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Le commissaire constate la situation de PKP

QUÉBEC – La situation exceptionnelle du chef péquiste Pierre Karl Péladeau, qui est actionnaire de contrôle du conglomérat Québecor, nécessite que les députés se penchent sur la question, a déclaré mardi le commissaire à l’éthique de l’Assemblée nationale, Jacques Saint-Laurent.

M. Saint-Laurent a constaté notamment que la fiducie sans droit de regard, qui peut être constituée par des députés afin d’éviter les conflits d’intérêts, a une efficacité limitée dans le cas où la totalité des actifs qui y sont placés sont constitués d’une entreprise unique.

«C’est une situation exceptionnelle et c’est la raison pour laquelle je propose de l’examiner», a-t-il dit.

Devant des députés qui ont questionné ses 23 recommandations pour améliorer leur code d’éthique, M. Saint-Laurent a également souligné que les risques de conflits d’intérêts sont proportionnels à l’ampleur des actifs détenus par un élu.

«Plus j’ai des activités financières ou économiques, plus j’ai des activités caritatives, ou toutes sortes d’autres activités, à l’extérieur de ma fonction de député, c’est autant de risques qui me tombent sur les épaules», a-t-il dit en donnant un exemple.

Selon le commissaire, qui a constaté que les filiales du secteur des médias de Québecor suscitent des questions légitimes sur le plan de l’apparence d’impartialité, le cadre actuel qui vise à éviter les conflits d’intérêts nécessite des raffinements.

«Je pense que le cadre est déjà très bien fait mais il s’agit de voir, est-ce que des situations comme celles qu’on vit justifieraient de le raffiner davantage», a-t-il dit.

M. Saint-Laurent a affirmé que plusieurs questions lui ont été adressées sur les règles d’éthique après la dernière élection, qui a permis à M. Péladeau de devenir député pour la première fois.

Aux députés qui devront décider si des modifications législatives sont nécessaires au code d’éthique, M. Saint-Laurent a expliqué que la présence d’entreprises du secteur des médias dans les actifs de M. Péladeau pose un problème particulier quant aux perceptions.

Selon le commissaire, les élus pourraient avoir avantage à être à l’avant-garde à ce sujet.

«Les gens disent: est-ce qu’il y a une possibilité que par une propriété aussi importante au niveau des médias, l’influence exercée fasse en sorte qu’on favorise l’image, a-t-il dit. Ou, à l’inverse, est-ce que c’est possible que, par l’importance de l’intérêt, et par la nature, l’intervention ait pour effet qu’on ternisse l’image des adversaires. Ce sont des questions intéressantes et pertinentes et pour lesquelles il faut discuter à mon avis.»

M. Saint-Laurent a rappelé que la fiducie sans droit de regard est un moyen utilisé pour éviter les cas de conflits d’intérêts liés notamment aux délits d’initiés par lesquels un élu pourrait augmenter sa position sur les marchés grâce à des informations privilégiées.

Dans certains cas, recourir à ce dispositif ne permet toutefois pas de contrer la perception d’un risque de conflit d’intérêts, notamment quand la fiducie contient des actions d’une seule et unique entreprise, a déclaré le commissaire en citant une situation théorique.

«Dans ces cas-là, même s’il y a une fiducie ou un mandat sans droit de regard, on sait très bien que Jacques est toujours propriétaire de son entreprise donc c’est un peu fictif, a-t-il dit. Est-ce qu’on pourrait faire quelque chose qui ferait en sorte qu’on atteindrait mieux l’objectif de distance qu’on veut créer?»

M. Saint-Laurent a invité les élus à s’interroger sur les limites à définir dans les cas où un député dispose d’actifs qui le placent dans une situation exceptionnelle.

«Sur un aspect comme celui-là, il y aurait peut-être intérêt à ce que les membres de l’Assemblée nationale précisent leurs attentes, leurs pensées à ce sujet parce que s’il n’y a pas de précisions d’apportées, dans le contexte déjà planifié au code, c’est le commissaire qui à l’occasion d’avis, d’enquêtes, aura à prendre les décisions qu’il doit prendre», a-t-il dit.

Juste avant que M. Saint-Laurent soit entendu en commission parlementaire concernant son plus récent rapport, M. Péladeau a laissé planer la possibilité que Québecor passe à des intérêts hors-Québec si jamais il était forcé de vendre son bloc de contrôle.

Dans une entrevue à la radio, M. Péladeau a affirmé que personne au Québec ne serait en mesure de payer 5 milliards $ pour conserver l’entreprise en sol québécois.

Sur les ondes de la station de radio FM93, M. Péladeau a donné l’exemple de la vente récente du Cirque du Soleil, qui n’a pas trouvé preneur au Québec.

«Demain matin, il va falloir que quelqu’un fasse un chèque de 5 milliards pour acheter Québecor. On a vu qu’avec le Cirque du Soleil, ils étaient peu nombreux à pouvoir le faire. Est-ce que c’est ce que le Québec souhaite: perdre une entreprise qui fait travailler des milliers de personnes? (…) Est-ce qu’effectivement on veut perdre un autre siège social?»

M. Péladeau s’est défendu de faire diversion au débat sur sa situation en laissant planer la menace du déménagement de Québecor à l’extérieur du Québec.

«C’est pas une question de peur, a-t-il dit. C’est une question réel et factuellement, le jour où je vends mes actions tout le monde va pouvoir les vendre et ce sera ce qu’on appelle une prise de contrôle.»

Du même souffle, M. Péladeau a écarté toute possibilité de vendre ses actions, qu’il souhaite conserver, après avoir reçu le contrôle de Québecor de son père Pierre Péladeau.

«C’est important pour moi qu’elles restent entre les mains d’un Péladeau», a-t-il dit.

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