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Ottawa: un site web pour suivre les promesses

Codie McLachlan / La Presse Canadienne Photo: Codie McLachlan / La Presse Canadienne
Mélanie Marquis, La Presse canadienne - La Presse Canadienne

OTTAWA — Des 364 missions confiées par Justin Trudeau à ses ministres, 67 ont été «complétées totalement» ou «complétées modifiées» et trois ne sont «plus envisagées». D’autres, comme la promesse d’équilibrer le budget en 2019-2020, sont «en cours — avec défis».

C’est le portrait qu’a brossé mardi le Bureau du conseil privé (BCP), le ministère du premier ministre, au jour du lancement d’un site web visant à rendre compte des progrès du gouvernement libéral, qui vient de franchir le cap de la mi-mandat.

En collaboration avec les ministères, le BCP a par ailleurs établi que le gouvernement était «en voie» de livrer 218 engagements — ce qui peut notamment vouloir dire qu’un projet de loi a été déposé, ou encore que la date butoir pour livrer la marchandise n’est pas arrivée.

En conférence de presse, mardi, à Ottawa, un haut fonctionnaire du BCP a reconnu que la façon d’évaluer le progrès de certains engagements des lettres de mandat ministérielles comportait une part de subjectivité et pourrait faire l’objet de discussions chez les Canadiens.

L’appréciation de l’avancement de la promesse d’atteindre l’équilibre budgétaire en 2019-2020, qui a été classée dans la catégorie «en cours — avec défis», en tout cas, a fait s’esclaffer les journalistes qui assistaient à la séance d’information technique.

Le représentant du BCP a plaidé qu’il ne fallait pas voir ce site internet comme un «bulletin de la fonction publique» à l’intention du gouvernement — le politique est, après tout, impliqué dans le processus — ou encore une «évaluation du travail des ministres».

Les éléments y figurant ont été extraits des lettres de mandat ministérielles rédigées par Justin Trudeau à l’intention de son cabinet; il ne s’agit donc pas d’un «outil de suivi» des promesses contenues dans la plateforme électorale qui a fait élire les libéraux en 2015, a-t-il précisé.

Un manque de clarté et de transparence, selon un professeur

Le «Polimètre Trudeau» de l’Université Laval recense de son côté 353 promesses électorales (110 réalisées, 138 en cours, 93 en suspens et 12 rompues). Le coordonnateur de l’outil, le professeur François Pétry, constate une certaine adéquation entre son outil et le site web gouvernemental.

En revanche, il estime que le site internet du gouvernement «manque de clarté et de transparence» et qu’il a été élaboré selon une méthodologie «obscure et apparemment baisée», faisant notamment remarquer «l’absence d’une catégorie de verdict d’engagements rompus».

Par exemple, «l’engagement de promulguer la réforme électorale (codé comme rompu dans le Polimètre à partir du moment où Justin Trudeau a annoncé que son gouvernement enterrait ladite réforme) n’est classé nulle part, autant que j’ai pu déterminer», a-t-il écrit dans un courriel envoyé mardi à La Presse canadienne.

Le professeur Pétry, s’exprimant à titre personnel, doute que le site gouvernemental puisse donc «être réellement un organisme indépendant» même si le BCP «garde une certaine distance» vis-à-vis du bureau du premier ministre, notant qu’«en ce qui concerne l’évaluation de la tenue des promesses du gouvernement, on ne peut pas être à la fois juge et partie».

Un exercice non contraignant

Le fonctionnaire a argué que le site du fédéral illustrait à quel point le gouvernement est «ouvert et transparent» et va là où «aucun autre gouvernement national» n’est allé en publiant les lettres de mandat, puis une reddition de comptes à l’aune des lettres.

Le site web doit être mis à jour aux deux ou trois semaines environ, a-t-il indiqué, en spécifiant qu’aucun argent additionnel n’a été injecté pour mener à bien ce processus qui avait cours sous les précédents gouvernements, mais derrière des portes closes.

Le haut fonctionnaire du BCP a d’autre part signalé mardi qu’il n’était pas prévu d’enchâsser la pratique dans une loi. L’exercice n’est donc pas contraignant ni pour le gouvernement libéral ni pour les prochains gouvernements à Ottawa.

Par voie de communiqué, le premier ministre Justin Trudeau a déclaré que son gouvernement souhaite «que les Canadiens connaissent notre rendement avec précision et qu’ils nous aident à faire progresser les dossiers qui leur importent le plus».

Cette démarche semble s’inspirer de la philosophie de «deliverology» à laquelle le cabinet libéral a été initié par Sir Michael Barber, un Britannique ayant oeuvré au début des années 2000 auprès de Tony Blair, l’ancien premier ministre du Royaume-Uni.

État des engagements

66 sont «complétés totalement» (18,1 pour cent)

Instaurer l’Allocation canadienne pour enfants, signer une entente en santé avec les provinces, ratifier l’accord de Paris, réduire l’impôt pour la classe moyenne, augmenter les impôts sur le 1 pour cent supérieur des salariés, rétablir le crédit d’impôt pour contribution à un fonds de travailleurs, donner suite à la décision de la Cour suprême du Canada au sujet de l’aide médicale à mourir, rétablir et augmenter le financement annuel de CBC/Radio-Canada, réinstaurer le formulaire long du recensement, etc.

1 est «complété modifié» (0,3 pour cent)

Accueil des réfugiés syriens — «bien que le gouvernement ait atteint et dépassé ses cibles, il l’a fait deux mois plus tard que l’échéancier prévu au départ, afin d’effectuer les vérifications de sécurité, les examens médicaux et les préparatifs de réinstallation nécessaires».

218 sont «en cours ou en voie» d’être complétés (59,9 pour cent)

Légaliser et réglementer la marijuana, renouveler les engagements du Canada à l’égard des opérations de paix des Nations unies, réviser le système de justice pénale, continuer de réduire le rapport entre la dette fédérale et le produit intérieur brut, passer en revue les processus canadiens d’évaluation environnementale, promouvoir la célébration du 150e anniversaire du Canada, élargir le programme d’initiation au camping, etc.

13 sont «en cours — avec défis» (3,6 pour cent)

Équilibrer le budget en 2019-2020, améliorer les infrastructures pour les communautés autochtones, notamment en matière de logement, investir en éducation pour les Premières Nations, donner suite aux recommandations de la Commission de vérité et de réconciliation, lancer un appel d’offres ouvert et transparent pour le remplacement du chasseur CF-18, etc.

3 ne sont «plus envisagés» (0,8 pour cent)

Établir un comité parlementaire sur la réforme électorale pour étudier des options alternatives pour les élections (remplacement du système majoritaire uninominal à un tour), fournir une pause de 12 mois de cotisations à l’assurance-emploi aux entreprises qui embauchent de jeunes travailleurs dans des postes permanents, exempter entièrement de la TPS tous les nouveaux investissements en capital dans le logement locatif abordable.

21 sont des «engagements permanents» (5,8 pour cent)

Promouvoir les droits de la personne, l’égalité entre les sexes, le pluralisme pacifique et le respect de la diversité internationalement, maintenir des relations constructives et renforcer les échanges commerciaux avec les États-Unis, faire progresser le programme commercial progressif du Canada, veiller à ce que les Forces armées canadiennes aient le matériel dont elles ont besoin, etc.

42 n’ont «pas encore de statut» (11,5 pour cent)

Ces engagements énoncés dans les lettres de mandat publiées en octobre 2017, au dernier remaniement ministériel, n’ont pas encore reçu de statut.

Source: www.canada.ca/resultats, en date du 14 novembre 2017

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