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Boissons sucrées alcoolisées: Québec intervient

Une portion individuelle de ces boissons peut contenir jusqu'à quatre consommations d'alcool. Photo: Josie Desmarais/Métro
Caroline Plante et Lia Lévesque, La Presse canadienne - La Presse Canadienne

La vente de boissons sucrées alcoolisées pourrait bientôt être interdite dans les épiceries et dépanneurs, mais elle sera permise dans les succursales de la Société des alcools du Québec (SAQ).

Québec intervient dans son champ de compétence face à ces boissons, afin d’en limiter l’accès pour les jeunes.

L’enjeu est revenu à l’avant-plan après le décès accidentel, le 1er mars dernier à Laval, d’une adolescente de 14 ans, Athena Gervais, qui aurait consommé une quantité indéterminée de ce type de boisson. Elle a été retrouvée morte dans un ruisseau derrière son école secondaire.

Mardi, le ministre de la Sécurité publique, Martin Coiteux, et la ministre déléguée à la Santé publique, Lucie Charlebois, ont proposé des amendements au projet de loi 170 sur la modernisation de la Loi sur les permis d’alcool.

Le gouvernement cherche ainsi à interdire la vente de boissons sucrées à base de malt de plus de 7 pour cent d’alcool dans les épiceries et dépanneurs. Cela ne vise pas les bières artisanales ou traditionnelles à forte teneur en alcool.

Particulièrement prisées par les jeunes, les boissons de type «FCKD UP» peuvent contenir jusqu’à 12 pour cent d’alcool, soit l’équivalent de quatre verres de vin par cannette.

Québec cherche aussi à accroître les pouvoirs d’intervention de la Régie des alcools, des courses et des jeux (RACJ) pour qu’elle puisse ordonner à un titulaire de permis de cesser la fabrication de boissons non conformes aux lois, et empêcher leur vente et distribution.

Enfin, le ministre Coiteux a indiqué vouloir revoir en profondeur le règlement sur la promotion, la publicité et les programmes éducatifs en matière de boissons alcooliques, pour qu’il précise notamment l’obligation de faire approuver les publicités diffusées dans les médias sociaux.

Le projet de loi 170 devrait être adopté incessamment. «C’est un temps de semaines, ce n’est pas un temps de mois», a déclaré M. Coiteux, en soulignant le caractère «trompeur» des boissons sucrées alcoolisées.

«Il semblerait que (les jeunes) ne sentent même pas qu’il y a de l’alcool là-dedans lorsqu’ils consomment. Alors, c’est un produit qui trompe, et cette tromperie-là, on veut la retirer des tablettes», a-t-il ajouté.

Un rapport de l’Institut national de santé publique (INSPQ), dont le gouvernement a obtenu copie le 6 mars dernier, indique qu’entre le 1er janvier et le 26 novembre 2017, 7055 personnes se sont présentées aux urgences pour une intoxication aiguë à l’alcool.

De ce nombre, 2232 étaient des jeunes âgés entre 12 et 24 ans. Près de 500 d’entre eux n’avaient pas l’âge légal de se procurer de l’alcool.

Le volume des ventes des produits les plus alcoolisés (au moins 11 pour cent d’alcool) a augmenté entre 2016 et 2017 de 316 pour cent, note également le rapport.

Le gouvernement Couillard a d’abord demandé aux commerçants de retirer volontairement ces boissons de leurs tablettes avant d’opter pour des amendements au projet de loi 170.

De passage à Montréal mardi matin, le premier ministre Philippe Couillard a rappelé que les gouvernements provinciaux peuvent faire un bout de chemin en la matière, en vertu de leur champ de compétence, mais qu’il appartient aussi au gouvernement fédéral de faire le sien.

«Franchement c’est quelque chose d’avoir sur les tablettes de nos dépanneurs des mélanges de sucre et d’alcool à haute concentration. On a vu l’horrible tragédie de cette jeune fille récemment, on ne veut pas en voir d’autres», a déclaré le premier ministre.

«La distribution, l’étiquetage, la publicité, l’autorisation légale même, tout ça relève de Santé Canada et je les enjoins à jouer également leur rôle», a-t-il ajouté.

La ministre fédérale de la Santé, Ginette Petitpas Taylor, est bien au fait du dossier, selon son attaché de presse, Thierry Bélair. «La ministre Petitpas Taylor a demandé à Santé Canada de prendre tous les moyens nécessaires pour contrer les risques posés par ces produits, y compris toute mesure réglementaire qui serait nécessaire, et ce, en consultation étroite avec le Québec», a-t-il indiqué.

Mesures bien accueillies

Mardi, l’organisme Éduc’alcool a accueilli favorablement les mesures proposées par le gouvernement Couillard. Son directeur général, Hubert Sacy, s’est d’abord réjoui que «la jeune Athena Gervais ne sera pas morte pour rien».

Mais, a-t-il dit, le gouvernement doit aussi imposer un prix minimum. «Les experts recommandent que le verre standard d’alcool soit vendu à un prix minimum qui tourne autour de 1,65 $. Donc, les Four LoKo et compagnie devraient coûter entre 6,30 $ et 7 $ et non pas 3,33 $», a-t-il affirmé.

Le Parti québécois (PQ) a quant à lui demandé au gouvernement de ne pas attendre la fin du processus d’adoption du projet de loi, et de retirer immédiatement les boissons sucrées alcoolisées des épiceries et dépanneurs.

«On le sait que c’est un risque, il y a eu un décès», s’est insurgé le député péquiste Sylvain Pagé.

Le chef de la Coalition avenir Québec (CAQ), François Legault, a dit qu’il s’agissait d’un pas dans la bonne direction. «Il faut se demander comment on distribue, puis si on doit distribuer ce genre de produits à haute teneur d’alcool mais sucrés, donc attirants pour les jeunes. Je pense qu’il faut tous se poser ces questions-là, mais je suis content de voir déjà les gestes qui ont été posés», a-t-il déclaré.

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