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Guy Ouellette se retire du caucus libéral

Caroline Plante, La Presse canadienne - La Presse Canadienne

QUÉBEC — Le député Guy Ouellette a fait savoir jeudi qu’il se retirait du caucus du Parti libéral du Québec (PLQ) jusqu’à ce que le Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP) se prononce sur les suites de son arrestation effectuée la veille. Son nom n’apparaît déjà plus sur le site web du parti.

C’était la bonne chose à faire dans les circonstances, a déclaré le premier ministre Philippe Couillard, qui a choisi d’interrompre une tournée du Grand Nord québécois pour être présent au caucus et à la période de questions jeudi matin.

«Ça nous surprend, ça nous attriste, mais ça ne nous fait pas dévier du plan, a-t-il affirmé. C’est un choc pour tout le monde, je pense, pour l’ensemble de la députation, je pense même pour les partis d’opposition.»

Selon toute vraisemblance, Guy Ouellette, un ancien policier de la Sûreté du Québec âgé de 65 ans, a été arrêté par l’Unité permanente anticorruption (UPAC) en lien avec les fuites dans l’enquête Mâchurer qui s’attarde au financement du Parti libéral à l’époque où il était dirigé par Jean Charest.

La résidence de Québec du député de Chomedey a d’ailleurs fait l’objet d’une longue perquisition policière mercredi soir.

Selon Radio-Canada, les policiers de l’UPAC auraient utilisé un subterfuge pour procéder à l’arrestation de M. Ouellette. Ils l’auraient attiré dans un endroit situé en banlieue de Québec mercredi après-midi en se faisant passer pour le policier Richard Despatie, l’un des deux policiers qui ont été visés par un mandat de perquisition plus tôt en journée.

Aucune accusation contre Guy Ouellette

L’UPAC a confirmé avoir procédé à une arrestation, sans toutefois identifier la personne concernée, car aucune accusation n’a été déposée à ce stade-ci.

Dans un communiqué laconique, l’UPAC affirme que son enquête vise notamment «de possibles infractions d’abus de confiance et d’entrave à la justice».

Une série de perquisitions ainsi qu’une arrestation en cours d’enquête ont été réalisées, dans le but de «sécuriser des éléments de preuve ainsi que pour empêcher que les infractions se continuent ou se répètent».

L’équipe mixte affectée à l’enquête, formée des membres de plusieurs corps de police, a exécuté six mandats de perquisition et rencontré une dizaine d’individus au courant de la journée du 25 octobre.

Les perquisitions, certaines dans la région de Montréal et d’autres dans la région de Québec, se sont déroulées jusqu’à tard mercredi soir.

Par ailleurs, les enquêteurs analyseront la preuve recueillie avant de soumettre le dossier au DPCP qui déterminera s’il y a lieu de porter des accusations.

«Pour des considérations juridiques, le commissaire à la lutte contre la corruption ne fera aucun commentaire à cette étape-ci de l’enquête», conclut l’UPAC dans son communiqué.

Khadir appuie Ouellette

Abasourdis, sous le choc, des députés du Parti québécois (PQ), de la Coalition avenir Québec (CAQ) et de Québec solidaire (QS) ont tour à tour louangé le travail de M. Ouellette à la tête de la Commission des institutions.

M. Ouellette a consacré toute sa vie à la recherche de la vérité, selon le porte-parole péquiste en matière de sécurité publique, Pascal Bérubé.

«Il a pris des risques importants dans sa vie comme enquêteur de police, il a fait un travail exemplaire comme président de commission», a-t-il affirmé. «Tout le monde connaît Guy», a renchéri le leader parlementaire de la CAQ, François Bonnardel.

Le député de QS, Amir Khadir, a dit carrément appuyer M. Ouellette, qui, d’après lui, serait le héros dans toute cette affaire, puisqu’il était possiblement un lanceur d’alerte.

«Guy Ouellette doit savoir ce matin qu’il a mon respect, qu’il a mon appui, a dit M. Khadir. Je n’ai aucune raison de douter de son intégrité, de sa probité.»

Les partis d’opposition ont tous exigé des explications de la part de l’UPAC. Selon eux, l’UPAC consacre plus de temps à essayer de colmater des fuites qu’à épingler les véritables coupables dans le «scandale du financement du PLQ».

Au printemps dernier, les médias de Québecor ont obtenu d’une source des documents confidentiels de l’UPAC qui traitaient de l’enquête Mâchurer. On y apprenait entre autres que l’ancien premier ministre Jean Charest, ainsi qu’un ex-collecteur de fonds libéral, Marc Bibeau, étaient dans la mire des enquêteurs.

Le commissaire de l’UPAC, Robert Lafrenière, a dû maintes fois se défendre au cours des derniers mois de se traîner les pieds dans cette enquête.

«Il y a de sérieuses questions à poser sur la priorité des dossiers à l’UPAC», a affirmé M. Khadir.

«L’UPAC, son mandat, c’est autre chose que de faire la chasse aux sources. Le mandat de l’UPAC, c’est de nous ramener les filous, les bandits qui ont orchestré le financement illégal du Parti libéral», a-t-il ajouté.

L’UPAC est en train de faire «diversion», selon le député solidaire.

L’indépendance de l’UPAC remise en cause

Le chef de la CAQ, François Legault, a amené le débat en Chambre, affirmant que la confiance des Québécois envers l’UPAC était «ébranlée».

Il a demandé au premier ministre Couillard de «s’engager dès aujourd’hui à ce que le directeur de l’UPAC soit nommé par un vote du deux tiers de l’Assemblée nationale».

Robert Lafrenière a été nommé, puis récemment reconduit dans ses fonctions, par le gouvernement libéral.

«On va enlever tous ceux qui ne sont pas d’accord avec nous autres puis on va les mettre dehors, a ironisé M. Couillard. C’est ça, la fonction publique qu’il veut avoir.»

Par ailleurs, le premier ministre a fait savoir que l’étude du projet de loi 107 allait continuer. La mesure législative, qui propose de faire de l’UPAC un corps policier à part entière, devait passer l’étape de l’adoption du principe jeudi.

Guy Ouellette ne présidera plus la commission chargée de cette étude, mais «les motifs du projet de loi demeurent à mon avis solides», a affirmé M. Couillard.

«On n’est jamais déstabilisé, parce que notre rôle, c’est de gouverner. Et des fois, on gouverne dans certaines tempêtes. Alors, il y a des journées qui sont plus agitées que d’autres», a aussi tempéré le ministre de la Sécurité publique, Martin Coiteux.

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Qui est Guy Ouellette?

– Âgé de 65 ans

– Ex-enquêteur de la Sûreté du Québec, spécialiste du crime organisé et de la guerre aux motards

– Membre de l’escouade Carcajou

– Élu pour la première fois en 2007, mais n’a jamais accédé au conseil des ministres

– Président de la commission des institutions à l’Assemblée nationale

– A récemment forcé la main du commissaire à l’UPAC, Robert Lafrenière, ainsi que des représentants de la Sûreté du Québec, pour témoigner sur le projet de loi 107

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Précédent à l’Assemblée nationale

Selon des recherches effectuées par La Presse canadienne, un autre député de l’Assemblée nationale a déjà été arrêté en cours de mandat. Il s’agit de Gilles Grégoire, ancien député péquiste de Frontenac (1976-1985). Il a été reconnu coupable en 1983 d’avoir eu des relations sexuelles avec des jeunes filles d’âge mineur. Il a été condamné à une peine de deux ans moins un jour de prison, et purgera quelques mois à la prison d’Orsainville. Il reviendra à l’Assemblée nationale pour siéger après avoir purgé sa peine. M. Grégoire est mort en 2006, à l’âge de 80 ans.

Par ailleurs, au fédéral, l’élu communiste québécois Fred Rose a été condamné à la prison en 1946 pour «espionnage» au profit de l’Union soviétique. Il sera libéré après six ans de prison. M. Rose s’exile alors en Pologne où il finira ses jours. Le gouvernement canadien ne lui donnera jamais le droit de revenir au pays.

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