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Sir Michael Marmot: «Nous savons comment réduire les inégalités en santé»

Photo: Chantal Lévesque/Métro

Sir Michael Marmot, un médecin britannique président de l’Association médicale mondiale, étudie les effarantes inégalités en santé à travers le monde depuis près de 40 ans. En tournée à travers le monde pour parler de son nouveau livre: The Health Gap – The Challenge of an Unequal World, Sir Michael espère inciter la population et les décideurs à penser la santé autrement. Métro a discuté avec lui dans le cadre de son passage à Montréal aujourd’hui.

Pourquoi dites-vous qu’il faut radicalement changer notre façon de définir la santé?
Les gens considèrent généralement que la santé est uniquement une affaire de soins. Mais ce n’est pas le manque de soins qui a causé leurs maladies au départ. Ce sont plutôt les conditions dans lesquelles ils sont nés, ont grandi, ont vécu et ont vieilli. Les inégalités sociales entraînent des problèmes de santé. Un changement radical serait de réaliser que ce que le ministère des Finances fait, ce que le ministère de l’Environnement fait, ce que le ministère de l’Éducation fait, tout ça est aussi important pour la santé.

Quelles statistiques démontrent ces inégalités de façon frappante?
L’espérance de vie dans certains pays d’Afrique subsaharienne est de moins de 50 ans alors qu’au Japon, pour les femmes, elle est de 86 ans. Pourtant, il n’y a pas de raison biologique qui explique cet écart. Même au sein d’un même pays, les inégalités sont choquantes. Un garçon vivant dans la partie la plus pauvre de Londres ou de Baltimore a une espérance de vie de 20 ans de moins qu’un garçon vivant dans sa partie la plus riche. [NDLR : Selon les données de la Direction de santé publique, la différence d’espérance de vie entre les quartiers les plus riches et les plus pauvres de Montréal est de 11 ans.]

Quels pays montrent la bonne voie à suivre et pourquoi?
Ceux qui ont le moins d’inégalités en santé sont la Suède et la Norvège. Pourquoi? Un bon système de soutien à l’enfance et d’éducation, des bonnes conditions de travail, de l’aide sociale généreuse. Au Canada, les dépenses publiques dans ces secteurs sont en danger depuis une dizaine d’années. Pourtant, les exemples tirés de l’Europe prouvent que plus les dépenses sociales sont généreuses, plus les citoyens sont en santé. Nous avons beaucoup de données sur les façons efficaces de réduire les inégalités, mettons-les en pratique.

Les gouvernements disent généralement qu’ils manquent d’argent pour soutenir les programmes sociaux. Que leur répondez vous?
Qu’il existe en fait beaucoup d’argent. Prenez les données d’Oxfam qui soulignent que les 62 personnes les plus riches du monde possèdent autant d’argent que la moitié la moins riche de la population de la planète réunie. La question est : comment organise-t-on nos systèmes de taxation pour rendre ces montants disponibles à l’amélioration des conditions de vie des citoyens? Ce sont des choix politiques.

Pas de progrès à Montréal
Sir Michael Marmot était invité vendredi par la Direction de santé publique de Montréal à donner une conférence. «Malheureusement, il n’y a pas beaucoup de progrès dans la réduction des inégalités sociales en santé [à Montréal], a souligné la Dre Marie-France Raynault, chef du Département de santé publique et médecine préventive du CHUM.

Les budgets des directions régionales de santé publique ont été diminués de 30% en 2015-2016. «Si l’importance de la prévention en santé était comprise [par nos dirigeants], on investirait vraiment là-dedans», a noté la Dre Raynault.

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