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«Valeurs anticanadiennes»: Bernier critique l'idée

Eduardo Lima / La Presse Canadienne Photo: Eduardo Lima / La Presse Canadienne
Mélanie Marquis, La Presse canadienne - La Presse Canadienne

OTTAWA — La meilleure façon de promouvoir et défendre les «valeurs canadiennes» n’est pas de dépister en amont les immigrants ou réfugiés qui ne les partageraient pas, mais bien de leur offrir davantage d’opportunités et de liberté économiques, croit Maxime Bernier.

Le député de Beauce s’est montré défavorable à la suggestion formulée par son adversaire Kellie Leitch, qui souhaiterait imposer aux candidats à l’immigration un test de valeurs afin de bloquer l’accès à ceux qui seraient animés par des «valeurs anticanadiennes».

Si, en forçant les candidats à l’immigration à se soumettre à un tel test, la candidate torontoise cherche à barrer la route aux djihadistes, sa démarche est inadéquate et vouée à l’échec, a analysé mardi Maxime Bernier.

«Le problème de l’islam radical ne concerne pas seulement les immigrants, mais aussi les gens qui sont nés dans ce pays», a soutenu M. Bernier en conférence de presse à Ottawa.

«La question du terrorisme ne peut être résolue avec un questionnaire, ça doit être fait avec plus de ressources pour nos agences de sécurité et pour s’assurer de faire une évaluation adéquate des candidats», a-t-il ajouté.

Le député est d’avis qu’il existe en effet des «valeurs canadiennes», comme l’égalité hommes-femmes et la tolérance, entre autres. Mais ce n’est pas en instaurant un questionnaire obligatoire qu’on assurera la protection de ces valeurs, a-t-il insisté.

«Moi, je crois que ce qu’il faut faire, c’est de s’assurer qu’au Canada, on ait plus de liberté et plus de prospérité, ça va donner plus d’opportunités à ces gens-là de bien s’intégrer dans la société canadienne», a fait valoir M. Bernier.

Les candidats à la direction du Parti conservateur devront vraisemblablement vivre avec ce débat, Mme Leitch ayant prévenu vendredi dernier que les Canadiens devaient se préparer à l’entendre discuter «plus, et non moins» à ce sujet au cours des prochains mois.

Maxime Bernier a été le premier à y goûter, mardi après-midi. La conférence de presse qu’il avait organisée à Ottawa — qui devait porter sur le sirop d’érable — a été quasi entièrement monopolisée par les questions sur cette proposition controversée.

«C’est son choix à elle. J’imagine qu’elle veut faire ce débat-là avec les autres candidats; moi, je suis prêt aussi à en parler. Il n’y a pas de sujet tabou au sein du Parti conservateur du Canada. Faisons le débat, et les membres choisiront», a-t-il affirmé.

Le député n’a pas voulu dire si un débat sur cette question sensible pourrait déchirer la formation politique. Il a essentiellement pris acte que Kellie Leitch l’avait lancé, sans s’avancer sur les impacts que cela pourrait avoir.

«Mme Leitch ouvre un débat, un débat qu’elle souhaite faire. Quelles seront les conséquences de cela? Le temps nous le dira», s’est contenté d’offrir M. Bernier.

La suggestion de la député et ancienne ministre a été descendue en flammes par un autre candidat à la direction du Parti conservateur, Michael Chong. La chef intérimaire de la formation politique, Rona Ambrose, s’est également prononcée contre dimanche dernier en entrevue au réseau CTV.

Un autre député conservateur qui s’apprête à se lancer officiellement dans la course, le Saskatchewanais Brad Trost, s’est montré sans pitié envers Kellie Leitch et cette idée de filtrage «ridicule».

«La première chose qui m’est venue à l’esprit, c’est que Kellie n’avait pas réfléchi à son affaire, qu’elle imaginait des choses au fur et à mesure — ce qui n’est pas une bonne façon d’élaborer des politiques», a-t-il dit en entrevue téléphonique avec La Presse canadienne.

«Quand ses propositions auront un peu plus de substance, on pourra en reparler», a-t-il laissé tomber.

Le candidat Deepak Obhrai est aussi en désaccord avec la suggestion de Mme Leitch, mais il l’a exprimé de façon moins incisive que son collègue.

«Ça envoie le mauvais message. Ce sera perçu comme un message anti-immigrant, pas comme un message positif», a expliqué en entrevue celui qui est devenu mardi le cinquième candidat officiel dans la course au leadership conservatrice.

«De plus, il n’existe pas une définition de ce qui constitue une valeur canadienne. Nous sommes très bien protégés par la Charte canadienne des droits et libertés. La plupart des gens qui arrivent dans ce pays en sont très conscients», a ajouté M. Obhrai.

Un parallèle a été établi entre la démarche de Kellie Leitch et une proposition controversée qui a nui aux conservateurs lors de la dernière campagne électorale, en 2015: l’instauration d’une ligne téléphonique de délation pour signaler de présumées «pratiques culturelles barbares».

Après la défaite électorale, Mme Ambrose s’en était rapidement dissociée. Ce fut ensuite au tour de Mme Leitch: en entrevue à la CBC, en avril dernier, la députée ontarienne avait dit regretter cette initiative, les larmes aux yeux.

Mais il semble qu’elle ait de nouveau changé son fusil d’épaule.

«Je pense qu’il est important de proposer que les immigrants n’aient pas de valeurs anticanadiennes comme l’intolérance envers les autres religions, cultures et orientations sexuelles, les comportements violents ou sexistes, et un manque de respect pour notre tradition canadienne des libertés personnelles et économiques», a-t-elle déclaré dans un communiqué vendredi dernier.

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