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Tarifs modulés: les familles recomposées coincées

MONTRÉAL – La hausse des tarifs de service de garde risque de causer d’importantes tensions et de nombreux maux de tête aux familles recomposées et à plusieurs couples séparés ou divorcés en raison de ses ramifications fiscales.

La Fédération des associations de familles monoparentales et recomposées du Québec (FAFMRQ) souligne que les questions entourant la garde des enfants et la fiscalité impliquent déjà des négociations complexes entre parents et elle déplore que Québec ait choisi de les compliquer encore davantage.

«La fiscalité, c’était déjà compliqué et là, ça le devient encore plus», a indiqué la directrice générale de la Fédération, Sylvie Lévesque, en entrevue avec La Presse Canadienne.

«Avec les questions touchant la garde des enfants, la fiscalité était au départ une question de négociations complexes entre les couples, à savoir qui déduirait quoi relativement aux enfants», a-t-elle ajouté.

Au ministère des Finances, un porte-parole, Jacques Delorme, explique qu’il n’y a «rien de nouveau» et que l’on appliquera tout simplement les mêmes principes que ceux qui s’appliquent à l’ensemble du régime fiscal.

«Un des deux parents prend charge de l’enfant au niveau fiscal. Si Madame a un nouveau conjoint, la hausse de tarif sera calculée en fonction des revenus combinés de Madame et de son nouveau conjoint et ce sera la même chose pour calculer la déduction fédérale», a-t-il précisé.

«Dans le cas d’une famille monoparentale, si un parent a la garde légale, c’est cette personne qui calculera la hausse en fonction de son revenu. S’il s’agit d’une garde partagée, les parents vont devoir s’entendre sur celui qui assume la charge de l’enfant au plan fiscal, comme c’est déjà le cas», a ajouté le porte-parole.

Évidemment, puisque l’augmentation des tarifs sera fonction du revenu familial, ce n’est qu’au moment de préparer les rapports d’impôt qu’un couple pourra en connaître l’ampleur et les conséquences fiscales.

Mais puisque les montants augmenteront de façon significative pour plusieurs tant du côté des tarifs que des déductions, la Fédération fait valoir que de nombreuses familles recomposées, dont un parent ou les deux ont des enfants en garde partagée, devront calculer des scénarios multiples impliquant jusqu’à quatre ex-conjoints pour déterminer le choix le plus avantageux pour chacun.

Et ce qui semble simple pour le fisc l’est souvent moins pour des ex-conjoints.

«La fiscalité c’est une chose; la vraie vie en est une autre, rappelle Sylvie Lévesque. Déjà, on trouve qu’ils rendent la vie compliquée aux familles, mais quand t’es en garde partagée, en garde conjointe, qu’il y a de nouveaux enfants dans le décor, tout ça mis ensemble, c’est décourageant.»

L’organisme dit craindre que plusieurs familles recomposées choisissent de se séparer ou même de se donner une seconde adresse simplement pour éviter les augmentations de tarifs trop importantes et, du même coup, récupérer des portions significatives des prestations de soutien aux enfants et d’allocations familiales qui leur avaient été amputées par les deux niveaux de gouvernement à la suite de leur cohabitation.

La Fédération est un peu moins inquiète en ce qui a trait aux familles monoparentales, puisque la notion de revenu familial ne s’applique pas à elles. Cependant, elle signale que les conjoints séparés ou divorcés ayant une garde partagée doivent aussi se livrer au même genre de négociations délicates pour déterminer qui assume les frais de garde et bénéficie des déductions afférentes.

Or, chez les pères monoparentaux, dont le revenu est habituellement plus élevé et dont la pension alimentaire versée pour l’enfant n’est pas déductible, le choc tarifaire risque d’être beaucoup plus important s’ils ont des revenus assez élevés pour subir une hausse, sans pour autant être riches.

Sylvie Lévesque ajoute que la problématique semble avoir échappé au ministère de la Famille.

«Nous avons posé la question à savoir de quelle façon le gouvernement s’attend de traiter tout cela? La réponse qu’on a eu c’est: oh boy, on n’a pas pensé à rien de ça. Au même titre que quand ils ont posé la question à la ministre sur les impacts sur les femmes, ça non plus ils ne l’avaient pas vu venir», a-t-elle dit.

Au bureau de la ministre Francine Charbonneau, toutefois, on affirme exactement le contraire.

«Nous avons pris en compte tous les scénarios, dont celui des familles recomposées et monoparentales dans la logistique et dans l’application de cette fiscalité, et nous avons décidé d’aller de l’avant avec la proposition que nous avons annoncée la semaine dernière», assure son attachée de presse, Léa Nadeau.

Quoi qu’il en soit, la Fédération rappelle qu’il ne s’agit pas là d’une problématique marginale puisqu’elle touche près de la moitié des familles québécoises: 28 pour cent d’entre elles sont en effet monoparentales et 16 pour cent sont des familles recomposées.

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