine qui vient en aide aux personnes vivant des difficultés liées à l’itinérance.

Mon nom est Guy Thibault. Je suis camelot et bénévole à L’Itinéraire. Avant cela, j’étais sans-abri.

À l’âge de 50 ans, je me suis réveillé dans la rue, après avoir travaillé manuellement pendant plusieurs années. J’étais très travaillant, et mon emploi était une de mes priorités. Mais un paquet de facteurs m’ont amené à me retrouver à la rue : le stress, la cocaïne, une faible estime de moi et une dépression majeure.

Au début du premier mois, je pensais que c’était temporaire. Je pensais qu’à l’arrivée de mon chèque, je pourrais me louer une chambre. Mais ma pauvreté était tellement présente que mes priorités devenaient la bouffe, le café, les dépenses courantes… J’avais aussi des dettes à payer et je n’avais plus d’argent pour me payer un loyer. J’ai réalisé que j’étais devenu un itinérant. La nuit venue, quand je sentais le besoin de dormir, la solitude, l’anxiété et la peur de me faire attaquer m’envahissaient. Le jugement des autres était aussi très difficile à vivre. Pendant 15 mois, environ 450 dodos, je n’ai pas eu de plafond au-dessus de ma tête. C’était ça, ma réalité.

En juin 2013, je suis allé demander de l’aide au Café L’Itinéraire. J’avais faim, j’y ai mangé un bon lunch, j’ai socialisé avec les camelots et les intervenants et j’ai senti que j’avais trouvé un endroit où je me sentirais moins seul, où je serais compris et accepté. C’est comme ça que je suis devenu camelot. Ça prenait de l’humilité pour vendre le journal, pour m’approcher des gens et leur parler de ma réalité.

Aujourd’hui, ça fait plus d’un an que j’ai mon toit. J’ai réussi à régler ma dépression et ma dépendance à la cocaïne. L’Itinéraire m’a grandement appuyé dans ma réinsertion. Je suis toujours suivi au Centre de réadaptation en dépendance de Montréal (CRDM), qui m’a aussi beaucoup aidé. Je suis allé vers les ressources, et ça a payé.

La Nuit des sans-abri est très importante à mes yeux. Elle contribue à éveiller les gens à l’urgence d’agir. Les itinérants sont des êtres humains de tous âges et de tous profils. Avec le taux de chômage et le coût de la vie qui ne cessent de grimper, ils pourraient être de plus en plus nombreux.

Donc de grâce, mobilisons-nous pour que nous, les Québécois, ayons une meilleure qualité de vie. Mettons nos préjugés de côté! C’est capital.

Nuit des sans abri 101
Trois choses à faire durant la Nuit des sans-abri, qui se tient sur la place Émilie-Gamelin jusqu’à dimanche.
• Discuter. L’activité Le temps d’une soupe permet d’avoir une discussion avec un intervenant ou un sans-abri sur différentes réalités associées à l’itinérance.
• Agir. Vendredi à 18 h, une marche dans le quartier permettra de sensibiliser les gens à l’importance d’un centre d’injection supervisée.
• Écouter. Pierre Gaudreau, un des porte-parole, demandera, à trois jours des élections, que le fédéral revienne à une approche globale en itinérance.

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