Soutenez

Pas assez de données sur les accidents de train

Photo: Paul Chiasson

OTTAWA – Le manque de données sur les accidents de trains au Canada rend difficile leur prévention et ne permet pas de trancher si ce moyen de transport du pétrole est plus ou moins sécuritaire que les oléoducs, révèle un nouveau rapport.

Dans une analyse du School of Public Policy de l’Université de Calgary rendue publique mercredi, la chercheuse Jennifer Winter affirme qu’il est presque impossible de déterminer si le transport ferroviaire est sécuritaire au pays.

Beaucoup de questions ont été soulevées après les récentes catastrophes ferroviaires, surtout celle de Lac-Mégantic, écrit-elle dans son rapport. On pense notamment au nombre d’accidents et si ce chiffre est plus bas ou plus élevé dans d’autres pays.

«Mais malheureusement, les informations publiques sur la sécurité ferroviaire au Canada ne permettent pas d’apporter des réponses à ces questions», tranche Mme Winter.

Selon ses recherches, les données sur les accidents de train sont inaccessibles, parfois contradictoires et souvent inexistantes.

Transports Canada est incapable de fournir le nombre de voyages par train dans une année, souligne-t-elle. Et le nombre de problèmes et d’accidents compilés diffère d’une agence fédérale à l’autre.

Elle trouve que ces failles sont fort inquiétantes.

«L’incapacité de surveiller publiquement les données de sécurité aérienne serait considérée inacceptable, dit-elle. Pourtant, les trains qui transportent des matières volatiles à travers le pays exposent au danger des communautés entières, comme à Lac-Mégantic, à des dangers potentiellement catastrophiques».

Et alors que les citoyens craignaient les fuites d’oléoducs, les accidents ferroviaires récents ont aussi fait remettre en question la sécurité du transport du pétrole par train comme alternative.

La chercheuse fait remarquer qu’un rapport publié aux États-Unis par le Manhattan Institute compare justement les différents modes de transport du pétrole brut, du gaz naturel et des hydrocarbures. Il a déterminé que les oléoducs sont plus sécuritaires que les routes ou les voies ferrées.

«Une analyse similaire pourrait être utile pour le Canada, mais l’état des données fait de ce travail un réel défi», est-il écrit dans le rapport.

En point de presse, à Ottawa mercredi, Mme Winter a toutefois apporté ce bémol: «Comparer le train aux pipelines ne rendrait pas service aux deux industries».

Le plus important ne serait pas de démontrer à quel point l’un est sûr par rapport à l’autre mais comment rendre les deux modes de transport le plus sécuritaire possible, a-t-elle ajouté.

Mme Winter rappelle que dans la foulée de la catastrophe de Lac-Mégantic, les autorités fédérales et provinciales ont promis qu’elles allaient tout mettre en oeuvre pour s’assurer que le transport ferroviaire soit plus sécuritaire. De nombreux règlements et arrêtés ministériels ont été émis depuis pour répondre aux préoccupations et des comités étudient toujours certains aspects sécuritaires.

Mais la chercheuse estime que pour développer des lois et des règlements efficaces, il faut d’abord avoir des données solides sur la situation.

Parmi ses recommandations, elle suggère de constituer un registre des accidents de transport — maritimes, aériens, ferroviaires, par route ou par oléoduc — d’exiger de Transports Canada qu’il distingue entre les rapports d’accidents de trains de passagers et ceux de marchandises, et d’instaurer des standards de données similaires pour les différentes autorités en la matière comme le Bureau de la sécurité des transports (BST) et Transports Canada.

Par exemple, elle dit avoir noté avec surprise que le BST compile les incendies et les explosions dans une catégorie, alors que Transports Canada ne rapporte que les incendies et pas les explosions. Également, Transports Canada calcule les accidents subis par des employés et ceux subis par des passagers séparément alors que le BST les additionne dans une seule catégorie.

La tragédie de Lac-Mégantic a fait 47 morts en juillet 2013. Le centre-ville de la petite ville a été anéanti lors du déraillement d’un train dont les wagons remplis de pétrole se sont déversés, causant des incendies destructeurs.

Et si le Canada cherche un bon modèle, il n’a pas besoin d’aller très loin: il existe aux États-Unis un registre public et exhaustif des données sur les accidents de trains, rapporte Mme Winter.

Articles récents du même sujet

Mon
Métro

Découvrez nos infolettres !

Le meilleur moyen de rester brancher sur les nouvelles de Montréal et votre quartier.