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Les médias doivent se réveiller, selon une experte

Photo: Archives Métro
Vicky Fragasso-Marquis et Mick Côté, La Presse canadienne - La Presse Canadienne

WASHINGTON — Alors que le «début de la fin» de l’ère des ordinateurs et des téléphones intelligents est proche, une spécialiste du domaine numérique exhorte les médias à s’impliquer dans les nouvelles technologies qui sont présentement développées par une poignée de géants des technologies, comme Google et Amazon.

Vous traversez une intersection alors que le feu de circulation est au rouge. Votre visage et votre posture sont aussitôt reconnus par un programme sophistiqué. Une photo de vous prise par la machine est alors affichée en public pour vous faire honte et décourager d’autres piétons d’adopter le même comportement. Ceci n’est pas de la science-fiction; c’est ce qui se passe dans certains endroits en Chine, un pays qui investit énormément pour développer les nouvelles technologies.

C’est l’un des exemples qu’a mentionné Amy Webb, une experte des nouvelles technologies et fondatrice du Future Today Institute qui a fait un discours percutant, samedi, devant des centaines de journalistes d’un peu partout dans le monde réunis à Washington pour la conférence annuelle de l’Online News Association.

Mme Webb voulait ainsi faire réagir les journalistes et convaincre les médias de s’impliquer activement dans l’élaboration des nouvelles technologies, qui sont en ce moment sous le contrôle d’entreprises privées telles que Google, Amazon, Apple, Microsoft et des entreprises chinoises, comme Megvii.

Au-delà de la concentration de l’avancement technologique entre quelques mains, le problème est que ces entreprises n’ont pas nécessairement au sommet de leurs priorités les idéaux démocratiques défendus par les médias de masse. C’est pourquoi, selon cette spécialiste, il est plus que nécessaire que ceux-ci concluent des partenariats avec ces géants des technologies pour mieux contrôler les informations qui seront consommées par les citoyens du futur, mais aussi s’impliquer eux-mêmes afin de développer des modèles d’affaires qui seront encore valables dans ces environnements de l’avenir.

Par exemple, dans quelques années, les gens n’auront qu’à parler à une machine pour trouver des réponses à leurs questions au lieu de chercher sur un moteur de recherche par écrit, fait valoir Amy Webb. Mais dans ce cas, comment sera-t-il possible alors de vérifier les sources de ces réponses si celles-ci ne sont pas affichées? Et comment les médias arriveront-ils à monnayer leurs informations dans ce nouvel environnement?

Les entreprises investissent beaucoup aussi dans la reconnaissance faciale et corporelle, comme le témoigne l’exemple chinois. Et ce n’est que la pointe de l’iceberg; par exemple, d’autres machines ont été conçues pour reconnaître les visages de gens homosexuels et hétérosexuels ou pour créer des portraits robots complexes et quasi identiques à des individus qui n’ont fourni rien de plus qu’un soupçon d’ADN.

Dans un scénario optimiste, les technologies pourraient être utiles aux journalistes pour remplir leur mandat, mais s’ils ne s’impliquent pas, elles pourraient leur nuire profondément et affaiblir la démocratie, déplore la spécialiste.

Cette dernière exhorte les médias de s’adapter aux changements du monde numérique plutôt que de simplement les adopter à la pièce.

Sondage

Mme Webb s’est dite horrifiée des résultats d’un sondage du Future Today Institute qu’elle a fondé et qui a révélé samedi, que plus de 69 pour cent des travailleurs des médias ne surveillent pas les nouvelles tendances technologiques, ni comment celles-ci auront un impact sur leur milieu. De plus, 58 pour cent d’entre eux se projettent rarement dans l’avenir pour imaginer où ils seront dans 10 ou 20 ans.

Lors de sa conférence, l’experte a aussi recommandé une démocratisation de la distribution de nouvelles et de l’accès à internet d’une manière plus globale afin de permettre à tout le monde de s’informer sans interférence. Plusieurs pays développent actuellement de nouvelles réglementations afin de contrôler le fonctionnement d’internet.

L’Allemagne demande la suppression de contenu haineux sur les médias sociaux. L’Europe force le géant Google de faire disparaître certaines pages lorsque demandé. De son côté, le Canada contrôle l’affichage de contenu piraté dans les résultats de recherche.

Partie de bonnes intentions, cette division du web en «Splinterwebs» crée des différences géographiques dans la prolifération de l’information, ce qui fragilise le web, et pourrait empêcher la distribution libre de l’information.

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