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Budget fédéral: un avant-goût… et des questions

Mélanie Marquis, La Presse canadienne - La Presse Canadienne

OTTAWA — Un an jour pour jour après avoir déposé un budget qui s’inscrivait dans la lignée de sa plateforme électorale, le gouvernement libéral à Ottawa présentera mercredi un exercice financier qui s’inscrit cette fois dans le contexte de l’incertitude provoquée par l’élection de Donald Trump au sud de la frontière.

Les libéraux ont signalé que le deuxième budget du ministre des Finances, Bill Morneau, s’articulerait notamment autour de l’innovation, des investissements en infrastructure, et que le ménage dans les mesures fiscales jugées inéquitables pour la classe moyenne se poursuivra.

Mais plusieurs éléments demeurent en suspens.

Quel est le chiffre magique — celui du déficit? Ottawa a-t-il prévu des mesures spécifiques pour pallier les actions qui seront prises aux États-Unis dans le contexte de la renégociation de l’Accord de libre-échange nord-américain et sur fond de guerre commerciale dans le dossier du bois d’oeuvre? Et cette Banque de l’infrastructure, comment se déploiera-t-elle?

On aura réponse à ces questions — ou à tout le moins, à certaines d’entre elles — mercredi, vers 16 h 30, lorsque le ministre Morneau déposera l’exercice financier à la Chambre des communes.

Voici quelques éléments à surveiller dans le budget de l’an deux du gouvernement de Justin Trudeau.

La taille du déficit

Il faudra attendre à mercredi avant de savoir quel est le chiffre magique.

Mais à la veille du dépôt de ce deuxième budget consécutif écrit à l’encre rouge, une source haut placée au ministère des Finances assure que le gouvernement libéral démontrera qu’il est «très responsable au niveau fiscal».

«C’est beaucoup en fonction de l’économie, et ces derniers mois, l’économie montre des signes encourageants. Si ça se poursuit, notre situation budgétaire va s’améliorer de façon importante, c’est sûr», a fait valoir cette source gouvernementale.

Les libéraux se font railler presque quotidiennement en Chambre par l’opposition conservatrice pour avoir échoué à présenter, dans le budget 2016, un plan de retour à l’équilibre budgétaire. On verra mercredi si Bill Morneau en offrira un dans son deuxième exercice financier.

Dans sa mise à jour économique, à l’automne dernier, le gouvernement évaluait le montant du déficit à 27,8 milliards $ pour 2017-2018. Le document prévoyait que le déficit redescendrait graduellement pour s’établir à 14,6 milliards $ en 2021-2022.

Un budget pour réagir à Trump?

L’élection du protectionniste Donald Trump à la présidence des États-Unis a plongé plusieurs pays, dont le Canada, dans l’incertitude. Une série de ministres titulaires de portefeuilles économiques ont d’ailleurs été dépêchés au sud de la frontière après l’arrivée du milliardaire à la Maison-Blanche.

«L’engagement avec les États-Unis était absolument nécessaire compte tenu de l’importance commerciale pour le pays. On n’avait pas le choix de faire ça. Mais on n’a pas écrit le budget en fonction de Trump», a plaidé la même source gouvernementale aux Finances.

Cette personne a par ailleurs nié que le budget canadien a été ébauché dans la prudence, quitte à rajuster le tir en déposant rapidement une mise à jour économique à la lumière des propositions budgétaires qui auront été adoptées par le Congrès.

Rien pour le bois d’oeuvre

De toute évidence, il n’y aura pas de ligne précise au budget pour l’industrie du bois d’oeuvre. Le gouvernement libéral attend le verdict du tribunal américain qui étudie la requête judiciaire pour concurrence déloyale et dumping déposée par l’industrie américaine.

«C’est difficile pour nous de conclure avec des mesures au budget, parce qu’on est encore en train de négocier, alors je pense que ça va prendre plus de temps pour ce dossier-là», a signalé la source du ministère de Bill Morneau.

Chez Unifor, qui représente des milliers de travailleurs dans la forêt et les industries connexes, on prévient qu’il y a urgence d’agir. Car il est écrit dans le ciel que la décision du tribunal, attendue le 24 avril, sera défavorable au Canada, croit le directeur québécois du syndicat, Renaud Gagné.

«On sait qu’on a une tempête parfaite qui s’en vient, et il y a des mesures qui doivent être mises en place», a-t-il insisté. Unifor réclame notamment des ajustements au programme d’assurance-emploi afin d’y rendre plus facilement admissibles les travailleurs qui seraient touchés par le conflit.

Fiscalité

Le gouvernement a respecté sa promesse électorale d’alléger le fardeau fiscal de la classe moyenne tout en alourdissant celui des plus fortunés. Il a cependant rompu, dans son budget 2016, celle de faire passer de 11 à 9 pour cent le taux d’imposition des petites et moyennes entreprises.

Rien, dans ce qui a filtré au cours des dernières semaines et des derniers mois, ne laisse présager qu’il y aura dans le budget des modifications aux tranches d’imposition, tant pour les entreprises que pour les particuliers.

Aux Finances, on suit quand même la situation aux États-Unis: «S’il y avait de gros changements en matière de taxation, il y aurait peut-être des questionnements», mais il n’y a pas de «grosse lumière rouge qui nous force pour l’instant à être réactifs au niveau budgétaire», a dit une source.

La Banque de l’infrastructure…

On n’annoncera pas mercredi dans quelle ville la Banque de l’infrastructure aura pignon sur rue, a-t-on confirmé mardi au ministère des Finances.

Mais déjà, du côté de Québec, on commençait à faire campagne en faveur de Montréal, mardi, plaidant que la métropole serait l’endroit tout indiqué pour accueillir le siège social de cette nouvelle créature dont le gouvernement fédéral a annoncé la mise sur pied à l’automne dernier.

Après tout, la Banque de l’infrastructure doit s’inspirer du modèle de la Caisse de dépôt et placement du Québec (CDPQ), ont tour à tour plaidé le premier ministre québécois Philippe Couillard et les chefs de l’opposition à l’Assemblée nationale.

Le hic, c’est que plusieurs villes à travers le pays s’arrachent cette Banque qui devrait être dotée d’un budget total de 35 milliards $ qui permettra au privé d’investir dans les grands projets d’infrastructures au pays, a souligné mardi le ministre fédéral de l’Infrastructure, Amarjeet Sohi. «Montréal, Calgary et Toronto veulent la Banque», s’est-il réjoui.

Le Nouveau Parti démocratique voit d’un mauvais oeil la mise sur pied d’une «banque de privatisation qui va faire entrer des compagnies qui vont vouloir avoir des rendements avec des infrastructures publiques», a signalé le député Alexandre Boulerice. Mais si elle voit le jour, elle devrait être installée à Montréal, où il y a le bon «écosystème financier», a-t-il dit.

La Banque de l’infrastructure aura un budget total de 35 milliards $, dont 15 milliards $ directement en provenance des coffres du gouvernement fédéral.

Coup de balai fiscal

Les libéraux devraient continuer leur ménage dans la panoplie de crédits d’impôt qui ont été instaurés au fil des ans par le précédent gouvernement conservateur de Stephen Harper. L’opération devrait permettre de dégager 3 milliards $ en revenus.

Le gouvernement n’a pas confirmé lesquels pourraient passer à la trappe, mais cette semaine, en Chambre, les conservateurs disaient redouter la disparition du crédit d’impôt pour le transport en commun ou encore celui destiné aux pompiers volontaires.

L’autre rumeur persistante qui circulait sur la colline ces derniers temps veut que la tranche d’imposition sur le gain en capital passerait de 50 à 75 pour cent.

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