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Le syndicat des Métallos demande à la Cour de faire cesser les activités d’Uber

A group representing local taxi drivers react after depositing a request for an injunction against the ride sharing company Uber at the courthouse Tuesday, February 2, 2016 in Montreal. THE CANADIAN PRESS/Ryan Remiorz Photo: Ryan Remiorz/THE CANADIAN PRESS

Le syndicat des Métallos demande à la Cour supérieure de déclarer illégales les activités du service de taxi parallèle Uber et d’y mettre un terme à la source, c’est-à-dire d’ordonner la désactivation de ses applications.

Le Regroupement des travailleurs autonomes Métallos (RTAM) a déposé mardi matin une demande en jugement déclaratoire et l’émission d’une injonction permanente dans laquelle il soutient que les activités d’Uber contreviennent à la Loi sur le transport par taxi.

Le Regroupement, qui représente 4000 des 22 000 chauffeurs de taxi de la province, affirme qu’Uber fournit des services similaires à celui offert par les taxis, sans que ses chauffeurs ne détiennent les permis requis, et encourage ceux-ci à commettre des infractions à la Loi.

“Quand on envoie une requête à Uber, que ce soit par téléphone ou par l’application mobile, on demande en fait une requête de service et cette requête de service c’est communément ce qu’on appelle la répartition d’appels et c’est encadré par la Loi et, donc, ça s’avère être un travail de répartiteur, d’intermédiaire de taxi et Uber le fait sans permis, donc tout à fait illégalement”, a déclaré l’avocat du RTAM, Marc-Antoine Cloutier, lors d’un point de presse devant le palais de justice de Montréal dans les minutes suivant le dépôt de la requête.

Le Regroupement demande au tribunal d’ordonner à Uber de cesser de fournir des services de cette nature, d’interdire aux chauffeurs et clients d’offrir et d’utiliser ces services et d’obliger Uber à rendre inactives ses applications.

Selon Me Cloutier, il est tout à fait possible de bloquer l’application sur le Web.

“Ce n’est pas très complexe. Ils savent comment faire naître la possibilité pour les gens d’avoir accès à une application ici au Québec; ils sont capables de faire en sorte qu’on n’y ait plus accès”, a-t-il indiqué.

La requête ne vise pas que l’entreprise, mais aussi ses chauffeurs puisqu’elle demande au tribunal de déclarer que toute personne qui rend des services de transport rémunérés via Uber sans détenir de permis de taxi agit illégalement.

Si la demande était accueillie, selon Me Cloutier, un chauffeur oeuvrant pour Uber “serait soumis à un processus d’outrage au tribunal et là on parle de conséquences beaucoup plus importantes que la saisie d’un véhicule”.

Uber Canada a réagi en qualifiant la requête de “poursuite protectionniste sans fondement” qui vise “à préserver le monopole de l’industrie du taxi au détriment des consommateurs”.

Dans un communiqué transmis à La Presse Canadienne, son porte-parole, Jean-Christophe de Le Rue, a réitéré la position que défend Uber sur toutes les tribunes, à l’effet qu’Uber est un service de covoiturage et que “le taxi traditionnel et le covoiturage urbain peuvent se compléter mutuellement pour mieux servir les besoins des usagers”.

L’entreprise invoque des décisions des tribunaux à l’extérieur du Québec qui lui ont donné raison, du moins partiellement, dans certaines juridictions, notamment en Ontario.

Marc-Antoine Cloutier note toutefois que la législation québécoise présente des obstacles auxquels Uber n’a pas été confrontée jusqu’ici.

“Nous avons une réglementation provinciale qui est tout à fait unique et qui définit — une des seules législations mondiales à définir — ce qu’est du covoiturage, c’est-à-dire que ce n’est pas Uber”, fait-il valoir.

Selon la loi québécoise, le covoiturage désigne des gens qui partagent la route pour un trajet qui était déjà prévu sans rémunération.

“On n’est pas en face de covoiturage mais vraiment en face de gens qui font du voiturage de taxi contre rémunération, ce qui est totalement illégal”, insiste Me Cloutier.

Uber Canada entend poursuivre en même temps ses efforts pour légaliser son statut. “Nous continuerons à collaborer avec le gouvernement pour trouver des solutions (…) qui permettront de mettre en place un cadre réglementaire équitable pour tous les intervenants”, affirme M. de Le Rue.

À cet égard, Me Cloutier n’écarte pas la possibilité d’inclure à terme le gouvernement du Québec dans une procédure si celui-ci en venait éventuellement à permettre à Uber de mener ses activités.

“C’est ce même État qui a créé un système de quotas de permis de taxi, de protection du public, de protection des consommateurs. Ils ne peuvent pas tout simplement demain matin dire: on va créer un autre système et exproprier les chauffeurs de taxi de la valeur de leur permis”, a fait valoir le juriste.

“S’ils font ça, il y aura certainement des recours contre le gouvernement du Québec au nom des chauffeurs de taxi en dommages mais également en illégalité”, a-t-il ajouté.

Me Cloutier envisage, par ailleurs, une seconde procédure sous la forme d’une poursuite civile en dommages et intérêts contre Uber pour la perte de revenus découlant des activités d’Uber.

“Il y a là des histoires de famille complexes, des dettes à supporter, des permis de taxi qu’ils ont valablement achetés et donc forcément, dans un second lieu, il y aura lieu d’indemniser ces gens-là, il n’y a pas de doute”, a-t-il dit.

Quant à l’argument voulant que l’industrie refuse tout simplement de se moderniser, l’avocat le balaie du revers de la main, rappelant qu’Uber n’est pas qu’une simple technologie, mais bien un acteur qui cherche à s’insérer à tous les niveaux dans une industrie réglementée, sans se plier aux règles du jeu.

“Ce n’est pas parce qu’on est pour l’amélioration technologique qu’on doit laisser n’importe quelle multinationale venir ici sans respecter les tarifs imposés par la Commission des transports, sans respecter les obligations de vérification des véhicules, vérification des antécédents et surtout venir établir un système parallèle, une concurrence déloyale”, fait-il valoir.

Uber, qui dispose de 30 jours pour répliquer à cette demande d’injonction, a déjà signifié son intention de relever le défi dans l’arène juridique.

“Nous continuerons à défendre le libre choix des consommateurs en matière d’alternatives de transport”, écrit M. de Le Rue.

La requête présentée mardi matin vise Uber Canada, ainsi que Uber Technologies de San Francisco, Uber B.V. à Amsterdam aux Pays-Bas ainsi qu’une de ses filiales, Raiser Operations B.V., également à Amsterdam.

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