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Sondage: les mairesses se font harceler

Jocelyne Richer, La Presse canadienne - La Presse Canadienne

QUÉBEC — Le harcèlement, la discrimination et l’intimidation sont bien plus souvent le quotidien des mairesses que des maires.

C’est ce que révèle un sondage mené au cours des derniers mois par la Fédération québécoise des municipalités (FQM) auprès de 679 élus municipaux, hommes et femmes, et rendu public jeudi, dans le cadre de la commission parlementaire qui se penche sur la place des femmes en politique.

Ce coup de sonde laisse clairement entendre qu’il reste bien du travail à faire pour que le palier municipal se montre plus accueillant envers les femmes, obligées de subir jour après jour des situations pénibles dans leur travail à l’hôtel de ville.

Le problème aurait pris une telle ampleur que la FQM sent le besoin d’appeler Québec à la rescousse. La fédération demande au gouvernement Couillard de créer une structure destinée à recevoir les plaintes des élus municipaux, hommes et femmes, mais surtout des femmes beaucoup plus nombreuses à subir des violences psychologiques dans l’exercice de leurs fonctions, selon les résultats du sondage.

«Les problèmes d’exclusion, de discrimination, de harcèlement et d’intimidation affectent toujours beaucoup plus les femmes», a déploré la porte-parole de la FQM et mairesse suppléante de Saint-Casimir, Danielle Duchesneau DuSablon, venue témoigner en commission parlementaire et rendre du compte du sondage.

Écart hommes-femmes marqué

Selon les témoignages recueillis auprès des élus municipaux, l’écart est marqué entre hommes et femmes, atteignant entre 12 et 15 points, lorsqu’il est question de situations vécues de harcèlement, de discrimination ou d’intimidation.

De plus, bien plus souvent que les maires, les mairesses manquent de confiance en leurs capacités et avouent ne pas se sentir à la hauteur de la situation. L’écart entre hommes et femmes atteint 17 points à ce chapitre.

En prenant connaissance de ces données, la députée libérale de Richmond, Karine Vallières, qui supervise les travaux de la commission, a dit craindre de faire «une crise d’urticaire», à force d’entendre encore et encore que les femmes boudent la politique parce qu’elles manquent de confiance en elles et éprouvent un sentiment d’incompétence chronique.

«Il faut que ça cesse», s’est exclamée la mairesse de Saint-Georges-de-Clarenceville et autre porte-parole de la FQM, Renée Rouleau, appelant à un changement de mentalités.

À l’heure actuelle, seulement 20 pour cent des municipalités québécoises sont dirigées par une femme.

Plus tôt, la porte-parole de l’autre regroupement municipal, Maude Laberge, de l’Union des municipalités du Québec (UMQ), a fait elle aussi, après plusieurs autres, le constat qu’il était encore, en 2017, plus difficile pour une femme que pour un homme de faire sa place en politique, notamment au palier municipal. Il y a encore aujourd’hui plus d’obstacles de toutes sortes et elle doit être «deux fois plus compétente qu’un homme», a-t-elle déploré.

Le manque de confiance en soi, le sentiment d’incompétence, la difficile conciliation travail-famille, le traitement des médias prompts à présenter les femmes en «hystériques», le malaise devant le côté compétitif de la politique, font partie des obstacles identifiés par les intervenantes pour expliquer l’éloignement des femmes des hôtels de ville.

La parité obligatoire

Selon l’auteure féministe et journaliste Pascale Navarro, venue elle aussi apporter son témoignage, il ne faut pas blâmer les femmes pour leur apparent manque d’intérêt ou leur manque d’implication en politique, mais plutôt les institutions politiques et parlementaires, pour leur manque de courage à «provoquer le changement» souhaité.

«Ne pas prendre de mesures pour s’assurer que les femmes font partie de la vie politique et publique à parts égales avec les hommes reconduit une culture qui les exclut de l’exercice de la vie démocratique», a-t-elle fait valoir, dénonçant une discrimination systémique et millénaire dont les femmes continuent de faire les frais.

Elle est donc d’avis que la situation ne changera pas, à moins que les lieux de pouvoir — partis politiques, gouvernement, Assemblée nationale — «s’obligent ouvertement à la parité femmes-hommes».

«Qu’ils publicisent cette volonté, qu’ils la décrètent obligatoire, qu’ils légifèrent en la matière», a-t-elle réclamé, revendiquant notamment l’adoption d’une loi sur la parité.

Après avoir entendu plusieurs intervenants pendant deux jours, la commission remettra un rapport et formulera des recommandations, qui pourraient être destinées aux partis, au gouvernement ou à l’Assemblée nationale. Le mandat de Mme Vallières consiste à proposer des mesures concrètes, applicables à court terme, pour favoriser l’augmentation du nombre de candidatures féminines en politique active.

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