IA: un laboratoire de Facebook à Montréal
MONTRÉAL — Le réseau social Facebook a décidé de miser sur l’expertise montréalaise dans le secteur de l’intelligence artificielle dans le but de relever le niveau de conversation entre l’homme et la machine.
Après les géants Google et Microsoft, l’entreprise californienne a endossé l’écosystème de Montréal en confirmant vendredi l’implantation d’un laboratoire de recherche qui sera dirigé par la professeure Joëlle Pineau, qui codirige le Reasoning and Learning Lab de l’Université McGill.
Séduite par le «bassin de talent» local, la société de Melno Park, dans la baie de San Francisco, souhaite profiter de l’expertise de Mme Pineau dans l’apprentissage par renforcement, soit le dialogue avec les machines, explique le directeur de la recherche en intelligence artificielle chez Facebook, Yann LeCun.
«Nous désirons développer des systèmes avec lesquels nous pouvons dialoguer ou développer des assistants virtuels qui puissent nous aider dans la vie de tous les jours, a-t-il dit au cours d’un entretien. Pour l’instant, ces systèmes sont très stupides.»
Après Menlo Park, Paris et New York, Montréal devient la quatrième ville à faire partie du Facebook Artificial Intelligence Research (FAIR) — qui se spécialise dans la recherche fondamentale.
Les travaux réalisés par les quatre laboratoires pourraient être récupérés par la division de la recherche appliquée du réseau social afin d’améliorer différentes facettes des applications offertes aux utilisateurs.
«Ultimement, le but est de pouvoir développer des machines suffisamment intelligentes afin qu’elles puissent faire preuve de bon sens, a dit M. LeCun. Nous voulons trouver des moyens de rendre ces discussions avec les machines beaucoup moins frustrantes qu’elles ne le sont à l’heure actuelle.»
L’annonce a été effectuée en grande pompe devant plusieurs dizaines de personnes, notamment en présence du chef de la technologie de Facebook, Mike Schroepfer. Les trois ordres de gouvernement, dont le premier ministre Justin Trudeau, étaient sur place.
Il s’agit d’un troisième engagement de taille pour Montréal. Google a également ouvert un centre de recherche dans la métropole. En début d’année, Microsoft — qui a mis la main sur l’entreprise de démarrage Maluuba — avait manifesté sa volonté de doubler la taille du bureau montréalais de l’entreprise.
Trois fois plus de scientifiques
Situé à proximité du Centre Bell, le laboratoire montréalais de Facebook compte actuellement une dizaine de personnes — dont quatre étudiants. À terme, sa taille devrait tripler pour être similaire à ceux de New York, Paris et Menlo Park.
Toronto a été considérée, a précisé M. LeCun, ajoutant toutefois que la Ville-Reine n’avait pas investi de manière aussi agressive que Montréal dans l’intelligence artificielle au cours des dernières années.
«Nous allons apporter une complémentarité (aux autres laboratoires), a expliqué Mme Pineau, au cours d’un entretien. L’apprentissage par renforcement est un domaine dans lequel l’équipe du FAIR est moins spécialisée. Il y a une volonté de développer des projets plus substantiels.»
La chercheuse, qui partagera son temps à parts égales entre Facebook et McGill, affirme que les discussions avec le réseau social à propos du laboratoire montréalais ont débuté il y a quelques mois.
Même si elle vient de s’associer à un géant technologique, Mme Pineau ne croit pas qu’elle bénéficiera d’une moins grande latitude dans ses recherches.
«Selon moi, cela ouvre des portes sur le type de recherches que je peux effectuer, a-t-elle dit. Nous avons accès à différents types d’infrastructures en plus d’avoir le plaisir de travailler avec davantage de chercheurs senior.»
Pour combler les postes de scientifiques à court terme, il sera possible de recruter au Québec, croit Mme Pineau. À plus longue échéance, il faudra toutefois se tourner vers l’international, estime-t-elle.
M. LeCun et Mme Pineau espèrent également que l’expertise de Montréal dans le secteur de l’intelligence artificielle incitera des étudiants étrangers à non seulement venir étudier dans la métropole, mais que ceux-ci choisiront d’y rester au terme de leur parcours académique.
En plus de son laboratoire montréalais, Facebook a également l’intention d’injecter 7 millions $ dans différentes institutions, dont l’Institut des algorithmes d’apprentissage de Montréal, dirigé par le professeur Yoshua Bengio, de l’Université de Montréal.