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Travail au Québec: discrimination des immigrants

Portrait of pedestrian in city Photo: Getty Images/iStockphoto
Pierre Saint-Arnaud, La Presse canadienne - La Presse Canadienne

MONTRÉAL — Les nouveaux arrivants font l’objet de discrimination sur le marché du travail et cette situation est pire au Québec qu’ailleurs au Canada, selon la note que l’Institut de recherche et d’informations socioéconomiques (IRIS) publie mardi.

«Il y a des biais discriminatoires à l’embauche et, quand on compare la situation des immigrants au Québec et dans les autres provinces canadiennes, on remarque que c’est ici que leur situation est la plus difficile», souligne l’auteure de la recherche, Julia Posca, en entrevue avec La Presse canadienne.

Les données de Statistique Canada sont en effet assez claires: de 2006 à 2015, le taux d’emploi au Québec s’élevait à un peu plus de 83 pour cent en moyenne pour les personnes de 25 à 54 ans nées au Canada, contre un taux de près de 72 pour cent seulement pour les immigrants reçus.

Les chiffres de l’agence fédérale pour 2011 pour les mêmes catégories d’âge montrent que toutes les autres provinces ont des taux d’emploi d’immigrants dépassant les 75 pour cent, le Manitoba et l’Alberta allant même jusqu’à près de 83 pour cent.

«Ce n’est peut-être pas conscient de la part des employeurs, mais plusieurs études montrent que deux CV identiques, l’un au nom de famille Tremblay et l’autre au nom de famille Trahoré ou Bensahid n’auront pas les mêmes chances d’être convoqués en entrevue et c’est pire au Québec qu’en Ontario», ajoute Mme Posca.

La chercheuse appelle toutefois à la nuance, puisqu’une bonne partie de l’écart s’explique aussi par le fait que c’est au Québec que l’on trouve une des proportions les plus élevées d’immigrants très récents parmi les 25 à 54 ans, soit près de 26 pour cent en 2015, contre un peu plus de 13 pour cent en Ontario. Or, les données indiquent que les taux de chômage diminuent de façon marquée avec le temps chez les immigrants.

Des travailleurs surqualifiés

Malgré tout, la plupart des personnes immigrantes reçues sont sélectionnées en vertu de leurs compétences professionnelles et rien ne justifie un tel écart.

Mme Posca souligne qu’au-delà des taux de chômage et d’emploi, la surqualification et les revenus inférieurs caractérisent la situation des personnes immigrantes.

«Ce qui est surprenant, c’est de constater qu’on a des immigrants qui sont très qualifiés, qui sont plus scolarisés que les travailleurs nés au pays, qui maîtrisent le français en grande majorité et qui ont malgré tout des difficultés à s’intégrer sur le marché du travail», explique-t-elle.

Elle précise que 43 pour cent des immigrants se retrouvent en situation de surqualification.

«Et pourtant ce n’est pas qu’ils ont été mal sélectionnés, mais bien parce qu’on ne leur a pas donné une chance sur le marché du travail», dit-elle.

La note de l’IRIS met également en lumière une double discrimination, cette fois à l’endroit des femmes immigrantes: en 2013, le revenu disponible médian de ces femmes s’élevait à 20 410 $, soit 90 pour cent du revenu des femmes natives et seulement 60 pour cent de celui des hommes natifs.

Reproches au gouvernement

Mme Posca émet des reproches au gouvernement libéral du Québec pour les compressions et mesures d’austérité qui affectent les immigrants et leur insertion. Elle évoque notamment une forte diminution de l’offre de cours de français, la fermeture de bureaux du ministère de l’Immigration, de la Diversité et de l’Inclusion en région et les coupes dans des organismes communautaires.

«On a un gouvernement qui se dit très ouvert à la diversité, qui fait la promotion de l’inclusion d’immigrants. Or, les politiques sont un échec parce qu’on sélectionne des gens sur la base de leurs qualifications et, une fois qu’ils sont rendus ici, on les maintient dans une position défavorisée», dit-elle.

La chercheuse propose que pour mettre fin à la discrimination systémique, il y ait reconnaissance des diplômes et expériences obtenus à l’étranger. Elle suggère aussi la bonification de l’offre de stages et de formations en emploi ainsi que l’implantation de programmes d’accès à l’égalité en emploi dans les entreprises privées.

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