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Madeleine Meilleur: des sénateurs embêtés

Madeleine Meilleur is seen at the Ontario legislature in Toronto on June 11, 2013. Former Ontario cabinet minister Meilleur has formally been nominated as the country's official languages commissioner. THE CANADIAN PRESS/Colin Perkel Photo: THE CANADIAN PRESS
Mélanie Marquis, La Presse canadienne - La Presse Canadienne

OTTAWA — Au lendemain du témoignage de Madeleine Meilleur à la chambre haute, des sénateurs disent déplorer que le gouvernement libéral les place dans la fâcheuse position d’envisager un vote contre sa nomination au poste de commissaire aux langues officielles.

Dans le foyer du Sénat, mardi, une poignée de sénateurs, dont l’influent Serge Joyal, ont confié qu’ils ne pouvaient en bonne conscience appuyer la désignation de l’ancienne ministre libérale du gouvernement ontarien à Queen’s Park.

Le sénateur juge que sa proximité avec les libéraux — en plus d’avoir été donatrice du Parti libéral jusqu’à récemment, elle a approché des membres de l’entourage de Justin Trudeau pour leur signifier son intérêt pour l’emploi — la disqualifie pour ce poste qui exige une impartialité totale.

«Malheureusement, elle ne s’est pas donné un espace de refroidissement de la marmite politique pour pouvoir se détacher de ses liens partisans. Et ses liens sont au plus haut niveau du gouvernement», a regretté le sénateur Joyal.

«Je ne peux pas soutenir cette candidature-là, malheureusement. Et je le dis avec beaucoup de regret et de tristesse puisque j’ai appuyé plusieurs causes que Mme Meilleur a défendues dans le passé», a enchaîné le sénateur libéral indépendant.

Son collègue conservateur Ghislain Maltais compte aussi enregistrer un vote en défaveur, «à moins qu’on (…) fournisse des explications supplémentaires», car selon lui, la nomination de Madeleine Meilleur découle d’un «processus contaminé».

La sénatrice indépendante Raymonde Saint-Germain soutient que sa réflexion se poursuit et précise que son verdict sera fondé sur des critères précis, dont «la qualité de l’expression française et anglaise» et la connaissance du mandat du Commissariat aux langues officielles.

Celle qui occupait auparavant le poste de protectrice du citoyen du côté de l’Assemblée nationale a insisté sur l’importance de préserver l’impartialité et l’intégrité des agents du Parlement comme celui du commissaire aux langues officielles.

«Je suis consciente de l’importance de la crédibilité de la personne qui est un agent du Parlement et que pour être efficace, sa crédibilité, elle doit l’avoir auprès de l’ensemble des parlementaires», a exposé la sénatrice nommée en novembre dernier.

Un autre sénateur indépendant, André Pratte, a dit avoir besoin de davantage de temps pour se faire une tête. Il a aussi l’intention de consulter des organismes de défense des droits linguistiques pour avoir leur son de cloche.

«Le critère premier que je vais utiliser, ça va être la préservation de la crédibilité de l’institution», cet agent du Parlement étant probablement le seul «dont l’existence même, la raison d’être, est remise en question par certains», a-t-il soulevé en entrevue téléphonique.

Le leader de l’opposition conservatrice au Sénat, Larry Smith, souhaite «attendre avant de prendre sa propre décision». Il considère que le témoignage de Madeleine Meilleur en comité plénier a soulevé «des questions» dont les sénateurs doivent discuter «en profondeur».

Le vote sur la nomination pourrait avoir lieu cette semaine à la chambre haute, possiblement jeudi. La chambre haute doit y donner son feu vert au même titre que la Chambre des communes, où l’opposition a continué à mitrailler le gouvernement de questions, mardi.

L’enjeu domine la période des questions depuis des jours, conservateurs et néo-démocrates réclamant le retrait de la nomination de la libérale de longue date. Et lundi, c’était au tour du comité plénier du Sénat de braquer ses projecteurs sur elle.

C’est pour cela que le vote sur la nomination sera «difficile»: car peu importe la décision, «ça va être pris comme un jugement sur la personne, et c’est ça qui est dommage, parce que ce n’est pas un jugement sur la personne», a indiqué André Pratte.

À sa sortie du comité plénier, lundi soir, la principale intéressée a déclaré qu’elle n’avait pas l’intention de se récuser. Le gouvernement libéral, lui, continue de défendre bec et ongles le choix de Madeleine Meilleur.

LeBlanc défend Meilleur

Plusieurs organismes de défense des droits linguistiques en situation minoritaire déplorent que cette désignation ait semé la bisbille au sein de la francophonie plutôt que de rassembler le mouvement.

Le ministre néo-brunswickois Dominic LeBlanc a pour sa part affirmé mardi matin qu’il était «entièrement confortable» avec le choix du premier ministre Justin Trudeau et assuré que personne ne l’avait approché personnellement pour faire état d’un mécontentement.

«Honnêtement, moi, à ma connaissance, il n’y a pas des gens qui ont appelé mon bureau de comté ou qui m’ont arrêté dans les aéroports ou à l’épicerie et qui m’ont parlé de ça», a-t-il affirmé en entrevue lorsqu’on l’a intercepté à sa sortie du conseil des ministres.

Mais la grogne est réelle, si bien que la Société de l’Acadie du Nouveau-Brunswick (SANB) a annoncé lundi qu’elle comptait déposer cette semaine une demande de contrôle judiciaire devant la Cour fédérale pour tenter de bloquer la nomination de Madeleine Meilleur.

«On laissera ceux qui veulent aller devant les tribunaux faire ce qu’ils voudront, a réagi mardi le ministre LeBlanc. Il y a toutes sortes de choses qui sont déposées qui sont ultimement pas jugées comme ayant du mérite, alors moi, ça ne m’énerve aucunement.»

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