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Les immigrants peinent à obtenir leur pension

Des militants pour les droits des immigrants et des aînés soutiennent que des demandes d’application à la pension de la Sécurité de la vieillesse d’immigrants sont traitées injustement.

C’est le cas notamment de Branko Sucic, 78 ans, à qui le gouvernement a demandé de fournir des documents datant de dizaines d’années depuis sa première application… en 2004. Dix ans plus tard, il n’a toujours pas reçu de chèque. Sa fille, Marianna Rukavina, a fait une affaire personnelle de faire avancer son dossier.

«Il pourrait mourir avant que ça ne débloque», se désole-t-elle.

Et M. Sucic ne serait pas seul dans cette situation.

«C’est plus compliqué pour les immigrants qui se sont établis au Canada pour ensuite déménager et y revenir», soutient Susan Eng, une avocate torontoise et la vice-présidente du CARP, un groupe de défense des droits des aînés. Selon elle, c’est un problème pratique difficile à surmonter, car peu de citoyens moyens auront gardé des documents de voyage datant d’il y a vingt ans pour prouver leurs déplacements.

Service Canada soutient que les paiements de sécurité de la vieillesse sont disponibles pour la plupart des personnes âgées de 65 ans et plus, qui remplissent certaines conditions concernant leur situation juridique et leur lieu de résidence. Les demandeurs vivant au Canada doivent en général être citoyens canadiens ou être résidents autorisés au moment de l’approbation de la demande, et doivent avoir vécu au moins 10 ans au Canada une fois majeurs.

Le dossier doit être accompagné de «preuves documentaires à l’appui», pour démontrer que les dates d’entrée et de sortie du pays sont exactes.

«Il est important d’établir les périodes de résidence canadienne, non seulement parce que la résidence détermine l’admissibilité à la pension de Sécurité de la vieillesse, mais aussi parce que cela peut influencer le montant que le demandeur recevra, explique Eric Morrissette, porte-parole pour Emploi et développement social Canada. Une demande de pension de Sécurité de la vieillesse ne peut être approuvée tant que toutes les conditions ne sont pas remplies.»

Les candidats déçus de la réponse du gouvernement peuvent demander une révision de leur dossier. Cette demande doit être déposée par écrit, dans un maximum de 90 jours après la décision initiale.

M. Sucic en est à son troisième refus du gouvernement fédéral. Né en ancienne Yougoslavie, il a vécu en Italie, en Australie, au Canada et en Croatie, avant de revenir au Canada pour de bon, en 1997. Pour sa quatrième tentative, Service Canada exige les adresses exactes depuis sa naissance jusqu’à aujourd’hui, dont son «adresse actuelle» en Australie, bien qu’il n’y ait pas mis les pieds depuis 1970.

«C’est complètement fou, le nombre de documents gaspillés, envoyés, non reconnus. Ce qu’ils ont demandé, ils l’ont reçu», affirme Mme Rukavina, qui a porté le dossier de son père au bureau du ministre de l’Emploi et du Développement social.

Ed Janicki aurait pu se trouver dans une situation semblable, s’il n’avait pas retrouvé une étiquette d’identification de valise dans les souvenirs de sa mère.

Âgé de 67 ans, M. Janicki a quitté un camp de réfugiés allemand à l’âge de trois ans. Bien qu’il ait obtenu la citoyenneté canadienne en 1955, été au service de l’Armée canadienne et travaillé au Canada toute sa vie, Service Canada lui a demandé de montrer les preuves de son arrivée, dans un port de Halifax.

Heureusement, cette étiquette de bagage était estampillée de la date d’arrivée de sa famille au Canada, et le gouvernement a accepté ce document. Pour lui, ce que demande Service Canada à des immigrants n’a aucun sens.

«Vous passez votre vie entière à travailler, à payer des impôts, et ils vous diront en plus de sauter dans un cerceau», rage-t-il.

La directrice de la clinique juridique chinoise et sud-asiatique de Toronto, Avvy Go, voit ce genre de cas quelques fois par année.

«[Le gouvernement] part de la prémisse que certaines personnes ne vivent pas au Canada et qu’ils profitent de notre système», dit-elle.

Il est ardu de mieux définir ce problème, puisqu’il n’existe pas de statistiques officielles sur les demandes refusées. Les histoires qu’elle entend sont toutefois suffisantes pour que les instances concernées posent des questions, croit-elle.

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