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Trudeau ne répondra pas aux insultes de Trump

Justin Tang / La Presse Canadienne Photo: Justin Tang
Mélanie Marquis, La Presse canadienne - La Presse Canadienne

OTTAWA — Justin Trudeau ne mord pas à l’hameçon. S’exprimant pour la première fois depuis que Donald Trump lui a infligé un camouflet diplomatique au G7 — volées d’insultes en prime —, il a signalé mardi qu’il n’avait pas l’intention de s’engager dans une guerre de mots avec le président.

Lorsque le premier ministre a fait son retour au parlement, il venait de faire l’objet de nouvelles attaques de Donald Trump, balancées cette fois non pas sur Twitter, mais depuis Singapour, où le président tenait son sommet sur la paix avec le dirigeant nord-coréen Kim Jong-un.

À son arrivée, mardi matin, Justin Trudeau a commencé par dire que le gouvernement du Canada appuyait «évidemment les efforts du président sur la Corée du Nord» et avait «hâte de regarder les détails de ce qui a été conclu».

Il n’a pas voulu répliquer aux commentaires désobligeants du locataire de la Maison-Blanche et de certains des membres de sa garde rapprochée, se contentant d’offrir qu’il allait «continuer de rester focussé (sic) sur les emplois canadiens et les intérêts des Canadiens».

Le chef néo-démocrate Jagmeet Singh estime que c’est l’approche à préconiser.

«C’est inacceptable (que l’administration Trump) continue à attaquer avec des mots et des gestes qui sont incohérents, et on va continuer à répondre de cette façon. Je pense que c’est la meilleure façon», a-t-il offert en point de presse dans le foyer des Communes, mardi.

Il a rappelé que le Parlement a adopté unanimement, lundi après-midi, une motion en appui au premier ministre. «On est uni comme pays contre cette stratégie d’intimidation que l’administration de Trump a faite quelques fois et continue de faire», a-t-il indiqué.

Cette démonstration d’unité a été saluée par Justin Trudeau à sa première intervention en Chambre depuis la fin chaotique du sommet du G7. Il a tenu à remercier les partis d’opposition, et les Canadiens, d’avoir mis la partisanerie de côté face aux affronts de Washington.

Il a été chaleureusement applaudi par les députés.

Quelques heures auparavant, à Singapour, le président des États-Unis attaquait de nouveau le premier ministre du Canada lors de la conférence de presse qui a suivi le sommet historique de plusieurs heures qu’il a tenu avec le dirigeant de la Corée du Nord, Kim Jong-un.

«Il a appris. Ça va coûter beaucoup d’argent aux gens du Canada. Il a appris. Tu ne peux pas faire ça», a-t-il lancé en faisant référence au fait que Justin Trudeau a réitéré, à l’issue du sommet du G7, ses critiques face à l’imposition de tarifs sur l’acier et l’aluminium.

Donald Trump «ne comprend pas»

D’autres taxes punitives pourraient tomber, puisque l’administration Trump a ouvert une enquête sur la possibilité d’imposer des tarifs de 25 pour cent sur les véhicules automobiles, a rappelé mardi la ministre des Affaires étrangères, Chrystia Freeland.

Elle a refusé de spéculer sur des «actions hypothétiques» que pourrait poser le Canada si Donald Trump mettait sa menace à exécution, mais elle a soutenu que le gouvernement Trudeau travaillait toujours en espérant le mieux, mais en étant «prêt au pire».

Son collègue Jean-Yves Duclos a pour sa part critiqué la logique économique du magnat de l’immobilier devenu président.

«Ce que M. Trump ne comprend pas, mais ce que tout le monde comprend, c’est qu’une guerre commerciale ne bénéficie à personne», a exposé le ministre, qui est lui-même un économiste.

«Une guerre commerciale fait mal à tout le monde, tout le monde perd, et après que cette guerre est terminée, il faut reconstruire les ponts qui ont été détruits pendant la guerre (…) C’est un enseignement que tous les économistes savent», a noté M. Duclos.

Le Canada, l’«adulte dans la pièce»

Après avoir pris connaissance des propos du premier ministre canadien en fin de sommet du G7, le président Trump a taxé Justin Trudeau de «malhonnête» et de «faible» sur Twitter, tout en rejetant le communiqué final du G7 auquel il avait auparavant donné son sceau d’approbation.

Dans les heures suivantes, des membres de sa garde rapprochée ont tenu des propos encore plus cinglants sur les plateaux de certains réseaux télévisés américains. La palme de l’insulte la plus vitriolique revient au conseiller du commerce du président, Peter Navarro.

«Il y a une place spéciale en enfer pour tout dirigeant étranger qui fait preuve de mauvaise foi diplomatique avec le président Donald J. Trump et qui tente ensuite de le poignarder dans le dos», a-t-il lancé sur les ondes du réseau favori du président, Fox News.

Il a exprimé ses regrets mardi en plaidant que son travail était d’«envoyer un signal de force», et qu’en voulant transmettre ce message, il a employé «un langage qui était inapproprié» qui a porté ombrage au message.

«J’en prends la responsabilité; c’était mon erreur, mes mots», a offert Peter Navarro.

Le premier ministre Justin Trudeau n’a pas répondu aux journalistes qui lui ont demandé, trois fois, s’il allait réclamer des excuses au responsable américain.

Pour la députée néo-démocrate Hélène Laverdière, il n’y a rien à gagner à s’embarquer dans ce petit jeu.

«Je n’irais pas là-dedans, a-t-elle dit en mêlée de presse. Il faut garder son calme. Ça prend des adultes dans la pièce, et je pense que les Canadiens, dans l’ensemble, sont des adultes dans la pièce.»

Motion adoptée lundi aux Communes

Que la Chambre:

a) reconnaisse l’importance de la relation commerciale de longue date et mutuellement bénéfique que le Canada entretient avec les États-Unis d’Amérique;

b) est solidaire des travailleurs et des travailleuses du Canada, ainsi que de leurs communautés, qui dépendent directement ou indirectement de cette relation commerciale;

c) s’oppose fermement aux tarifs douaniers illégitimes imposés par le gouvernement des États-Unis aux travailleurs et aux travailleuses du secteur canadien de l’acier et de l’aluminium;

d) est solidaire du gouvernement du Canada dans sa décision d’imposer des tarifs douaniers de représailles;

e) fait preuve d’unité dans son soutien aux fermiers et aux fermières du Canada, ainsi qu’à la gestion de l’offre qui s’applique intégralement pour la production agricole des produits laitiers, du poulet, de la dinde et des oeufs;

f) rejette les déclarations ad hominem désobligeantes faites par des responsables américains qui desservent les relations bilatérales et vont à l’encontre des efforts visant la résolution de ce différend commercial.

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