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Taxation de la marijuana: des leçons incomplètes à tirer d’États américains

Photo: Marcio Jose Sanchez

TORONTO — Pour le propriétaire de Uncle Ike’s, l’un des plus importants commerçants de marijuana à Seattle, les adolescents qui entrent dans son magasin pour tenter d’obtenir du pot constituent l’un des indices les plus clairs que le marché illégal perd du terrain.

«Les mineurs tentent de se faufiler dans notre magasin avec de fausses cartes d’identité à partir des écoles secondaires locales, parce qu’il n’y a plus de vente de pot dans les écoles», a soutenu le propriétaire Ian Eisenberg.

Éliminer le marché illicite est l’un des objectifs majeurs du gouvernement du Canada à l’approche de l’échéance de juillet 2018 pour la légalisation de la marijuana à des fins récréatives — laissant peu de temps aux politiciens pour définir les modalités exactes de la vente, de la tarification et de la taxation du cannabis.

Comme l’a appris l’État de Washington, qui a légalisé la vente de la marijuana à des fins récréatives en 2014, l’établissement des prix et des taxes peut influencer grandement la part du commerce illicite.

L’État avait instauré initialement une taxe de 25 pour cent sur les ventes des producteurs aux transformateurs, une autre taxe de 25 pour cent sur les ventes des transformateurs aux détaillants, et puis une taxe de 25 pour cent des ventes des détaillants aux clients.

Les coûts élevés pour les consommateurs, combinés à un manque de marijuana sur le circuit légal, avaient alimenté le marché illicite, selon des analystes.

À la lumière de ces observations, le gouvernement a remplacé ce système par une taxe d’accise combinée de 37 pour cent sur les prix de vente de la marijuana, mais la question demeure en suspens dans un secteur encore émergent à savoir si cela aide à éliminer les ventes illicites.

Les États américains qui ont déjà légalisé les ventes de marijuana à des fins récréatives — comme Washington, qui a un taux de taxation effectif évalué à 50 pour cent, et l’Alaska, où le taux tourne autour de 20 pour cent — représentent les rares endroits pouvant permettre de tirer des leçons, quoiqu’incomplètes.

La proposition du gouvernement du Canada semble se situer dans un territoire intermédiaire.

La proposition, telle que présentée le mois dernier par le député libéral Bill Blair, imposerait une taxe d’accise au plus élevé entre 1 $ par gramme ou 10 pour cent du prix final de détail — en plus d’autres leviers, tels que les taxes de vente au fédéral et au provincial.

Les objectifs d’une politique de légalisation de la marijuana — incluant la mise à l’écart du marché du crime organisé, la réduction de la consommation par les mineurs ou l’augmentation des revenus provenant de la taxation — viennent souvent en contradiction, a par ailleurs souligné Beau Kilmer, codirecteur du centre RAND de recherche sur les politiques liées à la drogue en Californie, où les ventes de marijuana récréative doivent démarrer le 1er janvier.

La meilleure façon d’éliminer les ventes illicites est d’inonder le marché avec une quantité imposante de marijuana légale et une faible réglementation dans le but de faire baisser les prix et d’attirer les consommateurs, a fait valoir M. Kilmer.

Mais agir ainsi risque d’encourager la consommation, particulièrement au sein de la population plus jeune qui accorde encore plus d’importance aux prix des produits, a-t-il ajouté.

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