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Ottawa peu pressé d’imposer la ceinture en autobus

JONATHAN HAYWARD / La Presse Canadienne Photo: JONATHAN HAYWARD

Russell Herold, dont le fils Adam figurait parmi les 16 vitimes de l’accident d’autocar ayant décimé les Broncos de Humboldt, s’interroge sur les raisons qui poussent Ottawa à attendre deux ans avant d’imposer le port de la ceinture de sécurité en autobus.

Des documents obtenus par La Presse canadienne grâce à la Loi d’accès à l’information révèlent que Transport Canada a envisagé d’adopter la nouvelle réglementation rapidement à la suite du tragique accident survenu le 6 avril en Saskatchewan.

L’équipe de hockey se rendait dans le nord de la province pour y jouer une partie de séries éliminatoires lorsque l’autocar qui la transportait est entré en collision avec un camion semi-remorque.

Parmi les passagers, 16 personnes ont perdu la vie et 13 autres ont été blessées. Le conducteur du camion fait face à des accusations de conduite dangereuse.

Ottawa a évoqué la mise en place de nouvelles règles obligeant le port de la ceinture de sécurité en autobus plus d’un an avant le funeste accident. La version finale de la nouvelle réglementation a été dévoilée au début du mois, mais elle n’entrera pas en vigueur avant le 1er septembre 2020.

«Pourquoi ne pas l’imposer plus tôt que tard?, s’interroge Russell Herold. Si cela avait pu sauver une vie, ce ne serait pas bénéfique pour tout le monde?»

D’après des documents internes, Transport Canada a étudié la possibilité d’agir plus rapidement dans les jours qui ont suivi le drame en Saskatchewan.

«On examine attentivement la date d’entrée en vigueur, et dès que possible, on va fournir des précisions (document questions-réponses) sur les risques/enjeux de devancer la date», a écrit le directeur général de la division de sécurité des véhicules motorisés chez Transport Canada Michael DeJong dans un courriel envoyé à ses collègues le 8 avril.

Les options étudiées incluaient de devancer d’un an l’entrée en vigueur du règlement ou d’adopter deux dates d’entrée en vigueur différentes pour les grands et les moyens autobus.

Après réflexions, Transport Canada a préféré maintenir la date initiale de 2020, malgré l’accident des Broncos.

«Les constructeurs d’autobus ont manifesté leur soutien envers la réglementation, mais ont demandé un délai adéquat pour la mettre en oeuvre», ont écrit des fonctionnaires.

Transport Canada a aussi été informé que les provinces ont besoin de temps pour traiter les enjeux de responsabilité des chauffeurs concernant les dispositifs pour enfants, les passagers debout et les personnes mineures qui ne seraient pas attachées.

Des vérifications devraient aussi être effectuées pour s’assurer que les nouveaux véhicules sont conformes à la réglementation.

Les nouvelles règles ne vont s’appliquer qu’aux nouveaux autobus. Les véhicules déjà en service sont soumis à la juridiction des provinces et territoires.

Selon Transport Canada, entre 25 et 75 pour cent des autobus en fonction sont déjà équipés de ceintures de sécurité et on estime à moins d’un million de dollars par année le coût pour équiper le reste des véhicules.

L’ajout de ceintures de sécurité devrait réduire le risque de décès de 77 pour cent en cas de capotage, selon les calculs de probabilité, et de 36 pour cent pour les autres types de collisions.

«Il faut croire que les ceintures auraient pu faire une différence. On s’est fait dire par le coroner que tout le monde a été éjecté de l’autobus», a commenté Russell Herold.

Lewis Smith du Conseil canadien de la sécurité mentionne que son organisation était divisée en apprenant que les règles ne seraient en vigueur qu’en 2020.

«D’un côté, on sent que ce type de réglementation devrait déjà exister depuis longtemps, alors le fait qu’elle ne sera pas mise en place avant 2020… à première vue, c’est un peu inquiétant», dit-il.

Toutefois, Lewis Smith reconnaît que le délai est logique puisque l’application de la loi est une responsabilité des provinces.

La famille Herold a déposé une poursuite qui réclame notamment l’obligation que tout autobus transportant une équipe sportive soit équipée de ceintures et autres dispositifs de sécurité.

Russell Herold veut aussi savoir comment les autorités entendent faire appliquer la loi pour s’assurer que les passagers sont attachés. Il suggère notamment d’effectuer des vérifications à bord des autobus ou d’exiger des voyants lumineux pour faciliter la tâche des chauffeurs.

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