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Loi sur l'équité salariale: des articles invalides

Photo: ThinkStock
Stéphanie Marin, La Presse canadienne - La Presse Canadienne

MONTRÉAL — Des articles de la Loi sur l’équité salariale sont inconstitutionnels car discriminatoires, a confirmé la Cour d’appel du Québec.

Dans son jugement rendu mercredi, la cour a tranché que ces articles ont pour effet de perpétuer l’inégalité salariale dont sont victimes ceux qui occupent des emplois à prédominance féminine, comme les infirmières et les secrétaires.

Il s’agit d’une victoire importante pour des milliers de femmes, jugent des syndicats qui étaient parmi ceux qui avaient contesté la loi, dont l’Alliance du personnel professionnel et technique de la santé et des services sociaux et le Syndicat canadien de la fonction publique.

Le gouvernement du Québec a ainsi été débouté pour une seconde fois.

Il avait également perdu en première instance et en avait appelé du jugement rendu le 22 janvier 2014 par le juge Édouard Martin de la Cour supérieure du Québec.

Celui-ci avait également déclaré «invalides, inapplicables, inopérants et sans effet» les articles 76.3 et 76.5 de la Loi sur l’équité salariale. Ces articles avaient été ajoutés lors de la réforme de 2009, qui modifiait la loi originale adoptée en 1996.

La loi sur l’équité salariale a «pour objet de corriger les écarts salariaux dus à la discrimination systémique fondée sur le sexe à l’égard des personnes qui occupent des emplois dans des catégories d’emplois à prédominance féminine». Une fois l’égalité de salaire atteinte, celle-ci doit être maintenue, afin que des écarts ne se recréent pas.

En vertu de la réforme de 2009, les emplois visés devaient être analysés tous les cinq ans afin de déterminer s’ils avaient subi des changements justifiant un ajustement salarial. Cela permettait à un employeur d’effectuer des changements et de n’avoir rien à payer pendant cinq ans — en attendant la révision de l’emploi — car il n’y a pas de rétroactivité.

Selon les syndicats qui avaient poursuivi le gouvernement québécois, la version initiale de la loi était plus favorable aux travailleurs, car elle prévoyait plutôt pour l’employeur l’obligation de maintenir «en continu» l’équité, et à verser aux employés concernés les ajustements salariaux à compter de ces changements.

Le gouvernement québécois avait plaidé que les modifications apportées en 2009 étaient nécessaires vu l’inefficacité de l’ancien régime.

Discrimination fondée sur le sexe

Dans sa décision, le juge Martin de la Cour supérieure avait notamment conclu que l’absence de rétroactivité dans de telles circonstances, puisqu’elle s’appliquait à des emplois surtout occupés par des femmes, représentait «une source de discrimination fondée sur le sexe».

La Cour d’appel confirme ce jugement, avec des modifications mineures.

«Certes, l’évaluation du maintien de l’équité salariale et les ajustements salariaux sont nécessairement ponctuels, mais l’absence de rétroactivité couplée à un ajustement tous les cinq ans et un processus d’affichage inadéquat ne peuvent passer la rampe», écrit la Cour d’appel, en soulignant que le juge Martin avait conclu avec raison qu’il y avait là discrimination au sens de la Charte canadienne des droits et libertés.

«La Loi modificatrice fait en sorte que, pendant des épisodes pouvant aller jusqu’à 62 mois, l’iniquité salariale, bien que constatée et démontrée, sera tolérée sans être compensée, au détriment des salariées», poursuivent les trois juges de la Cour d’appel.

L’Alliance du personnel professionnel et technique de la santé et des services sociaux (APTS) et le Syndicat canadien de la fonction publique (SCFP) ont qualifié la décision de la Cour d’appel de «victoire majeure pour les femmes».

«Nous sommes particulièrement fiers de ce jugement, qui confirme qu’il est intolérable de permettre la discrimination salariale envers les femmes, a indiqué la présidente de l’APTS, Carolle Dubé, dans un communiqué. Il s’agit là d’une victoire majeure pour l’ensemble des salariées du Québec.»

L’APTS espère que le gouvernement n’ira pas en appel devant la Cour suprême du Canada. «Nos arguments ont déjà été jugés pertinents par deux fois. Au lieu de s’obstiner à faire traîner en longueur le dossier, nous invitons le gouvernement à s’asseoir avec nous afin de trouver des solutions. Les femmes ont le droit d’être traitées avec équité», a tranché Mme Dubé.

Le gouvernement du Québec dispose d’un délai de 60 jours pour référer la cause à la Cour suprême.

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