Soutenez

Enfant tué par un policier: enquête indépendante

Vue rapprochée de gyrophares sur une voiture de police d'un corps policier non défini.
Photo: Yves Provencher/Métro

MONTRÉAL – La ministre de la Justice, Stéphanie Vallée, a finalement cédé à la pression et ordonné un examen de la preuve par des procureurs indépendants relativement au décès d’un garçon de 5 ans, tué en février dernier, à Longueuil, lorsque la voiture à bord de laquelle il prenait place a été violemment percutée par celle d’un policier en filature qui roulait à haute vitesse.

La ministre Vallée en a fait l’annonce lundi dans les heures suivant un communiqué du Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP) indiquant qu’il rouvrait le dossier à la suite du témoignage livré au quotidien La Presse par Madeleine Noiseux, qui attendait l’autobus lorsque l’accident est survenu sous ses yeux le 13 février.

«Nous tenons à préserver la confiance du public en cette importante institution (le DPCP) et c’est pourquoi nous en sommes venus à la conclusion d’un commun accord qu’il serait opportun de soumettre le dossier à des procureurs indépendants, un groupe composé notamment d’un juge à la retraite», a annoncé la ministre de la Justice et Procureure générale lors d’une brève déclaration à la sortie d’une réunion du conseil des ministres.

Mme Vallée a précisé que le comité de procureurs révisera la preuve au dossier, formulera ses recommandations quant à la prise de poursuites criminelles ou non contre le policier et rendra également des comptes à la population. «Dans un souci de transparence, ses recommandations seront rendues publiques», a dit la ministre.

La décision du DPCP de ne pas porter d’accusations a soulevé l’opprobre dans plusieurs milieux et il est clair que la ministre a senti la pression monter.

«Comme ministre, comme citoyenne, comme mère de famille, je suis très sensible à la situation qui est vécue par les victimes», avait déclaré d’entrée de jeu Mme Vallée, qui n’a pas pris de questions à la suite de son allocution.

Par ailleurs, la ministre a reconnu qu’elle manquait de balises pour décider du bien-fondé d’une intervention ministérielle par-dessus la tête du DPCP et elle a donc demandé à ses fonctionnaires de l’éclairer pour l’avenir.

«L’expérience des dernières années a démontré qu’on réclame fréquemment de la Procureure générale qu’elle intervienne dans les dossiers du Directeur des poursuites criminelles et pénales», a indiqué Mme Vallée.

«Il m’apparaît aujourd’hui nécessaire d’identifier un processus décisionnel qui permettra d’assurer le maintien et la confiance du public dans les décisions du DPCP tout en préservant son indépendance et c’est pourquoi j’ai demandé à l’équipe du ministère de la Justice de me suggérer des modifications législatives afin de préciser dans quelles circonstances le Procureur général doit intervenir», a-t-elle dit.

Le DPCP avait justifié sa décision de ne pas porter d’accusations contre le policier, qui roulait à 122 kilomètres à l’heure dans une zone de 50, en invoquant une «manoeuvre risquée» du père de l’enfant, qui avait décidé de tourner à gauche sur le feu vert, sans attendre le feu clignotant qui lui aurait donné la priorité.

Un autre des éléments à l’appui de la décision de ne pas déposer d’accusations était le témoignage de Mme Noiseux qui, selon le DPCP, avait affirmé que le père «aurait dû attendre avant de tourner».

Or, en entrevue au quotidien La Presse et dans d’autres médias par la suite, Mme Noiseux s’est dite choquée de voir que l’on blâmait le père alors que, selon elle, c’était clairement le policier qui était en faute.

Le DPCP a donc annoncé lundi par voie de communiqué qu’à la lumière de ces informations, il a demandé à l’enquêteur au dossier de rencontrer à nouveau Mme Noiseux et d’effectuer, le cas échéant, les autres démarches d’enquêtes appropriées.

Certains éléments des explications du DPCP ont soulevé de nombreuses interrogations, notamment le fait que les procureurs n’étaient pas au courant et, donc, n’avaient jamais tenu compte du fait que le policier tentait de suivre un homme politique qui ne présentait aucun danger pour le public.

Les prétentions du DPCP voulant qu’un policier soit justifié de dépasser les limites de vitesse dans des opérations d’importance et que son véhicule, même s’il n’est aucunement reconnaissable comme tel par les autres automobilistes, peut être assimilé à un véhicule d’urgence, en avaient aussi laissé plusieurs perplexes.

Dans les minutes précédant l’annonce de la ministre, le porte-parole péquiste en matière de Justice, Alexandre Cloutier, avait réitéré sa demande pour qu’elle agisse comme elle l’a fait.

De son côté, la ministre de la Sécurité publique, Lise Thériault, s’était montrée d’une extrême prudence à son entrée au conseil des ministres.

«Est-ce que la confiance du public est ébranlée? s’était-elle demandée. Il y a tellement de données qu’on ne connaît pas. Je n’ai pas vu non plus les rapports d’enquête. Je n’ai pas vu les conclusions des enquêtes. Je n’ai pas vu les rapports de policiers. Je pense qu’il faut laisser les experts faire leur travail là-dessus.»

Articles récents du même sujet

Mon
Métro

Découvrez nos infolettres !

Le meilleur moyen de rester brancher sur les nouvelles de Montréal et votre quartier.