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Islamophobie: affrontement évité sur la colline

Sean Kilpatrick / La Presse Canadienne Photo: Sean Kilpatrick
Mylène Crête, La Presse canadienne - La Presse Canadienne

OTTAWA — Deux groupes de manifestants en sont presque venus à l’affrontement, mardi, sur la colline du Parlement, quelques heures avant que les députés de la Chambre des communes débattent de la motion contre l’islamophobie.

Une cinquantaine de personnes qui brandissaient des pancartes dénonçant cette motion étaient réunies sur les marches menant à l’Édifice du Centre. Parmi elles, des membres du chapitre canadien des Soldats d’Odin, un groupuscule associé à des suprémacistes blancs.

Devant eux, une vingtaine d’anarchistes et de communistes scandaient des slogans contre l’islamophobie et l’extrême droite. Des policiers de la GRC ont dû intervenir pour séparer des membres des deux groupes opposés après une confrontation verbale.

Des agents ont ensuite installé des clôtures entre les deux groupes qui continuaient de s’invectiver. Environ 20 policiers de la GRC étaient présents.

L’un des manifestants du Parti communiste révolutionnaire, qui a préféré taire son nom, a dit avoir participé à la contre-manifestation pour dénoncer l’islamophobie. «C’est important de défendre les communautés les plus opprimées, comme les musulmans, lorsqu’elles sont visées par des racistes», a-t-il dit.

Se tenant quelque peu en retrait, le militant Bill Clennett était aussi du nombre des manifestants contre l’islamophobie. «C’est très préoccupant. On ne sait pas où ça va nous mener. C’est dangereux cette montée de l’intolérance et du racisme au Québec, au Canada et en Occident», a-t-il dit.

La motion contre l’islamophobie divise

La motion contre l’islamophobie divise les députés à la Chambre des communes. Elle vise à condamner la discrimination envers les musulmans, toute forme de racisme et de discrimination religieuse systémiques et demande que l’élaboration d’une approche pangouvernementale soit étudiée.

Les manifestants réunis par la Canadian Coalition of Concerned Citizens craignent une atteinte à la liberté d’expression et demandent aux députés de voter contre la motion.

«Le terme islamophobie est un terme qui n’a pas vraiment de définition, a dit Suzanne Gagnon, l’une des manifestantes. Donc, de l’utiliser dans une motion, c’est restreindre la liberté d’expression de ceux et celles qui vont vouloir critiquer l’islam. Si je suis contre la polygamie, ce sera interprété comme si j’étais islamophobe.»

«C’est une façon de confondre la discrimination envers les musulmans et la critique de la religion qu’est l’islam», a renchéri Madeline Weld, une autre manifestante.

Questionné à ce sujet après la période des questions, le chef du Nouveau Parti démocratique, Thomas Mulcair, qui compte appuyer la motion, a été catégorique.

«C’est faux que la motion M-103 s’attaque à la liberté d’expression, s’est-il exclamé. C’est entièrement faux. C’est une expression simple par motion — et la Chambre des communes s’exprime par motion — du fait que l’on trouve l’islamophobie inacceptable dans notre société et on s’exprime contre ça tout comme on l’a fait à l’automne.»

En octobre, les députés avaient unanimement adopté une motion déposée par M. Mulcair pour condamner l’islamophobie au lendemain d’un incident de vandalisme à la mosquée de Sept-Îles.

«Soit on est contre la haine, et l’islamophobie est une manière d’exprimer sa haine, soit on va essayer de la justifier, a poursuivi M. Mulcair. Il n’y a rien dans cette motion-là qui est contraignant.»

La nouvelle motion contre l’islamophobie a été déposée en décembre par la députée libérale d’arrière-ban Iqra Khalid. Elle a été débattue une première fois à la Chambre des communes moins de trois semaines après l’attentat de Québec.

Plusieurs députés conservateurs s’y opposent, dont une majorité de candidats à la direction du Parti conservateur. Lors du débat en chambre, certains députés de ce parti ont fait écho aux préoccupations des manifestants contre la motion en faisant valoir qu’elle n’était pas assez inclusive envers d’autres groupes religieux et qu’elle ne protégeait pas la liberté d’expression.

Les libéraux qui ont pris la parole ont rétorqué qu’il s’agit d’un geste symbolique de solidarité dont le but est de sensibiliser les citoyens contre la discrimination. La députée Iqra Khalid a défendu sa motion en prenant position contre la charia.

Cette deuxième heure de débat a eu lieu lors de la Journée internationale pour l’élimination de la discrimination raciale. Le vote est prévu jeudi.

Deux cas d’islamophobie récents

– 29 janvier 2017 : six personnes sont tuées par balle lors d’une attaque au Centre culturel islamique de Québec. Six mois auparavant, une tête de porc avait été déposée devant la porte de cette mosquée en plein ramadan.

– Novembre 2016 : six lieux de cultes de confessions musulmane, juive et catholique sont visés par des graffitis haineux à Ottawa. Un adolescent de 17 ans est arrêté.

Note aux lecteurs: Version corrigée. Retire le cas du 25 octobre 2016 dans l’énumération en fin de texte. L’incident n’avait finalement pas été relié à un geste haineux.

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