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Procès Turcotte: deux gardiennes à la barre

Stéphanie Marin - La Presse Canadienne

SAINT-JÉROME, Qc – «Tu ne me connais pas», aurait déclaré Guy Turcotte le regard en colère, faisant ainsi peur à une ancienne voisine qui tentait de le raisonner, une semaine avant qu’il ne tue ses deux enfants.

Johanne Leclair, qui habitait la maison voisine de celle d’Isabelle Gaston et de Guy Turcotte, fréquentait le couple depuis 2003 et gardait assez fréquemment les deux bambins.

L’homme est accusé d’avoir tué, le 20 février 2009, ses deux enfants, Olivier, 5 ans, et Anne-Sophie, 3 ans. Il a plaidé non coupable aux deux accusations de meurtre avec préméditation mais a toutefois admis avoir causé leur mort.

Mme Leclair a témoigné que Guy Turcotte était passé chez elle, une semaine avant le drame, car il voulait confirmer si elle pouvait bel et bien garder les enfants, le 21 février en après-midi. Le couple venait de se séparer, fin janvier, et Guy Turcotte avait leur garde cette fin de semaine-là.

Lors de cette conversation, «il m’a dit que ce qu’il trouve le plus dur, c’est d’être cocu», a témoigné la dame.

Il lui aurait alors raconté qu’un matin, alors qu’il s’était rendu dans la maison conservée par son ex-conjointe après leur séparation, il y a vu, «dans sa cuisine», Martin Huot, avec lequel elle avait entamé une relation, avant que la leur n’ait pris fin. Il a admis à Mme Leclair avoir donné à l’homme un coup de poing au visage.

Elle a dit avoir tenté de le raisonner, lui faisant valoir qu’il ne pouvait se permettre de tels gestes, puisqu’il est un homme public avec une carrière.

«Je lui ai dit: ‘ça se peut pas Guy, tu es tellement gentil….’»

«Il a dit : ‘Tu ne me connais pas’ avec un regard que je n’avais jamais vu.» Un regard de colère. «Ce regard-là, je le connaissais pas», a-t-elle dit, la voix souvent coupée par l’émotion.

«Il a avancé vers moi en me pointant. J’ai eu peur, j’ai reculé», a témoigné Mme Leclair.

«Si tu savais comme ça m’a fait du bien», aurait-il aussi déclaré selon ce témoin, au sujet du coup de poing asséné à son rival.

Après, il se serait rapidement calmé, et aurait dit à Mme Leclair qu’elle avait raison.

Pourtant, à peine une semaine avant, il était calme et posé en parlant de la séparation, a témoigné Mme Leclair. Dans une rencontre précédente, il aurait dit que cela faisait presque deux ans qu’Isabelle et lui-même ne se rejoignaient plus comme couple, et que la séparation était une bonne chose.

Le soir du tragique dénouement, le 20 février à 20h30, Guy Turcotte a appelé son ex-voisine.

Dans un appel fort bref, de quelques secondes à peine, il dira: «Mes plans ont changé, je n’aurai plus besoin de vous». Mme Leclair devait garder les enfants le lendemain, en après-midi.

Son ton de voix était clair, le débit était normal, mais il était triste, a témoigné la dame.

Carole Lachance a aussi témoigné mardi. Elle tenait une garderie et s’occupait d’Olivier et d’Anne-Sophie, qu’elle a décrits comme «deux petits anges».

En avril 2009, soit plus d’un mois après le drame, elle a reçu un appel de Guy Turcotte.

L’homme s’est excusé de lui avoir fait de la peine. «Il a dit: ‘je sais que tu les aimais comme une grand-maman’», a relaté Mme Lachance.

Il aurait aussi déclaré lors de cette conversation téléphonique: «ça fait 10 ans que je suis malheureux. Il y a deux ans, j’avais fait un scénario semblable».

Il n’a toutefois pas été précisé si le scénario faisait référence au suicide ou au meurtre des enfants. Mme Lachance ne lui a pas posé la question.

En contre-interrogatoire, l’avocat de l’accusé, Pierre Poupart, a tenté de lui faire dire que cela faisait référence, selon elle, à une tentative de suicide, mais le juge l’a interrompu, puisqu’un témoin n’a pas à donner son opinion, mais uniquement à rapporter les faits.

Mme Lachance, bouleversée lors de son témoignage, a rapporté avoir dit à Guy Turcotte qu’elle aurait aimé le voir le jour du drame: il était venu chercher Anne-Sophie à la garderie en après-midi alors qu’elle s’était absentée.

«Je lui ai dit que je regrettais l’avoir manqué. Qu’un geste, une parole aurait pu tout changer.»

«Il a dit que j’aurais pas pu savoir, que j’aurais pas pu deviner.»

Dans cette conversation qui durera 10 à 15 minutes, l’accusé lui dira aussi «qu’il est le moins fou des fous qui étaient là». Le témoin l’ignorait à l’époque, mais Guy Turcotte se trouvait alors à l’Institut psychiatrique Philippe-Pinel.

Comme Mme Leclair, elle a dit de Guy Turcotte qu’il était un père présent, amoureux de ses enfants. Elles ne l’ont jamais vu agressif ni violent.

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