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Les Atikamekw bloquent un déboisement

Patrice Bergeron, La Presse canadienne - La Presse Canadienne

QUÉBEC — Les Atikamekw crient victoire: ils ont réussi à bloquer le déboisement de l’entreprise Rémabec sur le territoire d’Opitciwan, en Haute-Mauricie.

Ils ont obtenu mercredi une injonction de la Cour supérieure à Montréal.

Au plus tard à midi, les activités de Rémabec devaient cesser, au moins jusqu’au 15 septembre, le temps que des discussions soient entamées. L’entreprise envisage de poursuivre le gouvernement pour les pertes encourues.

«On est soulagé et bien heureux», a commenté dans une entrevue téléphonique avec La Presse canadienne, le chef d’Opitciwan, Christian Awashish, qui dit avoir vécu un «stress incroyable» avant que la décision ne soit rendue par le juge Thomas Davis en matinée.

Dans leur requête déposée vendredi dernier, les Atikamekw réclamaient l’arrêt immédiat des travaux pour protéger une vaste portion de leur territoire, parce que le gouvernement a autorisé l’émission d’un permis en juillet sans qu’ils soient consultés ou accommodés.

«Le juge a reconnu qu’il n’y avait pas eu de consultation», s’est réjoui M. Awashish.

Le conseil de bande soutient que le déboisement met en péril l’exercice des droits ancestraux de la famille Weizineau plus particulièrement, sur le territoire qui lui a été accordé. Le plan 2017-2018 prévoit un «déboisement considérable», soit 200 000 mètres cubes de bois, ce qui perturberait les habitats fauniques et ferait perdre la possibilité de faire de la chasse et de la trappe pour au moins 40 à 50 ans, ont-ils fait valoir.

Le juge Davis a estimé que le préjudice subi par la famille Weizineau et la communauté était plus grand que celui subi par l’entreprise en cas de cessation des activités de déboisement, a expliqué le chef Awashish.

Maintenant que les travaux ont été interrompus, les Atikamekw veulent être entendus sur le fond de l’affaire, c’est-à-dire la mise en place par le ministère des Forêts d’un «plan spécial de récupération d’un chablis» (un ensemble d’arbres déracinés), à l’origine de ces opérations de coupe.

Ils réclament l’annulation de ce plan spécial. «Qu’est-ce qu’on entend par chablis? s’est interrogé M. Awashish. Est-ce que ce plan spécial est vraiment approprié?»

Le gouvernement Couillard a refusé de commenter l’affaire, mais a confirmé qu’il y aura des échanges avec les Atikamekw. La porte-parole du ministre des Forêts Luc Blanchette, Gabrielle Fallu, a dit en entrevue que «des pourparlers vont se faire, mais pour l’instant, moi je ne vous donne pas plus de commentaires».

Réaction de Rémabec

Rémabec a pour sa part réagi à la décision judiciaire en fin d’après-midi. Par voie de communiqué, l’entreprise a souligné que le juge ne lui avait adressé «aucun reproche», mais remettait plutôt en cause «la conduite du Ministère des Forêts qui devait, selon le tribunal, consulter la Bande avant d’ordonner les opérations forestières».

Rémabec fait aussi valoir que le ministère l’avait obligée à procéder à la récolte du bois par ce plan spécial qui «visait du bois lourdement endommagé par les vents violents qui ont sévi dans ce secteur à l’automne 2015».

Cet arrêt des opérations cause «des inconvénients et dommages importants» et l’entreprise pourrait déposer une poursuite contre le gouvernement pour les pertes encourues, a fait savoir le président et chef de l’exploitation, Réjean Paré.

Greenpeace

Greenpeace Canada a salué la décision rendue par la Cour supérieure. Dans un communiqué, le responsable de la campagne Forêt dans cette organisation écologiste, Olivier Kolmel, a déclaré que «notre gouvernement doit prendre son devoir de consultation au sérieux avant d’accorder des autorisations de coupes forestières aux compagnies. Il n’y a eu ni consultation, ni consentement, pour ces coupes au coeur du territoire des Atikamekw. C’est absolument inacceptable.»

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