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Les infirmières veulent un droit de prescrire

MONTRÉAL – L’Ordre des infirmières du Québec propose une solution visant à améliorer l’accès aux soins de santé qui, à son avis, ne coûterait pas un sou et serait simple à implanter, mais qui risque de se heurter à la résistance des médecins qui pourraient y voir une intrusion dans leur chasse gardée.

L’Ordre demande en effet que ses membres puissent prescrire certaines analyses de laboratoire, des radiographies et d’autres tests, ainsi que certains médicaments à caractère préventif, tels des contraceptifs ou des aides à la cessation tabagique, ou des traitements pour des troubles mineurs.

«Ce qu’on vise, c’est d’améliorer l’accès aux soins, diminuer les temps d’attente, notamment à l’urgence et dans les cliniques médicales, et faciliter le travail des infirmières», a indiqué la présidente et directrice générale de l’Ordre, Lucie Tremblay, lors d’une conférence de presse jeudi à Montréal.

«Cette solution est porteuse et applicable à court terme en plus d’avoir comme avantage de ne pas nécessiter de nouveaux investissements», a-t-elle ajouté.

L’Ordre fait valoir que les infirmiers et infirmières ont la compétence requise pour ces interventions mineures. Le cas d’un patient qui se présente à l’urgence avec une blessure à la cheville a été invoqué comme exemple d’une situation injustifiable par Simon Grenier-Michaud, infirmier à l’urgence de l’hôpital de Trois-Rivières et étudiant à la maîtrise en soins infirmiers.

«L’infirmière qui est au triage — quand le patient arrive à l’urgence c’est la première personne qu’il rencontre — voit bien que ce patient va nécessiter une radiographie de la cheville, malheureusement elle n’a pas le pouvoir de débuter ça à ce moment-là», a-t-il expliqué.

Ce patient devra d’abord attendre plusieurs heures avant de voir un médecin. «Mais au moment de voir le médecin, le traitement n’est pas initié, le problème n’est pas encore identifié: il faut la radiographie. Donc le médecin retourne le patient en radiographie», a dit M. Grenier-Michaud, ce qui implique une nouvelle attente avant l’examen radiologique et une autre attente avant de revoir le médecin avec le résultat.

L’Ordre souligne que le Québec accuse beaucoup de retard dans ce domaine, les infirmières détenant déjà un droit de prescrire limité comme celui qu’il réclame dans des pays comme le Royaume-Uni, l’Irlande, l’Australie et même au Canada, en Colombie-Britannique.

Récemment, les pharmaciens ont également obtenu un droit limité de prescrire et Québec a annoncé la mise en place d’ordonnances collectives qui permettent à d’autres professionnels d’intervenir sur des ordonnances émises par des médecins. Les infirmières demandent toutefois ici de faire un pas de plus en leur permettant de prescrire de leur propre chef dans certaines situations très précises, une démarche que le Collège des médecins a toujours refusée dans le passé.

Lucie Tremblay estime toutefois que l’absence d’amélioration réelle en ce qui a trait à l’attente dans les urgences et l’accès aux médecins de famille oblige tout le monde à chercher des solutions novatrices, surtout lorsqu’elles ont fait leurs preuves dans d’autres pays.

«Nous sommes dans une optique de collaboration qui est plus grande en ce moment, a déclaré Mme Tremblay. Je pense que le problème d’accessibilité n’a jamais été aussi aigu qu’il ne l’est en ce moment et si on veut faire des changements (…) nous n’avons pas d’autre choix que de revoir nos façons de fonctionner.»

Mme Tremblay reconnaît cependant que les médecins ont opposé une résistance ferme jusqu’ici, ce qui pourrait ralentir la démarche,

«Ça se peut que ça se passe par étapes, alors on prend un pas à la fois», a-t-elle indiqué.

Mais l’Ordre des infirmières a l’intention de déployer ses efforts sur plusieurs fronts; il lancera ainsi une offensive publicitaire pour appuyer sa demande, et ce, même si des sondages démontrent que le public est déjà gagné à cette cause.

Il entend également déposer un mémoire auprès de l’Office des professions et du gouvernement du Québec d’ici l’automne afin de discuter davantage de cette proposition.

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