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Aide à mourir: une série d'amendement écartés

Photo: Getty Images

OTTAWA – Le premier ministre Justin Trudeau a assuré lundi après-midi que les libéraux étaient ouverts aux amendements de l’opposition pour son projet de loi sur l’aide médicale à mourir, mais cette ouverture ne s’est pas matérialisée en soirée à la réunion du comité qui a amorcé l’étude article par article de C-14.

Les libéraux, majoritaires autour de la table du comité de la justice et des droits de la personne, ont bloqué une série de propositions d’amendements qui auraient mené à un élargissement de l’accès à ces soins. Les suggestions conservatrices prônant un accès plus restreint ont subi le même traitement.

Les nombreuses tentatives de revoir les critères d’admissibilité à l’aide médicale à mourir ont échoué, les propositions du Nouveau Parti démocratique (NPD), du Bloc québécois et du Parti vert ayant été invariablement écartées par les libéraux, comme par les conservateurs.

Le rapport du comité ne recommandera donc vraisemblablement pas de redéfinir ou de retirer le critère de mort naturelle raisonnablement prévisible — une notion critiquée par de nombreux experts qui ont témoigné en comité — ou de retirer le terme incurable de la liste des conditions.

Les libéraux et conservateurs ont par ailleurs également bloqué la suggestion visant à inclure dans le projet de loi C-14 le droit au consentement préalable à des soins médicaux de fin de vie, qui avait été mise de l’avant par le député néo-démocrate Murray Rankin.

À l’issue de la réunion du comité, l’élu a affirmé qu’il comptait faire part de ses réticences à ses collègues de caucus, qui seront cependant libres de voter selon leur conscience.

Lui-même signale qu’il n’appuiera probablement pas C-14: «Je suis avocat. Je suis vraiment incapable, pour des raisons de conscience, de voter pour une loi qui est selon moi fondamentalement inconstitutionnelle», a tranché M. Rankin.

Même son de cloche de la part du leader parlementaire du Bloc québécois en Chambre, Luc Thériault, selon qui le projet de loi C-14 contrevient à la Charte canadienne des droits et libertés, et ouvre donc inévitablement la porte à des contestations judiciaires.

Il a par ailleurs déploré l’incohérence entre les propos rassurants que lui aurait offerts la semaine passée la ministre de la Justice, Jody Wilson-Raybould, et l’attitude subséquente des libéraux en comité.

«J’ai rencontré la ministre vendredi, je lui ai demandé si elle était ouverte à des amendements. Elle m’a dit ‘absolument’. Et puis on arrive aujourd’hui (lundi), et il n’y a absolument rien qui passe», a-t-il regretté.

Les députés Rankin et Thériault sont ainsi d’avis qu’une absence de loi serait préférable à une loi boiteuse. Et ils ne comprennent pas comment l’on puisse évacuer les débats de fond comme celui entourant le critère de la mort naturelle raisonnablement prévisible.

Un député libéral qui siège au comité, Rob McKinnon, s’est d’ailleurs abstenu de voter sur la proposition d’élargir l’accès à l’aide médicale à mourir au-delà de ce critère, arguant que modifier ce qui touche le «coeur du projet de loi» compromettrait ses chances d’être adopté à la Chambre des communes.

Au total, le comité doit scruter un peu plus de 130 suggestions d’amendements au cours de la semaine.

La majorité de ces propositions émanent des conservateurs.

Celle d’empêcher les infirmières praticiennes spécialisées de faire partie du processus a été écartée par le comité, lundi, tout comme celle visant à faire en sorte que chaque demande d’aide médicale à mourir doive être au préalable approuvée par un juge.

Aucune modification substantielle

Le député libéral Anthony Housefather, qui préside le comité de la justice et des droits de la personne, a indiqué lundi que le camp libéral ne comptait pas apporter des modifications substantielles à la pièce législative.

«Je crois que la plupart d’entre nous tenteront de corriger des éléments du projet de loi qui sont manquants ou qui manquent de précision, et non pas de changer radicalement le projet de loi», a-t-il résumé en mêlée de presse peu avant le début de la réunion.

L’étude article par article du projet de loi C-14 devrait durer au total environ 16 heures, selon M. Housefather, qui espère déposer le rapport du comité vendredi à la Chambre des communes.

Le gouvernement souhaite faire adopter la mesure législative avant la date butoir du 6 juin, qui a été fixée par la Cour suprême du Canada, plaidant que l’absence d’une loi pancanadienne provoquerait un vide juridique intenable.

Le premier ministre Trudeau avait soutenu lundi que les libéraux étaient «toujours ouverts à de bonnes idées, à de l’amélioration, à des projets de loi, proposés par les partis d’opposition» dans le processus législatif.

«En ce qui (a trait) à ce projet de loi précis, nous sommes en train d’étudier et les propositions de l’opposition et les différentes recommandations des Canadiens pour voir si on peut améliorer — si on a besoin d’améliorer — ce projet de loi», a-t-il offert.

Il ne reste plus que 14 jours de travaux parlementaires au calendrier avant l’échéance dictée par le plus haut tribunal au pays.

Après le dépôt du rapport du comité de la justice et des droits de la personne, le projet de loi C-14 doit faire l’objet d’un débat en troisième lecture en Chambre, puis il prendra la direction du Sénat, où il doit aussi être débattu.

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