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Le Québec contribue à former des juges chinois

Gavel Photo: Archives Métro
Caroline Plante, La Presse canadienne - La Presse Canadienne

QUÉBEC — Le Québec fait avancer les droits de la personne en Chine, en offrant une formation à des juges chinois.

La plus grande université du Québec offre aux juges chinois de venir étudier les fondements du droit québécois, c’est-à-dire la combinaison de common law et de droit civil, et l’administration de la justice.

La formation des juges a ainsi permis de rendre les tribunaux en Chine plus transparents.

Le Québec est un «superbe laboratoire», a affirmé d’emblée le vice-recteur aux affaires internationales de l’Université de Montréal, Guy Lefebvre. L’établissement entretient des liens avec la Chine, un pays de tradition civiliste, depuis 20 ans.

Province disposant d’un code civil, fondé sur le Code Napoléon français, et transigeant presque exclusivement avec des pays sous la common law, le Québec sert en quelque sorte de modèle pour la Chine, croit-il.

«Quand ils rédigent, par exemple, une loi sur les valeurs mobilières, qui est plus d’origine anglo-saxonne, nous on est capable de dire comment on réussit à travailler dans ces systèmes-là», a affirmé M. Lefebvre en entrevue téléphonique.

Alors que la Chine procède à une refonte majeure de son système législatif, et pourrait bientôt introduire des procès avec jury, le Québec continue d’initier des juges chinois à son système juridique et leur offre des stages à la cour et en cabinet, «en ne disant pas que notre modèle est meilleur».

Selon M. Lefebvre, il y a quelque chose d’admirable dans le modèle millénaire chinois, où «le collectif est plus important que l’individu», et où la recherche de compromis est préférable à l’affrontement au tribunal.

Or, il était nécessaire pour eux d’améliorer leurs règles notamment en matière d’expropriation et de propriété intellectuelle, ce qu’ils ont fait, et le Québec a pu inspirer, s’est-il félicité.

Les familles expropriées en raison d’immenses chantiers de construction sont dorénavant mieux indemnisées. La Chine, championne mondiale de la contrefaçon, se préparerait également à insérer les grands principes de la propriété intellectuelle dans son code civil.

Elle s’intéresse aussi à l’aide juridique. «Si c’est adopté par la Chine, on dira qu’on aura permis à la société d’évoluer, a expliqué M. Lefebvre. C’est comme ça qu’on contribue lentement, modestement, mais à long terme à changer les choses.»

Lorsque les Chinois viennent étudier au Québec, ajoute le vice-recteur, ils s’intéressent aux questions de mariages gais, de liberté de presse et de lutte à la corruption. Certains ont suivi les travaux de la commission Charbonneau.

L’Université de Montréal voit aujourd’hui plusieurs de ses diplômés occuper des postes prestigieux au sein des institutions en Chine.

En janvier dernier, le recteur de l’université, Guy Breton, a été reçu par le président de la Cour suprême de Chine, Zhou Qiang. Ils ont abordé la question de l’utilisation de l’intelligence artificielle dans les tribunaux.

«C’est dans l’action que l’on juge ce que l’on fait»

Lors de sa mission en Chine le mois dernier, le premier ministre Philippe Couillard s’était fait critiquer pour ne pas avoir abordé l’enjeu des droits de la personne avec ses interlocuteurs.

«Pour les Chinois, c’est beaucoup plus efficace de travailler dans l’action que d’insulter les gens sur la place publique», s’était-il défendu.

Le représentant du Québec en Chine, Jean-François Lépine, avait corroboré les dires du premier ministre, expliquant que «c’est dans l’action que l’on juge ce que l’on fait».

«Vous posez toujours la question des droits de l’homme en Chine et tout ça, et ce que l’on fait, c’est probablement le plus bel exemple de l’influence que les Québécois ont eu pour faire évoluer la question des droits de l’homme en Chine, a-t-il affirmé plus tard en entrevue téléphonique à La Presse canadienne. On a contribué à rendre les tribunaux mieux formés, plus transparents.»

Les deux hommes ont dit prévoir des bouleversements en Chine grâce à l’émergence de la classe moyenne, qui a un «pouvoir redoutable», selon M. Lépine.

«Ici, contrairement à ce que beaucoup de gens pensent, il y a une démocratie par le bas, il y a une pression à laquelle le gouvernement doit répondre de façon extrêmement importante», a-t-il affirmé.

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Quelques chiffres sur la relation Université de Montréal-Chine:

-Depuis l’automne 2014, 1811 étudiants chinois se sont inscrits à des programmes de l’université;

-L’UdeM est partenaire d’une cinquantaine d’universités chinoises;

-Depuis 2007, l’UdeM a diplômé plus de 400 étudiants chinois inscrits à son programme de maîtrise Droit des affaires dans un contexte de mondialisation;

-En 2017, elle a enregistré une augmentation des admissions de 31,7 pour cent au programme de baccalauréat du Centre d’études de l’Asie de l’Est.

Source: Université de Montréal

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