Soutenez

Un pêcheur tenu responsable d'avoir coupé un câble

OTTAWA – Un pêcheur québécois qui a coupé un câble sous-marin qu’il croyait abandonné devra payer pour les dommages causés, sans pouvoir les réclamer à son assureur, a tranché mercredi la Cour suprême du Canada.

Le plus haut tribunal du pays a jugé que l’homme a tranché ce câble de fibres optiques délibérément, sans s’enquérir de son usage. Ce geste volontaire le prive donc de la garantie d’assurance.

Seul point positif pour le pêcheur: sa responsabilité sera limitée à 500 000$ — même si les dommages s’élèvent à près d’un million $ — en vertu d’une convention maritime.

En 2005, Réal Vallée pêchait le crabe sur son bateau, le «Realice» dans le fleuve Saint-Laurent, près de Baie Comeau. L’homme est pêcheur depuis 50 ans.

Une de ses ancres a alors accroché un obstacle qui s’est révélé être un câble reposant dans le lit du fleuve, co-propriété de Telus Communications et d’Hydro-Québec.

Après avoir accroché le câble, M. Vallée a vu une carte dans un musée local — dans une ancienne église — qui indiquait une ligne, passant dans la zone dans laquelle il pêchait, et au-dessus de laquelle était écrit à la main le mot «abandonné».

Par conséquent, lorsqu’il a accroché de nouveau le câble en 2006, il croyait que le câble avait été abandonné et il l’a coupé avec une scie électrique circulaire.

Il est retourné au même emplacement peu après, a libéré l’ancre et a de nouveau coupé le câble une deuxième fois.

Par la suite, Telus et Hydro-Québec ont intenté une poursuite pour récupérer les frais de réparation du câble sectionné.

La Cour fédérale a déclaré M. Vallée, sa société et son navire solidairement responsables du dommage. La Cour d’appel fédérale a confirmé ce jugement.

Le juge Thomas Cromwell de la Cour suprême, qui écrit pour la majorité, a ainsi résumé la situation.

«Pour reprendre les mots employés par le juge de première instance, M. Vallée est un homme bon qui a fait quelque chose de très stupide».

Le juge est toutefois d’avis que sa responsabilité pourra être restreinte à 500 000 $ en application d’une convention maritime datant de 1976 qui prévoit une telle limite aux réclamations.

Et cela, parce que M. Vallée ne voulait pas vraiment causer de dommage à autrui, puisqu’il croyait le câble hors service.

Mais le pêcheur espérait que sa police d’assurance responsabilité, censée le dédommager pour les dommages qu’il cause, allait s’occuper de payer la facture d’Hydro-Québec et Telus.

Mais pas de chance de ce côté pour le pêcheur.

La Cour estime qu’il ne s’est pas suffisamment informé au sujet du câble.

La carte marine de M. Vallée datait de plus de 20 ans. Des avis avaient été publiés à l’intention des navigateurs, et les cartes marines avaient été modifiées pour indiquer l’emplacement du câble installé en 1999. La Cour suprême retient donc que s’il avait consulté ces documents au cours des six ans et demi qui ont suivi l’installation du câble, M. Vallée aurait connu son existence et aurait su qu’il n’avait pas été abandonné.

«Le fait de s’être fié à la carte (celle du musée local), dont il ignorait si elle était récente ou valable, qui n’était pas une véritable carte marine et qu’il n’a regardée que quelques secondes, conjugué à son obligation de s’informer des dangers pour la navigation et à son omission de posséder des cartes à jour ou de s’informer par radio à bord de son navire, étaye amplement la conclusion du juge de première instance selon laquelle M. Vallée s’est  »montré téméraire au plus haut point »», peut-on lire dans le jugement rendu mercredi.

Et parce qu’il y a «eu inconduite délibérée» de sa part, la police d’assurance ne s’applique pas. Le juge Richard Wagner, dissident, aurait toutefois accordé à M. Vallée le bénéfice de son assurance.

Articles récents du même sujet

Mon
Métro

Découvrez nos infolettres !

Le meilleur moyen de rester brancher sur les nouvelles de Montréal et votre quartier.