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Un pilote écope de 7 ans de prison pour avoir saboté des lignes électriques

Ryan Remiorz / La Presse Canadienne Photo: Ryan Remiorz/La Presse canadienne
Sidhartha Banerjee - La Presse canadienne

SAINT-JÉRÔME, Qc — Le pilote qui avait ciblé pour se venger des lignes électriques d’Hydro-Québec dans des «attentats aériens» qui ont privé d’électricité des dizaines de milliers de foyers, en décembre 2014, a été condamné lundi à sept ans de prison.

Normand Dubé, âgé de 56 ans, avait été reconnu coupable en septembre dernier d’avoir utilisé son monomoteur pour commettre une attaque «sans précédent» contre les institutions et les Québécois ordinaires, avait plaidé la Couronne.

M. Dubé, surnommé «le pilote des stars» parce qu’il avait transporté de nombreuses vedettes québécoises, est demeuré impassible, lundi matin à Saint-Jérôme, en écoutant le juge Paul Chevalier, de la Cour du Québec, prononcer sa peine pour les trois chefs d’accusation de méfait dont il avait été reconnu coupable. Il avait commis ces méfaits contre le réseau de transport d’Hydro-Québec à Mirabel, Brownsburg-Chatham et Wentworth, trois localités des Laurentides, au nord-ouest de Montréal.

Bien que Normand Dubé n’ait pas de casier judiciaire, sa responsabilité pour les crimes est entière, a noté le juge Chevalier. «Le modus operandi de son crime démontre qu’il l’a soigneusement préparé et qu’il n’a pas pu agir impulsivement», a estimé le juge. «Le mobile qu’a retenu le tribunal, soit la vengeance, souligne sa culpabilité morale.»

La façon dont le crime a été commis et l’ampleur des dommages ont fait de cette cause une première au Canada: ni la Couronne ni la défense n’ont pu trouver de précédent dans les annales judiciaires pour étayer leur suggestion de peine.

La Couronne avait souhaité la peine maximale de 10 ans pour cet attentat contre deux lignes électriques des Laurentides décrites par les procureurs comme la «colonne vertébrale» du réseau d’Hydro-Québec. Mais le juge Chevalier a estimé que cette recommandation était excessive, et il a tranché pour sept ans.

L’avocat du pilote avait plaidé pour une peine beaucoup plus clémente — soit trois ans de prison, ou moins de deux ans dans une prison provinciale suivie de trois ans de probation. Me Mario Lavigne a refusé lundi de commenter la peine imposée, mais il a déjà indiqué son intention de faire appel du verdict et de la peine, et il demandera la libération sous caution de son client pour la suite des procédures. La Couronne a indiqué qu’une audience sur la demande de la défense est prévue en Cour d’appel jeudi.

La méthode exacte utilisée par Normand Dubé le 4 décembre 2014 pour causer une panne majeure ne peut être rapportée en raison d’une ordonnance de non-publication imposée par le juge pour des questions de sécurité nationale. En conséquence, une grande partie du procès a eu lieu à huis clos, et le jugement rendu le 13 septembre est partiellement caviardé.

Vengeance contre Hydro
Le pilote, aussi inventeur et entrepreneur, en voulait profondément à Hydro-Québec à la suite d’un conflit sur le travail effectué par la société d’État sur un terrain qu’il possédait à Sainte-Anne-des-Plaines, au nord de Montréal. Selon l’accusation, M. Dubé a également attribué à Hydro-Québec ses ennuis avec le fisc.

La Couronne a soutenu que Normand Dubé méritait une peine exemplaire pour un acte de sabotage qui a presque paralysé tout le réseau d’Hydro-Québec. Quelque 188 000 foyers de Montréal, des Laurentides et de la Montérégie avaient été privés d’électricité pendant deux journées de ce début de décembre 2014. Les pannes avaient notamment touché le Centre universitaire de santé McGill et le Service de police de la Ville de Laval. Certaines entreprises avaient dû réduire leur consommation d’électricité et Hydro-Québec avait suspendu temporairement ses exportations.

Lors des audiences pour la détermination de la peine, Pierre Paquet, un ancien dirigeant d’Hydro-Québec, a témoigné que la panne avait coûté 28,6M$ à la société d’État, un coût assumé par tous les contribuables québécois. Hydro-Québec poursuit d’ailleurs Normand Dubé au civil pour recouvrer ces coûts.

M. Paquet avait qualifié d’attaque extrêmement grave cet attentat commis sur deux lignes électriques principales. Il a soutenu que l’électricité sur les lignes touchées avait été transférée à des lignes secondaires, qui ne pouvaient pas gérer un tel transport. L’attentat initial avait laissé environ 120 000 clients sans électricité dans une large bande du sud-ouest du Québec. Une seconde coupure de courant pour environ 60 000 clients avait été nécessaire pour maintenir la stabilité du réseau pendant que les équipes d’Hydro recherchaient la cause de la panne initiale.

La Couronne s’est dite satisfaite de la peine de sept ans imposée par le juge Chevalier. Me Steve Baribeau a estimé que par cette peine, le tribunal prévient qu’on ne peut, pour se venger, attaquer impunément au Canada un service public et paralyser un système comme le réseau électrique. Le juge Chevalier a également accepté la suggestion de la Couronne de confisquer l’avion utilisé par M. Dubé dans l’attaque, un monomoteur «Aerocruiser 450» qu’il avait lui-même conçu.

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