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Quoi faire si mon enfant est un intimidateur?

Photo: Getty Images/iStockphoto

TORONTO — Le petit Guillaume n’est peut-être pas un parfait petit ange, mais ses parents croient qu’il est somme toute un très bon garçon. C’est alors que survient un appel de la direction de l’école pour faire éclater leur bulle: leur fils aurait intimidé d’autres enfants. Un comportement inacceptable contre lequel de nombreuses écoles se sont dotées d’une politique de tolérance zéro.

Alors, pourquoi les enfants intimident-ils leurs camarades et que doivent faire les parents?

Dans bien des cas, l’intimidation est un comportement adaptatif pour un enfant, un adolescent ou un adulte, explique Tony Volk de l’Université Brock, en citant le président américain Donald Trump comme un exemple particulièrement flagrant.

«La première chose qui prédispose les gens à le faire, c’est parce que c’est souvent efficace pour obtenir ce qu’on veut, affirme le professeur d’études sur les enfants et les jeunes à l’université située à St. Catharines, en Ontario. Ils veulent en tirer quelque chose: la popularité, le sexe, les ressources, la meilleure place à la cafétéria. Et si vous êtes capable de bien le faire, cela entraîne souvent des coûts relativement faibles, en particulier à court terme.»

M. Volk souligne cependant que le prix que payent les victimes de harcèlement est souvent beaucoup plus élevé pouvant même mener à des effets à long terme sur la santé mentale et physique.

Selon la psychiatre Susan Baer, directrice médicale des services ambulatoires de santé mentale au BC Children’s Hospital, l’une des raisons communes chez certains enfants et adolescents qui ciblent une victime parmi leurs pairs est qu’ils se sentent impuissants dans d’autres aspects de leur vie.

L’intimidation est un moyen d’obtenir du pouvoir, dit-elle.

«D’autres raisons peuvent être de vouloir acquérir un statut social ou de l’attention, voire de l’admiration de ses amis. Fait intéressant, l’une des raisons les plus courantes pour devenir intimidateur est d’avoir été soi-même victime d’intimidation. Et parfois, il peut y avoir une sorte de — une culture d’intimidation — à laquelle l’enfant a été exposé à la maison ou à l’école.»

Toutefois, il n’est pas toujours évident de déterminer si un enfant est réellement victime d’intimidation ou s’il est simplement de l’autre côté d’un conflit avec un autre enfant.

«Ainsi, les enfants qui peuvent être très sensibles ou qui ont déjà été victimes d’intimidation peuvent ressentir certaines choses comme de l’intimidation, alors que pour d’autres, peut-être plus résilients, la même situation glisse comme de l’eau sur le dos d’un canard, explique la Dre Baer. En général, quand on parle d’intimidation, il y a un sentiment de différence de pouvoir. Il ne s’agit pas d’un différend entre deux personnes qui sont dans une relation égalitaire.»

Les recherches compilées par PREVNet (Réseau pour la promotion de relations saines et l’élimination de la violence) estiment que 10 à 15 pour cent des enfants intimident de manière répétée les autres et que le même pourcentage d’enfants est victime d’intimidation à répétition.

Selon PREVNet, qui regroupe 130 chercheurs canadiens et 62 organisations de la jeunesse en activité au pays, les jeunes enfants à l’école primaire et au premier cycle du secondaire sont plus susceptibles de se livrer à des actes d’intimidation. Le taux de prévalence décline par la suite quand les enfants vieillissent.

Bien qu’il y ait moins de harcèlement physique à mesure que les enfants vieillissent, l’intimidation verbale, sociale et électronique a tendance à augmenter entre 11 et 15 ans et à persister jusqu’à la fin des études secondaires. Des études ont révélé qu’un quart des jeunes Canadiens admettent avoir commis de la cyberintimidation, alors que le tiers des jeunes disent avoir été victimes de persécution en ligne.

«L’intimidation est un comportement profondément négatif, maintient le professeur Volk. Les impacts sont très réels et ils ne se limitent pas seulement à la victime, mais aux personnes autour de la victime, aux autres enfants qui l’observent», dit-il. «Les coûts sociaux sont potentiellement énormes.»

PREVNet soutient que les enfants victimes d’intimidation ont un risque plus élevé de suicide – mais il en va de même pour les intimidateurs.

De nombreuses écoles à travers le pays tentent de décourager l’intimidation en instaurant des politiques de tolérance zéro, certaines offrent également des programmes visant à stimuler la confiance en soi des enfants et à établir des relations interpersonnelles saines avec leurs pairs.

Mais que peuvent faire les parents?

«La première étape avant de commencer à réfléchir à des solutions est d’abord d’essayer de comprendre ce qui se cache derrière», conseille Susan Baer.

«Parfois, les enfants atteints de TDAH ont beaucoup d’impulsivité, ce peut-être aussi des aptitudes sociales un peu immatures ou un adolescent peut développer une dépression et se sentir vraiment en colère et irritable», énumère-t-elle.

La Dre Baer suggère aux parents de choisir un moment où ils se sentent plus calmes pour parler à leur enfant de ce qui les pousse à s’en prendre à d’autres enfants.

«Soyez direct et dites-lui ce que vous avez entendu, mais prenez vraiment le temps d’écouter et d’essayer de comprendre en posant des questions» », ajoute-t-elle.

Une fois qu’un parent comprend pourquoi l’enfant agit ainsi, il doit établir des limites très claires sur ce qui est inacceptable comme comportement. «Cela pourrait impliquer des conséquences», dit la Dre Baer.

Si un enfant a été impliqué dans la cyberintimidation, une conséquence pourrait être de le priver d’accès à Internet pour un certain temps. Les parents peuvent également insister pour que l’enfant s’excuse auprès de sa victime.

«L’enfant peut manquer de compétences sociales, alors il peut être important d’essayer de développer des compétences en amitié, explique la Dre Baer. Il pourrait avoir besoin d’aide pour développer de l’empathie et comprendre les émotions des autres».

Les parents doivent également déterminer si leur propre comportement, comme un conflit conjugal, peut créer du stress chez leur enfant.

Tony Volk mentionne que des parents hypercompétitifs qui valorisent la victoire à tout prix peuvent devenir des modèles de comportement d’intimidation.

«(De tels parents devraient) se regarder dans le miroir et s’assurer qu’ils ne donnent pas l’exemple suivant: ‘Regardez-moi gravir les échelons, j’ai été capable de broyer mes rivaux’. Si vous agissez comme cela, il n’est pas surprenant que votre enfant se dise: ‘C’est ce qui fonctionne pour maman et papa, alors je devrais faire la même chose’».

Les parents doivent également s’assurer d’être émotionnellement liés et impliqués dans la vie de leurs enfants, notamment en surveillant leur comportement, dit-il.

«Parlez à l’enseignant, parlez aux autres enfants, impliquez-vous, car si cela se produit et que le parent ne veut pas que cela se produise, alors il y a de fortes chances que l’enfant vous le cache, dit-il. Vous devez construire ces canaux de communication avec votre enfant aussi tôt et aussi souvent que possible».

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