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Brassage de cartes coûteux à l’ARC

Les bureaux de l'Agence du Revenu du Canada, à Montréal, sont situées sur le boulevard René-Lévesque Ouest. Photo: Chantal Lévesque/Archives Métro

Le Syndicat des employés de l’impôt craint une perte d’expertise alors que l’Agence du revenu du Canada (ARC) entame une réorganisation majeure.

Annoncée en novembre dernier, cette restructuration implique le transfert de nombreux employés permanents d’une ville vers une autre. «Il y avait des bureaux de recouvrement à Laval, à Montréal et en Montérégie pour s’occuper des comptes locaux, mais l’ARC a créé des centres nationaux de vérification et de recouvrement (CNVR), dont un va être à Shawinigan, cite en exemple le vice-président du syndicat, Marc Brière. Les gens se font donc offrir de partir des trois bureaux de la région métropolitaine pour aller faire le même travail à Shawinigan.»

Plusieurs centaines d’employés vivent une situation similaire partout au pays, alors que par exemple des employés de Shawinigan voient leurs tâches transférées à Jonquière.

Les employés contractuels de plusieurs bureaux seront mis à pied à la fin du mois de juin, après la période des impôts. «On parle de 150 personnes dans la grande région de Montréal, souligne le vice-président. Ça peut faire 3 ou 4 ans qu’ils sont avec nous parce que ça prend 5 ans sans interruption de plus de 30 jours pour avoir sa permanence à l’ARC.»

Les employés permanents affectés ont pour leur part jusqu’au 17 mai pour accepter ou non un transfert dans une autre ville. Ceux qui acceptent verront une bonne partie de leurs coûts de déménagement couverts en vertu de la politique de réinstallation de l’administration fédérale. «Ça peut coûter des dizaines de milliers de dollars par personne», rappelle M. Brière. Des frais d’hôtel, d’agent immobilier, de réinsertion à l’emploi pour les conjoints peuvent s’appliquer. «Ils savent que ça leur coûte un bras, alors je vous garantis que ce n’est pas la majorité des employés de la région métropolitaine qui va aller à Shawinigan», assure le représentant syndical.

Sans pouvoir donner de chiffres précis, M. Brière parle de «dizaines de départs» de l’ARC. «Je peux dire que des employés ont quitté le gouvernement, que d’autres ont déjà changé de ministère», rapporte-t-il. Un employé de Montréal confie même à Métro «que la qualité du travail n’est plus au rendez-vous et que les dossiers sont mal gérés» depuis novembre puisque plusieurs cherchent du travail ailleurs.

Le représentant syndical ajoute que des employés devanceront leur retraite au lieu de déménager. «Ils vont perdre des gens d’expérience, le transfert de connaissances va certainement être affecté», juge-t-il.

Les permanents qui refusent le transfert peuvent aussi se voir offrir un autre emploi, aux mêmes conditions salariales. L’ARC dit même faire «tous les efforts raisonnables» en ce sens. «Dans la région métropolitaine, il y a un centre d’appel à Montréal pour les questions concernant les impôts; des gens pourraient y aller», explique M. Brière.

Une situation qui n’est pas meilleure selon lui, car il faudra former ces employés à de nouvelles tâches. «Ça va coûter de l’argent à court terme. Il va falloir les former; ça va prendre du temps et ça va nuire à la productivité parce que plein de gens vont se retrouver dans de nouvelles fonctions», assure le vice-président.
L’ARC refuse de chiffrer les coûts de cette réorganisation qui inclura de nombreux déménagements. On répond qu’il «ne s’agit pas d’un exercice de réduction des coûts», mais plutôt d’accroissement de l’efficacité dû à la transmission plus fréquente des déclarations de revenus en ligne. «Le maintien du statu quo aurait donné lieu à des inefficacités accrues», explique-t-on par courriel.

Ce «brassage de cartes» pourrait causer des mises à pied, prévient le syndicat, car les employés permanents auront préséance sur les employés à forfait, même si ceux-ci sont déjà formés depuis plusieurs années.

Impacts à long terme
Le professeur associé à l’École d’administration publique (ENAP) Jacques Bourgault croit que ces grandes transformations sont «déstabilisatrices», mais qu’elles n’ont habituellement pas d’effet négatif à long terme.

«Oui, il y a une insécurité pendant un certain temps, avoue-t-il. Ça affecte l’intérieur de l’organisation. La vie sociale est défaite, par exemple. Mais les employés de l’ARC dans la région métropolitaine font un travail que d’autres font ailleurs au Canada et qui est bien documenté.»

M. Bourgault espère toutefois que la transition sera mieux menée que l’implantation du système de paie Phénix, qui a été un fiasco. «Vous m’auriez posé la question sur Phénix avant son implantation, je vous aurais donné la même réponse parce qu’on présume qu’ils ne font pas ça comme des apprentis sorciers, mais je me serais planté», nuance-t-il.

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