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Inde: Daniel Jean admet l'erreur du gouvernement

Justin Tang / La Presse Canadienne Photo: Justin Tang
Joan Bryden et Jim Bronskill, La Presse canadienne - La Presse Canadienne

OTTAWA — Le conseiller à la sécurité nationale de Justin Trudeau, Daniel Jean, a admis lundi que le gouvernement canadien avait fait une erreur en invitant un homme reconnu coupable de tentative de meurtre dans des événements publics qui ont eu lieu lors du séjour controversé du premier ministre en Inde.

Mais M. Jean a fait valoir qu’il y a eu par la suite une campagne de «désinformation coordonnée» relativement à cette erreur, et que c’est pour cette raison qu’il avait décidé d’intervenir auprès des journalistes.

Le conseiller du premier ministre témoignait lundi devant les membres du comité permanent de la sécurité publique et nationale des Communes, afin d’expliquer son rôle dans cette controverse qui a empoisonné le voyage officiel de M. Trudeau en Inde, et qui poursuit le gouvernement libéral depuis des semaines.

M. Jean est au coeur de ce débat: c’est lui qui, à titre de «source anonyme», a soufflé aux journalistes que des factions au sein du gouvernement indien avaient pu orchestrer la présence embarrassante, pour deux réceptions officielles, de Jaspal Atwal, un extrémiste sikh reconnu coupable d’avoir tenté d’assassiner un ministre indien en visite en Colombie-Britannique en 1986.

Jaspal Atwal a effectivement été photographié aux côtés de la femme du premier ministre, Sophie Grégoire, lors d’une première réception, à Mumbai. Son invitation pour la deuxième réception lui a été retirée lorsque l’affaire a éclaté au grand jour.

Lors d’une séance d’information accordée aux journalistes qui accompagnaient le premier ministre en Inde, Daniel Jean avait suggéré que des factions au sein du gouvernement indien voulaient embarrasser le premier ministre Trudeau et éviter que son homologue Narendra Modi soit trop amical avec ce gouvernement étranger accusé par certains d’afficher des sympathies à l’égard des extrémistes séparatistes sikhs.

De fausses informations en circulation

Lundi, M. Jean a reconnu qu’il n’y aurait pas eu de scandale si le député libéral Randeep Sarai n’avait pas demandé d’ajouter M. Atwal à la liste d’invités — ou si les noms avaient été bien examinés par le Bureau du premier ministre.

«C’était un faux pas. Ça n’aurait pas dû arriver», a-t-il avoué devant le comité.

Mais il a justifié ainsi l’analyse qu’il a offerte aux journalistes: «Il y avait des gens qui tentaient… de rendre ce faux pas beaucoup plus gros en fabriquant de fausses histoires et mon intervention a été faite pour démentir cela.»

Une fois que la nouvelle sur la présence de M. Atwal s’est éventée dans les médias, M. Jean dit avoir observé une campagne de désinformation. Il affirme avoir entendu notamment que l’individu en question faisait partie de la délégation canadienne, et que la Gendarmerie royale du Canada (GRC), le Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS) et le Haut-commissariat du Canada en Inde étaient informés de sa présence, mais qu’ils n’avaient rien fait.

Ces fausses informations provenaient de médias indiens et canadiens, a-t-il précisé. C’est ce qui l’a encouragé à parler aux journalistes.

«Maintenant, vous savez pourquoi j’ai intervenu comme fonctionnaire, parce que dans une situation comme ça, jamais un employé politique aurait pu être crédible pour dire comment cela s’est passé», a soutenu M. Jean.

«Dans le breffage avec les journalistes, nous avons été très clairs que nous ne savions pas qui étaient les acteurs, mais qu’il y avait définitivement des gens — et on a mis assez d’information pour démontrer ça — qui essayaient d’amplifier la mauvaise histoire. Je pense que les Canadiens avaient le droit de savoir.»

M. Jean n’a pas suggéré lundi que le gouvernement indien avait invité M. Atwal aux événements de Justin Trudeau, mais il a tenu à souligner que l’Inde avait retiré l’individu d’une liste noire qui l’empêchait d’entrer au pays depuis plus de 30 ans.

Le conseiller a dit avoir appris la présence de l’homme à l’événement du premier ministre le matin du 21 février. «En l’espace de quelques heures», des photos de l’invitation de M. Atwal et des images de lui avec la femme de M. Trudeau ont fait surface dans les médias, et peu de temps après, de fausses histoires ont commencé à circuler, a-t-il relaté.

Dans sa séance d’information avec les médias, M. Jean prétend avoir dit aux médias qu’il n’accusait pas le gouvernement indien d’avoir tenté de saboter le voyage.

Il aurait plutôt affirmé qu’il y avait une campagne de désinformation, mise en place par des factions du gouvernement indien, ou par un citoyen dans le pays.

Une théorie du complot, selon les conservateurs

Les conservateurs accusent le Bureau du premier ministre d’avoir demandé à M. Jean de propager une «théorie du complot» afin de jeter le blâme sur le gouvernement indien pour le voyage désastreux de M. Trudeau.

Le député conservateur Glen Motz a demandé à M. Jean s’il regrettait «d’avoir soulevé la théorie du complot de factions au sein du gouvernement indien».

«Je n’ai jamais évoqué une théorie du complot, a rétorqué M. Jean. Ce que j’ai dit, c’est qu’il y avait des efforts coordonnés pour tenter de désinformer.»

M. Motz a aussi demandé au conseiller si le Bureau du premier ministre lui avait demandé de parler aux journalistes pour «tenter de limiter les dégâts».

M. Jean, qui prendra bientôt sa retraite après 30 ans de carrière en tant que diplomate et fonctionnaire, a répondu: «Monsieur, au point où j’en suis dans ma carrière, je ne crois pas que j’essaierais de faire quelque chose comme cela.»

«La chose facile aurait été de me tenir loin de cela, et évidemment, les Canadiens auraient eu beaucoup plus de désinformation impliquant des institutions publiques qui sont respectées. J’ai choisi de faire la bonne chose, monsieur, et dans toute ma carrière, j’ai toujours fait la bonne chose.»

«Je vous crois», a répondu M. Motz.

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