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La loi 492 sur les aînés aurait des effets pervers

Photo: Archives
Caroline Plante, La Presse canadienne - La Presse Canadienne

QUÉBEC — Un groupe de défense des aînés s’en prend à la loi 492, dont le mandat est précisément de les protéger contre l’éviction de leur logement.

En entrevue avec La Presse canadienne lundi, la présidente de l’Association québécoise de défense des droits des personnes retraitées et préretraitées (AQDR), Judith Gagnon, a dénoncé les effets pervers de la loi et a tenu des propos controversés sur les personnes âgées.

Celle-ci a donné l’exemple de deux septuagénaires de Québec, qui ont été victimes d’acharnement lorsque leur propriétaire a appris qu’il ne pouvait les évincer. La pression sur eux est devenue tellement forte qu’ils n’ont eu d’autre choix que d’abandonner le logis où ils habitaient depuis plus de 10 ans.

«Il y a un effet et un contre-effet», a avancé Mme Gagnon, invitée à commenter l’impact de la loi adoptée il y a près d’un an.

Puis, elle a ajouté candidement qu’elle n’aurait pas aimé avoir ces gens comme locataires.

«C’est quasiment « La Petite Vie ». Je ne dis pas ça pour être méchante. Madame n’a pas de dentier, ils sont gros, elle n’a pas de brassière; c’est le désordre total et ils sont âgés», a-t-elle dit.

Si elle était propriétaire, elle-même voudrait se soustraire à la loi. «Moi, avoir une maison à logement, je n’en prendrais pas des gens de cet âge-là. Honnêtement, je vous le dis, je n’en prendrais pas parce que je serais prise avec tout le temps.

«Jusqu’où doit-on aller pour protéger les aînés? Est-ce qu’on ne crée pas avec ça deux classes? Les gens protégés, mais tellement vouloir les protéger qu’ils deviennent une grosse tache pis qu’on en veut plus, parce qu’on est pris avec?»

La loi 492 est un legs politique de l’ancienne députée Françoise David, de Québec solidaire. En vigueur depuis le 10 juin 2016, elle stipule qu’un propriétaire ne peut reprendre un logement ou évincer un locataire «lorsque ce dernier ou son conjoint, au moment de la reprise ou de l’éviction, est âgé de 70 ans ou plus, occupe le logement depuis au moins 10 ans et dont le revenu est égal ou inférieur au revenu maximal lui permettant d’être admissible à un logement à loyer modique».

Le propriétaire peut toutefois reprendre le logement s’il est lui-même âgé de 70 ans ou plus et souhaite utiliser le logement pour s’y loger; si le bénéficiaire de la reprise est âgé de 70 ans ou plus; s’il est un propriétaire occupant âgé de 70 ans ou plus et souhaite loger, dans le même immeuble que lui, un bénéficiaire âgé de moins de 70 ans.

Selon la Régie du logement, depuis l’adoption de la loi, le nombre de personnes âgées de 60 ans et plus qui se sont opposées à une demande d’éviction est passé de 30 à 11.

Un contre-effet
Mais un récent sondage de la Corporation des propriétaires immobiliers du Québec (CORPIQ) a révélé qu’un propriétaire d’immeuble locatif sur deux hésite dorénavant à louer un logement à une personne de 70 ans ou plus ou approchant cet âge.

«Le gouvernement du Québec savait qu’il adoptait une loi dommageable pour les aînés. Ils étaient des locataires appréciés par l’ensemble des propriétaires, mais ça va changer», a signalé le directeur affaires publiques de la CORPIQ, Hans Brouillette, dans un communiqué.

La loi refroidirait aussi les propriétaires intéressés à revendre leur immeuble: «Considérant que le locataire âgé bénéficie du droit au maintien à vie dans les lieux (…), l’acheteur risquerait d’acquérir un immeuble dont il ne serait pas véritablement propriétaire», a-t-il ajouté.

Québec solidaire a informé La Presse canadienne lundi de son intention de faire parvenir une lettre à la présidente de la Commission des droits de la personne.

«Pour nous, il est clair que la CORPIQ encourage ses membres à discriminer les personnes âgées. C’est inacceptable», a dit le député Amir Khadir.

«Nous espérons que les propriétaires ne tombent pas dans cette pratique déplorable.»

Le Regroupement des comités logement et associations de locataires du Québec (RCLALQ), qui a décrété il y a cinq ans que le 24 avril était la Journée des locataires, a plaidé lundi pour plus de publicité au sujet de la loi 492 afin de mieux informer les Québécois.

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