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Le temps presse pour les demandeurs d’asile

Ryan Remiorz / La Presse Canadienne Photo: Ryan Remiorz
Alanna Rizza et Gabriele Roy, La Presse canadienne - La Presse Canadienne

TORONTO — Par un après-midi d’été, les babillages d’enfants se font entendre à travers les portes closes et se répandent dans les corridors déserts d’une résidence étudiante de Toronto.

Les 54 chambres du Collège Centennial accueillent temporairement 344 demandeurs d’asile, dont 96 familles. Des centaines d’autres personnes dans la même situation sont hébergées dans une autre résidence étudiante.

À moins d’un mois du retour des étudiants pour la rentrée des classes, le temps presse pour ces immigrants qui doivent se dénicher un logement.

La date limite du 9 août est au coeur des débats politiques des dernières semaines, alors que le gouvernement de l’Ontario maintient qu’il va se retrouver face à une «crise» sans l’aide du fédéral.

Pour certains demandeurs d’asile hébergés au Collège Centennial, l’approche de la date limite génère une nouvelle source d’incertitude. Malgré tout, ils réitèrent que toute situation est meilleure que ce qu’ils ont laissé derrière eux.

Un couple originaire du Nigeria, qui préfère demeurer anonyme par crainte de représailles, dit avoir fui le pays en mars à la suite de menaces du groupe armé Boko Haram.

Le couple a vendu toutes ses possessions avant de s’envoler pour la Floride avec leur fillette de deux ans. Une fois arrivée à Orlando, la famille a fait face à la rhétorique anti-immigration et a préféré partir pour le Canada en raison du climat malveillant.

«On a réalisé que (le président Donald) Trump ne veut pas d’immigrants», dit la mère de famille.

«On a vu sur Internet que le Canada acceptait des demandeurs d’asile», ajoute son époux.

Depuis la Floride, la famille s’est envolée vers l’État de New York où ils ont pris un autobus en direction de Montréal.

Il s’agit d’un parcours commun à de nombreux demandeurs d’asile qui ont abouti à Toronto cette année. Plusieurs d’entre eux se trouvent maintenant dans des refuges municipaux.

Un total de 3304 demandeurs d’asile étaient hébergés dans le réseau de refuges municipaux de Toronto à la fin juin, ce qui représente 47 pour cent de toute la clientèle d’après les données de la ville. Plus de la moitié de ces nouveaux arrivants font partie du programme pour réfugiés et se trouvent dans des hôtels ou des résidences étudiantes.

Le maire John Tory a déjà déclaré que la ville ne peut plus accommoder davantage de demandeurs d’asile sans l’aide financière des gouvernements fédéral et provincial.

Vendredi, le gouvernement ontarien a demandé plus de ressources financières afin de reloger les familles avant la date limite du 9 août.

Le gouvernement libéral de Justin Trudeau a offert 11 millions $ à l’Ontario pour compenser les coûts d’hébergement actuels, mais la province a répondu que cette somme ne couvre qu’une fraction des dépenses encourues à Toronto seulement.

L’Ontario insiste pour qu’Ottawa rembourse toutes les dépenses liées à la réinstallation des demandeurs d’asile, car les politiques fédérales encourageraient les gens à traverser la frontière de façon irrégulière.

Plus de 85 pour cent des milliers de demandeurs d’asile accueillis à Toronto viennent du Nigeria, selon les statistiques de la ville.

Les gens hébergés à la résidence du Collège Centennial ont rapidement formé une communauté tissée serrée. Ils se déplacent en groupes pour visiter des logements ou des organismes communautaires comme la Croix-Rouge.

Plusieurs ont déjà reçu un numéro d’assurance sociale et un permis de travail, mais les emplois et les logements demeurent difficiles à dénicher.

Agibola, un homme de 37 ans qui souhaite taire son nom de famille, dit avoir visité des appartements tous les jours. Il dit être continuellement refusé parce qu’il ne possède pas les documents demandés par les propriétaires.

«Comment puis-je trouver un appartement quand je n’ai pas de travail? Et si j’ai un emploi, comment je vais faire pour trouver un appartement?», demande-t-il.

Les démarches représentent aussi une épreuve émotive, confie le père de famille puisque ses enfants continuent de s’imaginer vivre dans chacun des logements qu’ils visitent.

Agibola demeure tout de même optimiste et se dit très reconnaissant des efforts et du soutien du gouvernement.

«Je sais que les gens du gouvernement font de leur mieux. Je sais qu’ils essaient de faire en sorte qu’on soit bien et je l’apprécie. On ne s’attend pas à ce que le gouvernement fasse tout à notre place», témoigne-t-il.

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