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Les droits de six enfants lésés à Ste-Justine

Photo: Archives Métro

MONTRÉAL – Les droits de six enfants ont été lésés lorsque leurs parents ont été soupçonnés de maltraitance à la clinique sociojuridique du Centre hospitalier Sainte-Justine, à Montréal.

Dans un rapport rendu public mardi, la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse revient sur 13 plaintes déposées par des parents qui soutiennent avoir été accusés à tort d’avoir infligé des blessures à leur enfant. Certains de ces cas avaient été médiatisés en 2013.

Trois médecins de Sainte-Justine — qui ne sont pas nommés — sont montrés du doigt par la Commission, qui a analysé les dossiers sous l’angle de la protection des droits des enfants.

Selon le vice-président de l’organisme, Camil Picard, ces médecins ont «outrepassé» leur mandat en amorçant eux-mêmes les enquêtes qui relèvent du Directeur de la protection de la jeunesse (DPJ).

Dans la moitié des cas, la Commission déplore que les six DPJ impliqués se soient uniquement fiés aux informations transmises par la clinique sociojuridique, sans mener leurs propres enquêtes.

«À ce moment-là, le parent était automatiquement considéré comme fautif face à la blessure de son enfant», souligne M. Picard lors d’un entretien téléphonique. Le fardeau de démontrer qu’il n’y avait pas eu de maltraitance incombait alors aux parents.

Une situation qu’a connue la chanteuse Catherine Major et son conjoint, qui ont été soupçonnés en 2013 d’avoir secoué leur fille d’un mois et demi.

«On nous a accusés sans laisser la porte ouverte à la possibilité que ce soit faux», s’indigne-t-elle en entrevue.

Pendant son séjour à l’hôpital, la fille de Catherine Major — qui a notamment eu deux côtes fracturées après avoir chuté d’une table — a subi une batterie de tests dont l’objectif avoué était de démontrer qu’il y avait eu maltraitance.

«Je la voyais hurler, pleurer parce qu’on essayait de lui rentrer des cathéters dans les veines inutilement. On l’attachait à une table pour faire des radiographies osseuses à outrance», se remémore Mme Major qui parle encore aujourd’hui d’un «souvenir épouvantable».

Elle a d’ailleurs calculé que sa fille a déjà reçu le maximum de radiation recommandée pour toute une vie.

«On ne nous a pas laissé le choix, se rappelle l’auteure-compositrice-interprète. On nous a dit que si on refusait, on allait compliquer les choses et on risquait de se faire enlever notre enfant.»

Des propos qui ne respectent pas le code d’éthique de l’hôpital, tranche la Commission dans son rapport.

Le document souligne d’ailleurs que dans tous les cas étudiés, les parents ont perçu une forme d’irrespect et d’impolitesse de la part du personnel hospitalier. Des perceptions qui ont été confirmées par des témoignages recueillis auprès des employés de l’établissement.

M. Picard souligne même que dans trois cas, les parents n’ont pas été mis au courant qu’un signalement allait être fait au DPJ. «Une batterie de tests ont été faits sans nécessairement informer les parents sur les causes de ces examens, indique-t-il. Ou si le parent contestait un examen, il y avait un mécontentement (de la part du médecin).»

Malgré ces manquements, la Commission mentionne que les signalements effectués auprès du DPJ étaient tout à fait justifiés en vertu de la Loi sur la protection de la jeunesse. «Dans les 13 cas, il y avait des blessures réelles et des soupçons de maltraitance», explique M. Picard.

Plusieurs des dossiers épluchés par la Commission ont d’ailleurs démontré que les droits des enfants n’avaient pas été bafoués et qu’il y avait effectivement eu maltraitance.

Dans son rapport, la Commission émet plusieurs recommandations pour éviter que des violations des droits des enfants ne surviennent à nouveau. Elle demande notamment à Sainte-Justine de mettre fin à la confusion des rôles en définissant plus clairement les mandats et les rôles des professionnels de la clinique sociojuridique.

«Ils ont la responsabilité de faire rapidement le signalement et ensuite de laisser le DPJ faire son travail», spécifie M. Picard.

La Commission demande également à l’hôpital d’améliorer la communication avec les parents et rappelle au DPJ qu’il est de sa responsabilité exclusive d’évaluer les signalements.

Par communiqué, la direction de Sainte-Justine affirme avoir pris acte et accueilli positivement les conclusions émises par la Commission, et souligne que des mesures avaient déjà été prises avant la publication du rapport afin d’améliorer et de clarifier les rôles et responsabilités des différents membres de la clinique sociojuridique.

La direction de Sainte-Justine s’est engagée à poursuivre ces actions et à faire un suivi rigoureux pour chacune des recommandations émises par la Commission afin d’améliorer ses façons de faire.

Un suivi quant à l’application de ces recommandations sera d’ailleurs effectué au mois de mai.

D’ici là, Catherine Major espère que les plaintes qu’elle a également déposées auprès du Collège des médecins et de l’hôpital Sainte-Justine verront leur aboutissement.

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