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Snowden commente l’affaire Patrick Lagacé

Émilie Bergeron, La Presse canadienne - La Presse Canadienne

MONTRÉAL — Le lanceur d’alerte Edward Snowden a qualifié l’espionnage du journaliste Patrick Lagacé «d’attaque radicale» contre la liberté de presse.

Celui qui est devenu célèbre en dévoilant au grand jour les pratiques de surveillance de masse de l’Agence nationale de la sécurité des États-Unis (NSA) a dit que l’affaire Lagacé représente «une menace pour notre modèle traditionnel de démocratie».

Il a déploré que les gouvernements s’accordent de plus en plus le droit de surveiller les populations sans leur demander, a priori, leur consentement.

«La loi commence à échouer à protéger nos droits (…) parce que le gouvernement a créé tellement de mécanismes pour les contourner», a-t-il fait valoir.

Edward Snowden prenait la parole dans le cadre d’une conférence vidéo organisée par un groupe de recherche de l’Université McGill en communication, technologies et culture appelé Media@McGill. La salle, qui avait une capacité de 600 personnes, était pleine à craquer pour l’événement. Un autre local avait été ouvert pour accueillir environ 150 autres participants.

La conférence a commencé avec un peu plus d’une heure de retard. L’événement, qui devait commencer à 19 h, a été perturbé par des membres du syndicat d’employés occasionnels de l’université McGill (AMUSE) en grève, qui avaient érigé une ligne de piquetage en face de la salle de l’événement.

Ce débrayage «est une force» qui «fait partie de la démocratie», a dit M. Snowden en commençant son intervention.

La vidéoconférence a par ailleurs dû être interrompue brièvement parce que des pirates informatiques tentaient de court-circuiter la communication. L’allocution de M. Snowden était diffusée en direct sur YouTube.

Invité à donner son opinion sur l’élection présidentielle américaine, l’ex-informaticien s’est dit déçu d’assister à une campagne où les arguments se résument à des «insultes» basées sur les personnalités des candidats.

«Nous devons être très prudents de ne pas fonder tous nos espoirs dans une élection», a-t-il soutenu, ajoutant qu’on ne peut faire confiance à personne d’autre qu’à soi-même.

M. Snowden s’est intéressé à l’actualité québécoise dans les derniers jours. La Presse a révélé cette semaine que son chroniqueur, Patrick Lagacé, avait fait l’objet de surveillance policière pendant plusieurs mois. Mercredi, la Sûreté du Québec (SQ) a confirmé avoir enquêté sur six journalistes relativement à la diffusion de contenu d’écoutes électroniques.

M. Snowden a partagé et commenté les deux nouvelles sur son compte Twitter.

Depuis qu’il a fait ses révélations explosives, en 2013, M. Snowden est exilé en Russie, étant accusé notamment d’espionnage aux États-Unis.

Il a d’ailleurs invité ceux qui l’écoutaient, mercredi à ne pas s’en faire pour lui. «Je suis (le point) le moins important (…) Si vous vous demandez quel sera mon avenir, vous manquez le gros de l’affaire», a dit l’ancien employé contractuel de la NSA.

Peu avant le début de la conférence, la directrice de Media@McGill, Christine Ross, a souligné en entrevue avec La Presse canadienne l’importance que représentait pour son groupe de recherche la présence — bien que virtuelle — de M. Snowden. Deux ans plus tôt, c’est le journaliste Glenn Greenwald, qui a signé plusieurs articles dans le quotidien britannique The Guardian à partir des documents secrets coulés par Edward Snowden, qui avait été invité.

Mme Ross a par ailleurs noté que l’événement arrivait à point nommé avec les révélations récentes sur la surveillance policière dont ont fait l’objet plusieurs journalistes québécois.

«En quelque part c’est une mauvaise chose, mais c’est une bonne chose que ça ait été dit, parce qu’on doit faire face à cette réalité-là et il faut qu’on trouve des moyens pour contrer ces situations-là.»

Plusieurs centaines de personnes ont fait la file à l’extérieur du pavillon Leacock de l’Université McGill pendant des heures dans le but d’assister à la vidéoconférence. Bon nombre d’entre eux n’ont pas pu y assister en personne, faute de places.

Marie-Claude Dupuis, âgée de 43 ans, qui attendait depuis 15h30, s’est dite d’autant plus portée à se déplacer dans la foulée des révélations des derniers jours.

«Je trouve important de soutenir ceux qu’on appelle les « whistleblowers » qui dénoncent les gouvernements, les entreprises», a-t-elle dit.

Edward Snowden a reçu une longue ovation de la salle à la fin de son intervention. «J’espère que l’année prochaine je pourrai vous voir en personne», a-t-il conclu.

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