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Budget: le Québec exprime sa déception

Finance Minister Bill Morneau takes part in a interview with The Canadian Press at his office in Ottawa, Thursday, March 23, 2017. THE CANADIAN PRESS/Adrian Wyld Photo: Adrian Wyld/La Presse canadienne
Jocelyne Richer, La Presse canadienne - La Presse Canadienne

QUÉBEC — Tous partis confondus, ou presque, le Québec s’est exprimé d’une seule voix jeudi pour rabrouer le gouvernement fédéral, jugé trop peu enthousiaste à l’idée de financer les grands projets québécois de transport en commun.

L’Assemblée nationale a frôlé l’unanimité (à 95 votes pour, aucun contre et deux abstentions) pour déplorer, par le biais d’une motion, le peu de place faite aux priorités du Québec dans le budget déposé la veille par le ministre fédéral des Finances, Bill Morneau.

Tous les députés et ministres libéraux présents ont voté en faveur de la motion déposée par le porte-parole péquiste en matière de finances, le député de Rousseau, Nicolas Marceau.

Le premier ministre Philippe Couillard, qui n’a pu voter étant parti à Lachute inaugurer un centre de pédiatrie sociale, a quand même endossé la motion et en a profité pour réaffirmer sa détermination à entendre le gouvernement fédéral s’engager à financer substantiellement les trois grands projets de transport en commun qu’il a identifiés comme prioritaires pour le Québec.

Tous les députés péquistes et caquistes ont emboîté le pas pour appuyer la motion, de même que les trois députés indépendants présents. Seuls les deux députés de Québec solidaire, Amir Khadir et Manon Massé, ont préféré s’abstenir. Ils ont jugé que la motion était trop favorable à la privatisation du réseau de transport collectif.

«Nous aurions plutôt voulu que ça (la motion) mette l’accent sur le réseau public de transport financé publiquement, contrôlé publiquement», a dit M. Khadir en point de presse.

La motion, qui sera expédiée à Ottawa, exprime «la très grande déception» du Québec, en raison de l’absence d’engagements financiers pris par le gouvernement fédéral dans plusieurs dossiers jugés prioritaires par le Québec, nommément le train électrique (REM) et la prolongation vers l’est de la ligne bleue du métro, à Montréal.

Un troisième projet sur la liste de priorités du gouvernement ne figure pas dans la motion: le Service rapide par bus (SRB) à Québec.

«On veut les trois projets et on veut Ottawa dans les trois projets», a résumé le premier ministre Couillard, lors d’une mêlée de presse à Lachute.

Il a dit avoir besoin, et rapidement, «d’un écho très fort» en provenance d’Ottawa, un écho «très net et très précis», en faveur de ces trois projets «qui doivent se réaliser». Et pour devenir réalité, ces coûteux projets ont besoin de l’argent d’Ottawa, a-t-il insisté.

La motion, que les élus libéraux ont proposé d’adopter sans débat, déplore par ailleurs le fait que le budget fédéral passe sous silence les dossiers du bois d’oeuvre, de la compensation espérée pour les producteurs fromagers et des modifications à apporter aux conventions fiscales avec la Barbade.

À Ottawa, cependant, la fronde québécoise a semblé créer plus de surprise que de malaise, considérant que tout va pour le mieux dans les relations Québec-Ottawa, du point de vue du gouvernement Trudeau.

Le premier ministre Justin Trudeau a réagi à l’initiative en assimilant la position du gouvernement Couillard à un «jeu» politique, duquel le gouvernement fédéral sortirait perdant à tout coup. «Si j’avais dit exactement comment ça va se faire, comment on allait tout faire, ils auraient dit: « Ha! Mon Dieu! C’est pas à vous de décider ça, c’est à nous de le faire! » Je comprends le jeu qui se joue», a-t-il dit, en se montrant rassurant sur le fait que son gouvernement était prêt à «investir dans les projets de transport collectif du Québec», sans donner de détails.

La ministre du Développement international et de la Francophonie, Marie-Claude Bibeau, s’est montrée surprise, croyant qu’il existe un malentendu sur le financement des projets de transport collectif. «Ces dossiers-là sont de bons exemples qui pourraient être financés par nos programmes d’infrastructures, alors je ne vois pas pourquoi il y a une inquiétude à ce moment-ci. Je suis étonnée», a-t-elle dit.

«Notre main est tendue. J’espère que Québec va la prendre», a renchéri la ministre du Patrimoine, Mélanie Joly.

Se disant lui aussi «surpris», le ministre des Transports, Marc Garneau, est confiant que «le Québec va avoir sa part», promettant «pour bientôt» de «très belles annonces» accompagnées «de versements historiques en transport en commun et en logement abordable».

Le ministre Bill Morneau a soutenu de son côté qu’il avait de «très bonnes relations avec le Québec». À propos des projets de transport collectif, il a dit, en français, qu’il était «très important d’avoir une façon de travailler avec les provinces pour être certain que ça va être très bon pour l’économie et pour les gens à travers le pays».

Il a dit aussi espérer pouvoir donner au Québec une meilleure idée de ses positions sur divers sujets «dans 6-8 mois».

Plus tôt en matinée, lors d’une mêlée de presse, le ministre québécois des Finances, Carlos Leitao, et le président du Conseil du trésor, Pierre Moreau, avaient exprimé leur «inquiétude» devant le peu d’empressement d’Ottawa à préciser quelle part de la facture serait assumée par le palier fédéral dans ces différents projets qui s’annoncent fort coûteux.

Comme il avait fait la veille, le ministre Moreau a demandé aux députés québécois du caucus libéral fédéral de rendre des comptes sur le peu de place faite aux revendications du Québec dans le budget déposé par le gouvernement Trudeau.

Il a dit toujours espérer entendre de la bouche des élus fédéraux que les «projets identifiés par le Québec sont des priorités aussi pour le gouvernement fédéral».

Le ministre Moreau s’est défendu d’adopter une position désespérée, en comptant sur les députés fédéraux au lieu de miser sur son propre gouvernement pour faire valoir ses priorités et défendre les intérêts du Québec à Ottawa.

«Compter sur le fait que des gens fassent leur travail, c’est pas du désespoir, c’est de l’espoir», a-t-il commenté.

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