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Une meilleure économie cubaine aiderait le Canada

OTTAWA – Des experts croient qu’un raffermissement des liens entre les États-Unis et Cuba pourrait éventuellement faire des vagues chez les entreprises canadiennes, même s’il est difficile, pour l’instant, de dire qui pourrait en profiter — ou en souffrir.

Les mesures entreprises mercredi pour rebâtir les relations entre les États-Unis et Cuba devraient presque certainement déboucher sur une plus grande prospérité pour le pays caribéen, qui est aussi un important partenaire commercial du Canada, a indiqué le professeur de sciences économiques Arch Ritter, de l’Université Carleton.

Une hausse de la richesse de Cuba représentera, dans l’ensemble, un bénéfice net pour le Canada, a-t-il estimé.

«Je crois que cela va aider à promouvoir l’expansion économique et une meilleure prospérité à Cuba», a poursuivi M. Ritter, un expert sur l’économie cubaine.

«Lorsque cela va se produire, la taille du marché des exportations canadiennes va augmenter. Cela devrait aussi se produire pour les investissements — plus l’économie cubaine sera vigoureuse, plus le potentiel pour l’investissement canadien sera grand.»

Mais ces changements ne seraient pas bien accueillis par tout le monde.

M. Ritter s’attend à ce que certaines entreprises canadiennes souffrent d’une plus forte présence américaine à Cuba.

Un certain nombre d’exportateurs canadiens risquent de se voir «tassés» par l’arrivée de la concurrence américaine, particulièrement dans certains secteurs clés comme celui des produits et de l’équipement agricoles.

Les échanges commerciaux entre le Canada et Cuba ont totalisé près de 1 milliard $ l’an dernier, dont plus de 465 millions $ en exportations. Pour au moins les cinq dernières années, les produits les plus exportés vers Cuba ont été les machines et leurs pièces, suivies des céréales.

Le Canada a maintenu ses liens avec Cuba depuis que les États-Unis ont imposé un embargo au début des années 1960. Cette relation soutenue a permis aux Canadiens de tisser des liens d’affaires avec Cuba sans avoir à se soucier d’un grand nombre de rivaux, en particulier de ceux aux États-Unis.

L’éventuel réchauffement des relations entre Cube et des États-Unis a été évoqué dans un document du gouvernement fédéral en 2012, qui recommandait aux exportateurs de bâtir et de préserver de solides relations avec Cube pour éviter de perdre des parts de marché si l’embargo américain en venait à être levé ou modifié.

«Il pourrait venir un temps où la clientèle établie avec un appui canadien à Cuba au cours des 50 dernières années sera rapidement remplacée par la concurrence de la part des producteurs américains», faisait valoir l’article, qui notait que Cuba était le 40e plus grand marché d’exportation pour le Canada en 2010.

«Par conséquent, le moment présent est des plus opportuns pour établir une présence sur le marché.»

Un autre expert sur les relations canado-cubaines s’attend aussi à voir surgir des difficultés.

«Cela va être plus compliqué — nous avions les coudées beaucoup plus franches pour nous déplacer à Cuba», a observé John Graham, un ex-diplomate canadien qui a été espion pour la Central Intelligence Agency (CIA) à Cuba dans les années 1960.

«Le Canada a une longueur d’avance, mais (…) ma parole, cela va galvaniser le climat d’investissement à Cuba. Cela va rendre Cuba bien plus attrayante pour l’investissement étranger.»

Sherritt International (TSX:S), qui exploite des activités minières de nickel et de cobalt à Cuba, est une des sociétés canadiennes avec de profondes racines dans le pays.

Son président et chef de la direction, David Pathe, a indiqué mercredi que Sherritt était le plus grand investisseur étranger à Cuba, où il se trouve depuis 20 ans. Sherritt y produit en outre 20 000 barils de pétrole par jour et joue un rôle dans la génération d’énergie, a-t-il ajouté.

«Nous avons exploité nos activités dans les limites de l’embargo américain pendant toute cette période et nous avons réussi à y connaître du succès, indépendamment de ces restrictions», a noté M. Pathe dans un entretien.

«Si les annonces (de mercredi) représentent un pas vers l’allégement de certaines de ces inquiétudes du point de vue du marché, alors que crois qu’il s’agit d’un développement positif pour Cuba, et par conséquent, d’un développement positif pour nous.»

M. Pathe est confiant de voir ce changement donner éventuellement à Sherritt un meilleur accès au marché américain pour ses produits et fournitures.

Mais M. Pathe et sa famille espèrent aussi que le réchauffement des liens entre les États-Unis et Cuba saura leur profiter au niveau personnel.

Depuis les années 1990, la loi américaine empêche les dirigeants d’entreprises étrangères qui font affaires à Cuba, ainsi que leur familles, ne peuvent pas voyager aux États-Unis.

M. Pathe, un citoyen canadien, est parmi ceux qui se sont vu interdire d’entrer aux États-Unis en vertu de la Loi Helms-Burton.

«C’est un phénomène étrange, a-t-il affirmé à propos de l’interdiction. Avec un peu de chance, (l’annonce de cette semaine) est un pas dans la bonne direction.»

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