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Trudeau baisserait l'impôt de la classe moyenne

GATINEAU, – Au nom du «rêve canadien» et de la justice sociale, Justin Trudeau promet de prendre aux riches pour redonner à la classe moyenne s’il est élu premier ministre du Canada en octobre prochain.

Le chef du Parti libéral du Canada (PLC) a dévoilé lundi un pan majeur de sa politique économique, concrétisant du coup son opération charme auprès des électeurs de la classe moyenne.

«Nous allons demander aux Canadiens qui en ont les moyens d’en faire un peu plus», a résumé M. Trudeau à des familles triées sur le volet qui s’étaient rassemblées dans un restaurant de Gatineau pour assister à son annonce.

Afin d’y parvenir, il propose de remanier les paliers d’imposition pour taxer davantage le «un pour cent» des ménages les plus fortunés et, par ricochet, en faire bénéficier les contribuables qui gagnent moins de 90 000 $.

En vertu du plan libéral, le taux d’imposition des ménages dont le salaire annuel oscille entre 44 701 $ et 89 401 $ passerait de 22 à 20,5 pour cent — une réduction de sept pour cent équivalant à une baisse d’impôt pouvant aller jusqu’à 670 $ par année, par personne.

Les Canadiens les mieux nantis, eux, se retrouveraient dans une nouvelle catégorie sur le plan fiscal: un palier d’imposition de 33 pour cent verra le jour pour ceux dont le salaire annuel dépasse les 200 000 $. Leur taux est actuellement plafonné à 29 pour cent.

Les taux d’imposition demeureraient inchangés pour les ménages dont le revenu annuel se situe entre 89 401 $ et 138 586 $ (26 pour cent) et ceux qui gagnent de 138 586 $ à 200 000 $ (29 pour cent).

Cette refonte du régime fiscal n’aurait pas d’incidence sur les revenus de l’État — le manque à gagner de 3 milliards $ en économies d’impôt pour la classe moyenne serait compensé par les 3 milliards $ en revenus générés par les hausses d’impôt des plus riches, selon le plan libéral.

Le remaniement vise à redonner aux Canadiens de la classe moyenne la chance de prospérer, a plaidé Justin Trudeau, l’air décontracté, sans veston ni cravate, dans un décor qui avait tout des mises en scène que l’on voit en campagne électorale.

«Nous devons aux familles ce que nous avions tous dans notre enfance. Cette certitude que l’avenir sera meilleur», a-t-il lancé.

«C’est ça, le rêve. Ce rêve très canadien qu’on a ravi à trop d’entre nous pour le bénéfice de quelques privilégiés», a poursuivi M. Trudeau, continuant à présenter le gouvernement Harper comme une formation qui privilégie les plus riches au détriment de la classe moyenne.

Le chef libéral, qui se faisait reprocher depuis des mois sa timidité à formuler des engagements concrets et chiffrés, a également annoncé une deuxième pièce maîtresse de son programme, lundi.

Il a promis que si le PLC était porté au pouvoir, il abolirait la Prestation fiscale canadienne pour enfants (PFCE) et la Prestation universelle pour la garde d’enfants (PUGE) pour les remplacer par l’Allocation canadienne aux enfants (ACE).

«La nouvelle allocation pour enfants sera simple, mensuelle et libre d’impôts. Mais par-dessus tout, elle sera équitable», a-t-il résumé.

Cette allocation atteindrait jusqu’à 6400 $ par année, soit 533 $ par mois, pour chaque enfant âgé de moins de six ans et jusqu’à 5400 $ annuellement par enfant âgé entre six et 17 ans.

Justin Trudeau a soutenu que toutes les familles avec des enfants âgés de moins de 18 ans et dont le revenu annuel est inférieur à 150 000 $ recevraient ainsi plus d’argent qu’elles n’en obtiennent avec les mesures conservatrices.

Cette mesure coûtera 22 milliards $ par année. Elle sera financée par les économies réalisées grâce à l’abolition de la PFCE (10 milliards $) et de la PUGE (8 milliards $), mais également par l’annulation du fractionnement du revenu, qui rapportera 2 milliards $.

Les libéraux n’ont pas précisé où ils iraient chercher les 2 milliards $ manquants, mais ils ont laissé entendre qu’ils pourraient notamment utiliser le surplus budgétaire de 1,7 milliard $ qui est prévu en 2016-2017.

L’annulation de l’augmentation du plafond du Compte d’épargne libre d’impôt (CÉLI), que le gouvernement Harper a promis de faire passer de 5500 $ à 10 000 $, pourrait aussi permettre de financer l’allocation, a indiqué M. Trudeau.

«Mais en plus de ça, on va faire des choix très différents de ce gouvernement conservateur», a indiqué le député de Papineau lors du point de presse qui a suivi son allocution.

Les conservateurs ont rapidement taillé en pièces le plan libéral, le résumant avec une expression que l’on risque d’entendre abondamment d’ici les élections prévues le 19 octobre prochain.

«Voilà la taxe Trudeau», a lâché en point de presse le ministre de l’Emploi et du Développement social, Pierre Poilievre.

Les libéraux «croient qu’on ne peut pas faire confiance aux parents (pour) dépenser leur propre argent» et ont dit «que les parents dépenseraient cet argent sur la bière» et du «maïs soufflé», a-t-il raillé.

Le ministre Poilievre faisait référence à une bourde commise en 2005 par le directeur des communications de l’ex-premier ministre libéral Paul Martin.

«Ne donnez pas aux familles 25 dollars par jour pour qu’elles aillent le dépenser en bière et en ‘popcorn’, donnez-leur des places en garderie», avait lâché Scott Reid en pleine campagne électorale.

Dix ans plus tard, Justin Trudeau laisse entendre que l’implantation d’une allocation ne signifie pas que ses troupes ont fait une croix sur la promesse libérale de longue date de créer un programme national de garderies.

«Nous allons avoir d’autres choses à dire dans les semaines et les mois à venir sur la petite enfance», s’est-il contenté de répondre lorsqu’on lui a posé la question à l’issue de son discours.

Le Nouveau Parti démocratique (NPD), pour sa part, s’est engagé à créer un réseau national de garderies à 15 $ par jour, a rappelé le porte-parole de la formation en matière de finances, Nathan Cullen.

Le député a dit vouloir étudier avec attention le plan mis de l’avant par les libéraux avant de le commenter davantage.

Mais sur la question des impôts, M. Cullen a fini par laisser tomber que les néo-démocrates s’étaient déjà engagés «à ne pas augmenter l’impôt sur le revenu pour l’ensemble des Canadiens».

De passage à Sept-Îles, son chef Thomas Mulcair a pour sa part critiqué le fait que le plan Trudeau ne comporte pas — pour l’instant, à tout le moins — de hausses d’impôt pour les entreprises.

Il a fait valoir que «les seuls Canadiens qui ne paient pas leur juste part en ce moment sont les grandes sociétés canadiennes».

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