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Des journaux réclament l'aide du gouvernement

Ross Marowits, La Presse canadienne - La Presse Canadienne

MONTRÉAL — Les éditeurs de plusieurs journaux du Québec se regroupent au sein d’une coalition qui demande aux gouvernements fédéral et provincial la création d’un programme d’aide temporaire pour que les médias imprimés poursuivent le virage numérique imposé par la multiplication des plateformes.

La Coalition pour la pérennité de la presse d’information au Québec regroupe 146 journaux. Elle demande un statut d’exception culturelle car l’industrie vit une profonde remise en question de son modèle d’affaires.

«Nous estimons être au coeur de la tempête parfaite», a indiqué à La Presse canadienne le directeur du quotidien «Le Devoir», Brian Myles.

Au cours des dernières années, les médias de la coalition ont connu une hausse de leur lectorat global en raison de la multiplication des plateformes, mais leurs revenus ont diminué, notamment à cause de l’exode des investissements publicitaires vers les médias numériques.

Le magazine «Infopresse» affirme que les revenus publicitaires numériques représentent près de 878 millions $ au Québec, mais qu’ils échappent en grande partie aux médias d’ici.

La coalition réclame notamment du gouvernement provincial une programme d’aide temporaire d’une durée de cinq ans qui comprend des crédits d’impôt remboursables couvrant 40 pour cent des coûts de production, incluant les salaires des journalistes et 50 pour cent des coûts d’investissement dans les plateformes numériques.

«Nous nous retrouvons coincés entre l’arbre et l’écorce parce que nous devons assurer notre avenir dans le monde numérique, mais nous n’avons pas assez d’oxygène financier pour implanter complètement notre stratégie numérique», a fait valoir M. Myles.

La demande comprend aussi une exemption de la taxe sur la collecte sélective, qui a augmenté de plus de 1000 pour cent depuis 2006, et l’abolition des taxes de vente sur les journaux.

À Québec, le ministre de la Culture et des Communications, Luc Fortin, a eu une réaction prudente, indiquant dans un communiqué que des rencontres avaient déjà eu lieu avec certains membres de la coalition et que d’autres étaient à venir.

«Nous examinons la possibilité d’une aide ponctuelle afin d’aider la presse écrite, qui doit changer son modèle d’affaires», écrit le ministre, ajoutant que «des questions importantes demeurent toutefois en suspens, notamment au sujet de l’indépendance de la presse».

Des requêtes similaires seront faites au gouvernement fédéral jeudi, à Ottawa, lorsque Brian Myles, accompagné du propriétaire des six quotidiens de Groupe Capitales Médias, l’ex-ministre fédéral Martin Cauchon, et le président du conseil d’administration de Torstar (TSX:TS.B), John Honderich, iront témoigner devant la commission parlementaire qui se penche sur l’avenir de l’industrie.

Le président et chef de la direction de Groupe Capitales Médias, Claude Gagnon, a indiqué que la coalition demanderait au gouvernement fédéral de lui ouvrir l’accès à des programmes semblables à ceux que reçoivent l’industrie cinématographique et l’industrie télévisuelle pour protéger des milliers d’emplois.

La coalition réclame également des modifications aux lois sur les droits d’auteur afin de protéger leurs contenus contre un usage illégal, particulièrement sur internet. Elle demande aussi une augmentation significative des budgets des deux gouvernements en placements publicitaires dans les journaux, qui ont chuté de façon importante au cours des dernières années au profit, notamment, du web.

Claude Gagnon affirme que le pays risque de se retrouver avec des pertes d’emplois importantes dans une industrie qui soutient la démocratie si les gouvernements ne posent pas rapidement des gestes pour s’impliquer dans leur survie.

«Pourquoi serait-ce valable pour des entreprises qui viennent s’implanter au Québec et ce ne serait pas valable pour des organisations qui sont déjà installées ici et qui produisent des contenus et qui permettent de conserver des emplois?», s’est interrogé M. Gagnon en entrevue téléphonique, faisant référence à l’aide offerte aux entreprises de multimédia, de jeux vidéo ou même au secteur des magazines.

Les deux plus grands quotidiens francophones du Québec — La Presse +, qui a déjà transféré ses activités sur plateforme numérique, et le «Journal de Montréal», qui appartient à Québecor — ne sont pas membres de la coalition et n’ont pas retourné les appels de La Presse canadienne.

Le quotidien montréalais anglophone «The Gazette» ne fait pas partie de la coalition non plus, mais sa société-mère, Postmedia, oeuvre au sein d’une association canadienne de journaux pour obtenir le même genre de soutien, a indiqué sa rédactrice en chef, Lucinda Chodan, qui est également vice-présidente chez Postmedia.

Le chef de la direction de Postmedia, Paul Godfrey, a affirmé devant un comité parlementaire en mai dernier qu’Ottawa devait venir en aide à l’industrie. Il a vertement critiqué le fait que, selon les données fédérales, les dépenses publicitaires du gouvernement fédéral dans les journaux ont chuté de moitié entre 2010 et 2015, alors que celles effectuées en ligne ont pratiquement doublé, envoyant l’argent des contribuables canadiens dans des entreprises étrangères comme Google et Facebook.

La coalition québécoise, elle, fait remarquer que déjà, la Finlande, la Norvège, la Suède, la France, le Royaume-Uni et les États-Unis offrent des programmes d’aide à la presse écrite.

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