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Le SPVM veut prévenir la maltraitance envers les aînés

MONTRÉAL – Le Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) met en place un nouveau programme pour former ses policiers en vue de lutter contre la maltraitance envers les aînés et il espère partager les résultats de son expérience à d’autres corps policiers au Canada.

En date du 5 mai, tous les policiers montréalais de première ligne seront formés afin d’identifier et d’effectuer le suivi sur des signes de maltraitance à l’égard des aînés, même dans des affaires non criminelles.

Le modèle d’intervention a été développé au cours des trois dernières années par le service de police montréalais et la Chaire de recherche sur la maltraitance envers les personnes aînées de l’Université de Sherbrooke, qui a reçu une bourse du gouvernement fédéral pour étudier cette question, en 2013.

Contrairement au protocole auparavant en vigueur, les policiers qui repèrent des signes de maltraitance doivent prendre à l’écart les aînés pour les questionner cordialement, et ensuite rédiger un rapport même lorsqu’aucun geste criminel n’a été posé. Chaque dossier fait ensuite l’objet d’une enquête des agents sociocommunautaires, ou bien il est référé aux services communautaires ou sociaux.

Au lieu de former une petite unité de policiers spécialisés sur la maltraitance envers les aînés — ce que plusieurs corps policiers font — ce programme prône une approche globale, dans laquelle tous les agents et les répondants bénéficient de séances de formation, de guides pour les interventions et d’outils de référence qui incluent une liste de ressources communautaires.

Le modèle a déjà été implanté dans quelques-uns des postes de police de la métropole, l’année dernière, comme projet pilote.

Selon Miguel Alston, le policier montréalais responsable du projet, le programme a déjà mené à une augmentation des signalements de maltraitance.

Par exemple, un policier a récemment décidé d’ouvrir une enquête après avoir senti que «quelque chose n’était pas tout à fait correct» lorsqu’il a vu une jeune femme avec un vieillard à un guichet automatique.

Dans un autre cas, un agent qui avait dû maîtriser un suspect dans une autre affaire s’est posé des questions quand il a découvert que l’individu se promenait avec la carte de crédit de sa mère.

Ces deux situations se sont avérées comme étant des cas d’exploitation, a mentionné M. Alston.

Les policiers étaient surpris à première vue d’avoir à effectuer des interrogatoires et à rédiger des rapports même dans des affaires non criminelles, mais ils se sont ravisés lorsqu’ils ont découvert l’ampleur du problème, selon Miguel Alston.

«On permet d’éveiller les policiers à la maltraitance pour détecter les situations. On ne prend pas en charge tous les cas de maltraitance, mais on va s’assurer que s’il y a de la maltraitance, qu’il y ait un suivi par les personnes-ressources ou les organismes communautaires, ou le système de santé donc les CIUSSS (Centres intégrés universitaires de santé et de services sociaux)», a expliqué M. Alston.

Les policiers travaillent maintenant sur un manuel de formation qui pourra être remis aux autres corps policiers canadiens, dont 46 organisations qui ont déjà été contactées pendant l’étape de la recherche.

Divers services de police joints par La Presse Canadienne abordent le problème de la maltraitance des personnes âgées différemment.

À Winnipeg, chaque affaire est traitée par une «unité de personnes vulnérables» composée d’un superviseur, d’un agent avec une expérience en travail social, ainsi que d’un travailleur social de la ville, a précisé le sergent-détective Nathan Kocis.

D’autres services policiers ont des équipes spécialisées dans lesquelles une poignée de policiers sont formés pour faire le suivi sur des dossiers, souvent en complément avec les services sociaux et de santé.

La municipalité de Lethbridge, en Alberta, a développé un réseau d’intervention avec des policiers et plusieurs autres organisations — dont les banques — qui s’entraident pour enquêter et gérer les dossiers.

«Comme vous le savez, les abus auprès des aînés sont très complexes et ils peuvent nécessiter un travail entre plusieurs organisations pour y mettre fin et régler le problème», a expliqué le porte-parole du service de police, Les Vonkeman, dans un courriel.

Marie Beaulieu, qui dirige la Chaire de recherche liée au projet, estime que les policiers sont dans une position unique pour détecter de telles situations étant donné que, contrairement aux services sociaux ou de santé, ils entrent fréquemment dans les résidences pour répondre à des appels.

«Souvent, ces gens ne sont pas nécessairement connus par les autres services (sociaux). (Les policiers) peuvent vraiment entrer en contact avec les aînés», a-t-elle souligné.

Mme Beaulieu a indiqué que les personnes âgées subissant de la maltraitance pouvaient être réticentes à déposer des accusations parce qu’il arrive souvent que la personne responsable est un membre de la famille ou parce qu’elles éprouvent de la honte à dénoncer — ou une crainte de perdre leur autonomie.

Dix-huit mois de recherche sur la maltraitance des aînés au pays ont précédé le lancement du projet. Mme Beaulieu s’est dite surprise par le manque de structures formelles en place.

«Nous pensions que nous trouverions beaucoup de matériel, mais il n’y a pas eu beaucoup de publications concernant les programmes policiers sur l’abus envers les aînés», a-t-elle soutenu.

Mme Beaulieu croit que ce modèle pourrait être utilisé auprès d’autres populations vulnérables, dont les itinérants ou les patients souffrant de maladies mentales.

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