Le Québec perd la moitié de son énergie
Un Québécois produit deux fois moins de Gaz à effet de serre (GES) par habitant qu’un Canadien. Et pourtant, 50% de l’énergie* qu’utilise la province est gaspillée en cours de route, note le premier portrait de l’État de l’énergie au Québec présenté jeudi par la Chaire de gestion du secteur de l’énergie des HEC. États des lieux en quelques faits saillants.
Les pertes d’énergie sont notamment réalisées au cours du transport de l’électricité dans les lignes à haute tension (10% de perte), dans la transformation du pétrole (15% de perte), ou par manque d’efficacité énergétique des bâtiments. «Il y aurait pourtant des choses faciles à faire», clame Pierre-Olivier Pineau, professeur titulaire à HEC-Montréal et co-auteur de l’étude. La vapeur émise par les systèmes de chauffage des tours à bureau du centre-ville pourrait, par exemple, être utilisée pour avoir des trottoirs chauffants au lieu qu’elle soit envoyée dans le système d’égouts.
Pétrole c. électricité
En 2012, l’électricité comblait 38% des besoins énergétiques du Québec, contre 37% pour le pétrole, dont la part ne cesse de diminuer. Malgré tout, le Québec consomme encore 318 000 barils par jour. Du pétrole, qui venait en majorité d’Algérie (31%) et du Nigéria (14%). Mais cette année, avec l’essor du pétrole de schiste, les États-Unis représentent 50% de nos importations, précise-t-il.
Étonnement, le Québec importe 11% de son électricité. «Il s’agit d’une entente d’exclusivité avec Terre-Neuve qui court jusqu’en 2041. Hydro-Québec achète l’électricité 12 fois moins cher [qu’au Québec] et ça envenime les rapports entre les deux provinces», note le professeur des HEC.
Richesse = gaspillage
L’intensité énergétique des ménages québécois a diminué de 27% entre 1990 et 2011, grâce notamment à des électros moins énergivores. Mais cette efficacité est annulée par la hausse du nombre de logements (+32%) et par leur plus grande surface moyenne (+14%). Même topo du côté des autos. «Entre 1990 et 2011, le parc des véhicules a augmenté de 41%, soit trois fois plus que la population du Québec (+14%)», note l’étude. Le nombre de camions légers (SUV, pickups…) a augmenté de 166%. «Il faudrait vraiment des incitatifs pour que les Québécois reviennent à des automobiles plus petites et moins gourmandes», croit M. Pineau.
Gourmandes papetières et alumineries
La cinquantaine d’alumineries et de papetières québécoises utilisent 17% de l’énergie de la province. C’est autant que tous les commerces, hôpitaux et écoles et universités confondus. «Comme la facture énergétique compte pour beaucoup dans leurs coûts de production, alors c’est là qu’on retrouve les actions les plus innovantes en matière d’efficacité énergétique», explique Pierre-Olivier Pineau. La foresterie ne fait pas qu’alourdir le bilan énergétique du Québec. En effet, les biocombustibles (résidus du bois, biogaz etc) représentent 10% du portefeuille énergétique québécois. «On pourrait même aller plus loin dans la valorisation en utilisant de l’éthanol cellulosique plutôt que de l’éthanol à base de maïs», croit M. Pineau.
*Le système énergétique du Québec comprenait en 2012: 38% d’électricité, 37% de pétrole, 13% de gaz naturel, 10% de biocombustibles et 1% de charbon.